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Stéphane Pallage cosigne un appel à défendre la liberté académique

L’autonomie universitaire est un pilier de la démocratie, rappellent le recteur et la présidente de l’Université de Lyon, Nathalie Dompnier.

9 octobre 2025 à 10 h 12

L’Assemblée des recteurs, présidents et directeurs d’établissements d’enseignement supérieur et de recherche des régions Auvergne-Rhône-Alpes et du Québec est réunie cette semaine à Lyon dans le cadre des Entretiens Jacques Cartier. À cette occasion, ses coprésidents, le recteur Stéphane Pallage et Nathalie Dompnier, présidente de l’Université de Lyon, ont publié une lettre dans le quotidien Le Devoir rappelant la nécessité de défendre la liberté académique et l’autonomie universitaire, qui font face à des attaques affaiblissant tant la recherche que la démocratie elle-même.

«La liberté académique est un élément essentiel d’une démocratie fonctionnelle, écrivent-ils. Cette liberté, dont jouissent les universitaires, leur permet notamment d’intervenir dans le débat public, sur la base de leur expertise disciplinaire et d’une analyse critique, pour nourrir la réflexion, pour éclairer la compréhension des enjeux et la prise de décision, pour établir aussi ce qui est un fait et ce qui ne l’est pas, en se fondant sur les consensus scientifiques formant un socle de connaissances objectives et objectivées.»

Selon les deux dirigeants, à l’heure où la désinformation devient une arme politique, ce rôle est plus important que jamais. Mais pour que les universitaires puissent l’assumer, leur indépendance vis-à-vis des pouvoirs économiques et politiques et des groupes de pression est essentielle.

«Il requiert en fait que les universités jouissent d’une réelle autonomie, poursuivent Stéphane Pallage et Nathalie Dompnier. Si une université était la propriété d’un magnat du pétrole, les recommandations de ses professeures et professeurs en sciences de l’environnement seraient certainement et justement regardées avec suspicion. Il en serait de même si l’État exerçait un contrôle sur les décisions académiques d’une université. En particulier, si l’État pouvait décider quel professeur mérite un financement et lequel n’en mérite pas, plus aucun professeur n’oserait contredire le gouvernement, même si la science l’exigeait.»

Liberté académique et autonomie universitaire vont de pair, rappellent les deux dirigeants. En effet, les professeures et professeurs qui partagent publiquement leur avis expert sont protégés d’éventuelles représailles par l’autonomie universitaire, qui garantit au public que cet avis est indépendant. Or, l’autonomie universitaire est menacée à plusieurs endroits dans le monde, à l’image de ce qui s’est passé en Hongrie ces dernières années et de ce qui se passe en ce moment aux États-Unis, où les attaques du président Trump contre les universités se multiplient.

«Le pouvoir législatif aux États-Unis a renoncé à exercer ses prérogatives de contrôle de l’exécutif, notent le recteur de l’UQAM et la présidente de l’Université de Lyon. Le judiciaire y fait l’objet d’attaques violentes et l’indépendance des cours, notamment de la Cour suprême, est chaque jour plus questionnable. La presse est également de plus en plus sous le contrôle de groupes d’intérêts, tandis que les médias sociaux ne sauraient constituer un contrepouvoir fiable. Il ne reste comme contrepouvoir aux États-Unis que celui des universités, celui de la science, celui du savoir. Monsieur Trump l’a très bien compris. L’attaque des universités vise à faire taire les universitaires.»

En France, au Québec et partout dans le monde, les rectrices, recteurs, présidentes et présidents d’universités vivent quotidiennement des attaques à l’autonomie universitaire. Si ces attaques relèvent parfois de la maladresse ou de la méconnaissance du rôle des universités, d’autres visent sciemment à intimider, soulignent les coprésidents. «Notre responsabilité est de dénoncer ces atteintes à la liberté académique et de faire en sorte que le droit soit respecté», écrivent-ils.

Rappelant que le Québec a choisi d’enchâsser la liberté académique dans une loi, que l’indépendance des enseignants-chercheurs est inscrite dans le code de l’éducation en France et que l’Union européenne, dans sa charte des droits fondamentaux, affirme le principe de liberté académique, les deux dirigeants affirment que ces garde-fous ne peuvent être efficaces qu’assortis de solides garanties dans leur application et que si l’autonomie universitaire est elle-même protégée par la loi.

«Nous invitons nos gouvernements à reconnaître officiellement le rôle fondamental des universités comme piliers de la démocratie, elles qui détiennent le pouvoir d’informer le public de façon indépendante et de former à l’esprit critique et scientifique. Nous invitons la France et le Québec à coopérer pour porter sur la scène internationale une voix forte pour la défense des libertés académiques et de l’autonomie universitaire», concluent le recteur et la présidente de l’Université de Lyon.