L’ancien recteur de l’UQAM Claude Corbo est l’une des quatre personnalités ayant reçu un doctorat honorifique de l’Université du Québec (UQ), le 18 octobre dernier, dans le cadre des festivités entourant la 50e année de fondation du réseau. La cérémonie avait lieu au Musée de la civilisation, à Québec, en présence de la rectrice Magda Fusaro, de la présidente de l’UQ, Johanne Jean, d’autres représentants du réseau et de partenaires. Les autres récipiendaires sont Charles E. Beaulieu, Yves Martin et Claire V. de la Durantaye.
Par ce geste, l’Université du Québec souhaite souligner la carrière remarquable de ces quatre personnes d’exception ayant contribué au rayonnement du réseau de l’Université du Québec et de la société québécoise.
«Pour le décrire, trois mots, une image: observateur avisé, esprit curieux et penseur généreux, a déclaré Magda Fusaro, qui présentait l’hommage à l’ancien recteur. Claude Corbo est un homme de réflexion et d’action. À la manière de la célèbre œuvre de Giacometti, L’Homme qui marche, il avance, avec sa silhouette mince, sa détermination sans failles et une constance qui détonnent à notre époque si portée aux tergiversations et aux retournements.»
Pendant près de cinq décennies, Claude Corbo s’est consacré au développement de l’Université du Québec à Montréal, d’abord, puis du réseau de l’Université du Québec, et ce, sans compter les nombreux organismes dans lesquels il s’est impliqué, des engagements qu’il poursuit toujours, même après sa retraite officielle.
Magda Fusaro a également souligné la contribution intellectuelle de Claude Corbo à la société québécoise. «Il est l’un de nos penseurs émérites! Il est aussi et surtout l’un des grands serviteurs de notre collectivité. Intellectuel engagé dans sa société, il cherche à comprendre son époque et à accompagner sa nation vers un développement harmonieux qui respecte l’humain et qui protège l’avenir.»
Lors de son allocution, Claude Corbo est revenu sur la création du réseau de l’UQ et de l’UQAM. «Je suis profondément heureux d’avoir pu contribuer au devenir de l’UQAM, a-t-il déclaré. Des rêves de 1969 est née une vigoureuse, vibrante et inventive université. Les autres établissements formant l’Université du Québec eurent à vivre, dans leurs contextes respectifs, des débuts et un cheminement tout aussi exigeants. Je les salue, comme je rends hommage aux artisans des premières heures de tous nos établissements pour leur foi en ce projet.»
Après avoir souligné la réussite des établissements de l’UQ, l’ancien recteur a tenu à rappeler la raison d’être de l’université, tiraillée de nos jours entre une vision utilitaire et une vision plus culturelle ou humaniste. «Je sens que, comme souvent pendant son histoire millénaire, l’université est menacée dans ce qui est la condition sine qua non de sa valeur: la liberté de pensée, de recherche, d’expression, d’enseignement. Aujourd’hui, la menace vient de la rectitude politique, des fondamentalismes religieux, et des censures en tous genres, celle des pouvoirs et celle des censeurs autoproclamés. Si l’université perd ses libertés, si les universitaires sont muselés ou, pire encore, s’ils choisissent le silence par la peur des représailles, la liberté disparaîtra, pas seulement de l’université, mais aussi de notre société et de notre vie.»
Le lauréat a conclu son allocution en souhaitant que les établissements de l’UQ témoignent d’une double fidélité, d’abord «à l’idée même d’université en demeurant des foyers de science et de culture, des forteresses de liberté et d’esprit critique», puis à «l’idée même d’Université du Québec, en demeurant des lieux de grande accessibilité au savoir, voués au développement optimal de chacun, incluant des plus doués, des agents d’innovation au service du milieu, incluant des moins nantis.»
Professeur, chercheur, auteur et gestionnaire
Né à Montréal en 1945 et diplômé du doctorat en philosophie de l’Université de Montréal (1973), Claude Corbo commence sa carrière universitaire au Département de science politique de l’UQAM, au moment même de sa création, en 1969. Ses activités d’enseignement et de recherche portent sur l’histoire de la pensée politique et sur le système politique des États-Unis.
Auteur prolifique à la plume aiguisée, il compte à son actif un nombre impressionnant d’essais, d’ouvrages, d’anthologies et même d’œuvres de théâtre et de fiction.
Dès 1974, Claude Corbo entreprend une carrière administrative à l’UQAM. «On peut aisément qualifier cette carrière de remarquable par sa durée, mais surtout par l’influence qu’il aura sur le devenir de cette université», note Magda Fusaro.
D’abord vice-doyen, puis registraire, doyen et vice-recteur, il prend la barre de l’établissement à titre de recteur à compter de 1986. Ce mandat est notamment marqué par l’octroi à l’UQAM du statut d’université associée au sein du réseau de l’Université du Québec. Après une décennie à la tête de l’UQAM, il revient à la vie universitaire comme professeur. Dix ans passent encore et, alors que l’UQAM fait face à des défis importants, Claude Corbo, fidèle à ses convictions et soucieux de l’avenir de cette institution qui lui tient tant à cœur, est nommé à nouveau au rectorat en 2008. Pendant ce troisième mandat, il se consacre à la relance de l’institution et au rétablissement de la santé financière de celle-ci.
Après plus de quatre décennies passées au service de l’UQAM, Claude Corbo quitte le rectorat et l’université. Il poursuit cependant son engagement au service du réseau de l’Université du Québec. «Encore aujourd’hui, l’UQAM et le réseau peuvent toujours compter sur sa vaste expérience et sur sa vision stratégique quant au rôle des universités dans la société», note la rectrice.
L’engagement de monsieur Corbo ne se limite pas au milieu universitaire. Tout au long de sa carrière, il a été une personne engagée au service de la communauté tant montréalaise que québécoise. Dans la métropole, par exemple, il a présidé, en 2004, une consultation publique sur un projet de Charte montréalaise des droits et responsabilités. La même année, le comité exécutif de la Ville l’a nommé président de la Table de concertation du Mont-Royal, qu’il dirigera pendant plus de 10 ans. On le retrouve également très investi dans le monde de la culture et du patrimoine, entre autres comme vice-président de la Fondation du Théâtre du Nouveau Monde, président du Groupe de travail sur l’avenir du réseau muséal au Québec, coprésident du comité sur l’avenir de la bibliothèque Saint-Sulpice ou encore comme cotitulaire d’un mandat de la ministre de la Culture et des Communications en matière de gouvernance du patrimoine culturel immobilier.
Il réalise aussi plusieurs mandats en matière de sécurité publique, un domaine où il s’est démarqué depuis plus de 20 ans, notamment comme président du Groupe de travail du ministère de la Sécurité publique sur les relations entre le Service de police de la Communauté urbaine de Montréal et les communautés noires.
L’envergure et la diversité de ses contributions ont été récompensées par de nombreux honneurs provenant de différents milieux, notamment l’Ordre national du mérite de France (1990), la Société royale du Canada (2010), et l’Ordre national du Québec (2013).