Série Prix Reconnaissance UQAM 2017
Sept diplômés de l’UQAM seront honorés à l’occasion de la Soirée Reconnaissance 2017 pour leur cheminement exemplaire et leur engagement. Ce texte est le sixième d’une série de sept articles présentant les lauréats.
La présidente de l’Ordre des psychologues du Québec s’est d’abord intéressée à la psychologie pour mieux comprendre l’humain… comme tous les psychologues. Si elle a décidé de poursuivre des études supérieures en neuropsychologie, une discipline qui étudie les liens entre les structures cérébrales et le comportement humain, c’était afin d’en arriver à une compréhension encore plus profonde de notre fonctionnement intime. «À l’époque, l’UQAM était la seule université qui offrait une formation doctorale en neuropsychologie clinique, explique Christine Grou (Ph.D. psychologie, 1992). J’avais un intérêt plus marqué pour l’étude des fonctions cérébrales supérieures, comme la cognition et la mémoire, que pour la science des émotions. La neuropsychologie m’a permis de mieux comprendre ce qui se passait à l’intérieur du cerveau et de m’apercevoir à quel point l’être humain est complexe!»
Chef de la discipline de psychologie de l’Institut universitaire en santé mentale de Montréal avant d’être élue présidente de l’Ordre, en 2015, Christine Grou a passé 30 ans dans les hôpitaux, où elle a été psychologue et neuropsychologue clinicienne ainsi que superviseure clinique auprès de nombreux doctorants en neuropsychologie. Selon elle, les fonctions cérébrales supérieures ne sont jamais dissociées des comportements émotionnels des êtres humains. «J’ai beaucoup appris des patients et de leurs confidences, en particulier ceux en santé mentale. Oui, on accumule beaucoup de connaissances à l’université, par nos lectures et durant nos formations continues, mais on développe un savoir important en côtoyant nos patients. Ils évoluent avec nous et nous apprennent énormément par leur expériences et par leur compréhension de la vie.»
Des soins plus accessibles
Depuis que la neuropsychologue siège à l’Ordre, elle a fait de l’accessibilité aux services de soins en santé mentale son cheval de bataille. «Tout comme la santé physique, la santé psychologique doit être traitée gratuitement, martèle Christine Grou. Même s’ils sont moins apparents qu’un arrêt cardiaque, les problèmes de santé psychologique sont tout aussi dommageables. Dans une société comme la nôtre, il devrait être normal d’avoir accès gratuitement et rapidement à des traitements de psychothérapie.»
La présidente de l’Ordre a planché récemment sur le dossier de l’accessibilité aux traitements psychologiques dans les CHSLD, d’une part, et dans les écoles, d’autre part, «afin de favoriser la réussite scolaire». Ce dossier relève à la fois des ministères de la Santé et de l’Éducation, explique-t-elle. «Nous voulons améliorer l’offre pour les enfants et les personnes âgées, deux types de populations vulnérables.»
La question de la qualité des soins professionnels préoccupe également cette adepte de la formation continue. «À l’Ordre, nous sommes en train de revoir le processus par lequel nous examinons la qualité des pratiques des psychologues», précise Christine Grou. La loi réservant l’activité de la psychothérapie et l’évaluation des troubles mentaux à certains professionnels, dont les psychologues, a constitué un acquis important pour la profession ainsi que pour la protection du public. Pour garantir la compétence des professionnels, il leur est maintenant nécessaire d’obtenir un diplôme de doctorat pour exercer la profession de psychologue et de suivre une formation continue tout au long de leur carrière. «Une culture de la formation continue s’est développée depuis quelques années au Québec», observe la présidente de l’Ordre.
Nouvelles pratiques
Selon Christine Grou, la psychologie se caractérise par un travail intellectuel rigoureux, sans pour autant perdre de vue l’importance de l’aspect relationnel. «Il faut rester à l’affût des avancées de la science et des nouvelles pratiques en psychologie, tout en gardant son sens critique. Il faut être capable de se servir des nouvelles connaissances à bon escient et garder en tête que les nouvelles manières de faire doivent d’abord être bénéfiques pour les patients.» Pour traiter les troubles anxieux, illustre la neuropsychologue, des approches populaires ont tendance à être privilégiées d’emblée, «alors qu’un traitement différent serait plus approprié, dans certains cas, pour soigner un patient ou pour mieux comprendre certains aspects de sa personnalité».
Il est donc nécessaire pour le psychologue de développer une culture psychologique et de se montrer curieux, dit celle qui exerce toujours en cabinet privé. «La formation continue, la pratique sur le terrain, l’expérience des patients et l’avis de collègues plus expérimentés ou formés dans différents domaines de la psychologie peuvent aider le professionnel à améliorer ses pratiques et à mieux comprendre ses patients.»
Christine Grou se réjouit du développement récent des pratiques psychologiques. «Depuis 30 ans, la pratique se diversifie énormément, observe-t-elle. On trouve désormais des psychologues communautaires, des neuropsychologues, des cliniciens spécialisés en gériatrie, en pédiatrie ou en psychologie des organisations et du travail. Il existe maintenant différentes approches et paradigmes théoriques qui permettent la compréhension du comportement humain sous différents angles complémentaires. Cela apporte une grande richesse à la psychologie.»
Outre le fait d’avoir élevé ses deux enfants, sa plus grande fierté est d’avoir su développer une plus grande conscience réflexive. «Il est important de réfléchir à ses propres enjeux et aux enjeux de sa pratique, sans tomber dans la radicalisation, croit celle qui a remporté en 2008 le prix professionnel de l’Ordre des psychologues du Québec pour ses réalisations professionnelles remarquables et pour s’être démarquée comme chef de file dans son domaine. La connaissance ne nous donne pas de certitudes. Quand je vois des psychologues qui doutent et gardent leur capacité de réfléchir, je suis rassurée! Ils veulent faire ce qui est le mieux pour la société et pour leurs patients.»