
En janvier prochain, un groupe composé de sept spécialistes du tourisme d’aventure partira à la conquête de territoires inexplorés en Antarctique. Leur but est de repousser les frontières du monde connu en gravissant quelques-uns des sommets vierges de ce continent hostile, réputé comme étant le plus froid, le plus sec et le plus venteux de la planète. Baptisée XPAntarctik, l’expédition comporte un volet scientifique, dirigé par les professeurs Jean P. Boucher et Alain Steve Comtois, du Département de kinanthropologie.
Alexandre Byette, Marina Lançon, Emmanuelle Dumas, François Mailhot, Samuel Ostiguy, Caroline Côté et Andrée-Anne Parent amorceront leur périple à Ushuaïa, en Argentine, d’où ils embarqueront à bord du voilier Spirit of Sydney, qui traversera le passage Drake en direction de Prospect Point. Ce passage est reconnu pour être le plus tumultueux de la planète. Traverser les 1000 km qui séparent l’Amérique du Sud de l’Antarctique leur prendra environ une semaine.
Une fois sur le continent, leurs seuls moyens de transport seront leurs skis de haute randonnée et leur équipement d’alpinisme. Chaque membre de l’expédition tirera deux pulkas (traîneaux) qui totaliseront plus de 70 kg de charge – surtout de la nourriture. L’itinéraire qui les mènera vers l’ascension de sommets jusqu’ici inexplorés comporte quelque 300 km, souvent en terrain accidenté. Pour accéder aux montagnes, ils devront progresser sur des glaciers. Ils devraient être de retour en Argentine 45 jours après leur départ.
Des mesures physiologiques
Le leader de l’expédition, Alexandre Byette, a contacté les chercheurs de l’UQAM à l’automne 2012. Ceux-ci ont immédiatement accepté son offre. «Nous allons documenter les effets du froid et de ce type de périple sur le corps humain», souligne Jean P. Boucher. Les températures de l’Antarctique, précise-t-il, oscillent entre -5 degrés Celsius et -40 degrés Celsius (l’expédition aura lieu lors de l’été austral).

«Nous mesurerons les fréquences cardiaques, le rythme respiratoire, la dépense énergétique, la masse musculaire, la masse adipeuse, les aspects inflammatoires et les hormones liées au stress – à partir d’échantillons de salive et de cheveux, précise Alain Steve Comtois. Nous mesurerons également la densité osseuse, car lorsque les réserves de gras sont épuisées, le corps puise dans les os.» Les données seront recueillies chaque jour par la doctorante en biologie Andrée-Anne Parent, qui travaille sous la direction d’Alain Steve Comtois. «Elle ne devait pas partir avec eux, mais un participant s’est désisté, raconte le professeur Comtois, spécialiste de la préparation et de l’évaluation physique. Elle a sauté sur l’occasion et sera ainsi en mesure de vivre l’aventure de l’intérieur à titre de spécialiste scientifique. Cela constituera son projet doctoral.» La jeune chercheuse transmettra les données aux professeurs Comtois et Boucher par satellite.
Une préparation adéquate
Les trois chercheurs ont d’abord évalué les besoins des aventuriers en matière de conditionnement physique. «Ce ne fut pas trop difficile: ce sont des athlètes aux corps bien entraînés, avec un pourcentage de gras dans les limites inférieures, note Jean P. Boucher, spécialiste en électrophysiologie. Nous avons surtout suggéré des exercices pour simuler les charges qu’ils auront à traîner.»

Sandra Morales, étudiante à la maîtrise en kinanthropologie, a établi un plan de nutrition pour accompagner la préparation physique des membres de l’expédition. «Il faut les engraisser un peu pour qu’ils aient des réserves énergétiques», souligne en riant le professeur Boucher. Spécialiste de la nutrition en haute altitude, l’étudiante a également collaboré avec les deux entreprises qui fourniront l’alimentation des aventuriers –Fruit2 pour les barres énergétiques et Happy Yak pour la nourriture lyophilisée (déshydratée) – afin de déterminer les menus lors du périple.
«Nous avons fait des tests d’évaluation physique avec les participants au printemps 2013 et cet automne, précise Jean P. Boucher. Nous en ferons d’autres avant leur départ en janvier. Andrée-Anne recueillera des données durant l’expédition, puis nous évaluerons de nouveau leur condition physique 10 à 15 jours après leur retour. Idéalement, nous aimerions être en Argentine pour effectuer les derniers tests avant leur départ et dès leur retour, mais il faudra voir si nous obtenons les ressources nécessaires.»
Le Service des partenariats et du soutien à l’innovation négocie présentement un contrat au nom de l’UQAM afin d’officialiser la collaboration entre l’Université, XPAntarctik et d’autres partenaires qui pourraient se joindre à la mission.
Tous les membres de l’expédition se rendront dans les Rocheuses au cours des prochains jours afin de tester leur matériel et de créer des liens avec leurs collègues. Andrée-Anne Parent, emballée à l’idée de se joindre à cette aventure unique, nous accordera une entrevue à son retour, en décembre prochain. À suivre…