Dans les dernières années, plusieurs études ont démontré que développer un lien fort avec un animal domestique est associé à des perceptions et à des sentiments plus positifs envers les autres animaux. C’est ce que l’on désigne comme étant l’effet pets as ambassadors. La professeure du Département de psychologie Catherine Amiot a voulu tester si cet effet pouvait s’étendre plus largement. «Nous voulions vérifier si le fait de posséder un animal de compagnie prédisait des attitudes plus positives envers les autres animaux, mais aussi s’il y avait un effet sur les attitudes environnementales et sociales», souligne-t-elle.
La relation avec un animal domestique est une relation de proximité, concrète, sur une base quotidienne. «C’est la raison pour laquelle il est intéressant de vérifier si le fait de côtoyer un animal domestique prédit les attitudes des gens dans d’autres sphères de leur vie», observe Catherine Amiot.
En 2021-2022, la professeure et son équipe avaient réalisé une étude démontrant que les animaux domestiques pouvaient être un fardeau en période de pandémie. La chercheuse, qui s’intéresse aux relations entre humains et animaux depuis une dizaine d’années, a publié plusieurs études sur le sujet, dont certaines sur la nature de nos liens avec le monde animal et une revue de la littérature parue en 2015 dans le Psychological Bulletin de l’American Psychological Association qui avait eu un impact important dans le domaine.
Pour cette nouvelle étude, son équipe a utilisé les données d’un sondage pancanadien réalisé en ligne en 2022 par la firme Léger. «L’échantillon retenu, qui comptait 1069 répondants, respectait le pourcentage de gens qui possèdent un animal domestique au Canada, soit 58 %», précise la chercheuse. Les personnes sondées pouvaient préciser la catégorie de leur animal domestique: oiseaux, chiens, chats, rongeurs, animaux exotiques, autres (un cheval, par exemple).
Les analyses ont d’abord comparé les personnes qui sont propriétaires d’un ou plusieurs animaux domestiques et les personnes qui n’en possèdent pas. L’étude s’est aussi intéressée aux contacts positifs et fréquents avec des animaux domestiques, des contacts qui peuvent être vécus même par les gens n’étant pas propriétaires d’animaux domestiques présentement.
«Les propriétaires d’animaux domestiques rapportent des attitudes plus positives envers les animaux en général, comme on s’y attendait, mais aussi des attitudes plus positives envers des exo groupes humains, c’est-à-dire des groupes auxquels ils n’appartiennent pas, notamment sur le plan culturel ou religieux», révèle Catherine Amiot.
Les propriétaires d’animaux rapportent également des considérations environnementales plus grandes que les non-propriétaires ainsi qu’une plus faible consommation de viande. «Il ne s’agit pas d’un lien de causalité, mais il semble que l’on soit plus sensible au végétarisme lorsqu’on est propriétaire d’un animal», note la professeure.
Les personnes qui ont des contacts positifs et fréquents avec des animaux domestiques sont aussi plus enclines à rapporter des attitudes positives envers les animaux en général, les autres groupes sociaux et l’environnement.
La professeure du Département de psychologie a publié les résultats de cette étude à titre de première autrice dans Scientific Reports, une revue éditée par Nature Publishing Group. Le doctorant Christophe Gagné, dont elle supervise la thèse, ainsi que le professeur de l’Université de Melbourne Brock Bastian, un collaborateur de longue date, sont également cosignataires de l’article.
Et l’empreinte carbone des animaux?
Si posséder un animal domestique semble développer l’empathie de ses propriétaires envers les autres animaux, le genre humain et même la planète, plusieurs se questionnent sur l’empreinte écologique de leur animal. La question est légitime: à l’heure où certaines personnes font le choix de ne pas avoir d’enfant pour préserver les ressources de la Terre, est-il conséquent de posséder un animal? «C’est un pensez-y bien, car un animal doit manger et la production de sa nourriture nécessite des ressources en énergie, souligne Catherine Amiot. Notre recherche ne tranche pas le débat, mais elle suggère que les propriétaires d’animaux s’interrogent sur ce paradoxe.»
Raffiner la recherche par espèces ?
Les données utilisées dans le cadre de cette étude n’ont pas été analysées selon les espèces d’animaux domestiques, mais il serait intéressant de le faire dans une étude ultérieure, car l’équipe possède ces données brutes, souligne la professeure, ouvrant ainsi la porte aux étudiantes et étudiants qui aimeraient investir ce champ de recherche. «Nous poursuivons nos recherches sur les relations humains-animaux afin de mieux comprendre pourquoi celles-ci sont à ce point bénéfiques pour certaines personnes», conclut Catherine Amiot, qui donne depuis l’an dernier un nouveau cours, Psychologie des relations humains-animaux, avec son collègue Jacques Forget.