En janvier prochain, la doctorante en biologie Andrée-Anne Parent se joindra bel et bien en tant que spécialiste scientifique à l’expédition XPAntarctik, qui partira à la conquête de territoires inexplorés du continent austral. Mais, contrairement à ce qui était prévu, l’étudiante ne foulera pas le sol de l’Antarctique. C’est à partir du navire qui mènera la troupe jusqu’à son point de débarquement et qui la recueillera à la fin de son périple, quelques kilomètres plus loin, qu’elle effectuera sa mission, sous la supervision des professeurs Alain Steve Comtois et Jean P. Boucher, du Département de kinanthroplogie.
Les sept aventuriers – cinq spécialistes du tourisme d’aventure, une cinéaste et la jeune chercheuse – ont participé à une expédition préparatoire dans les Rocheuses à la fin novembre. Andrée-Anne Parent avait déjà fait un peu d’escalade dans sa vie, un peu de cordée, une nuit de camping d’hiver, mais, pour elle, tout le reste était nouveau. «Faire du ski sur la glace avec un sac à dos chargé de matériel et tirer une pulka (traîneau) au milieu de rafales de neige, c’était exigeant, dit-elle en riant. Et camper entre deux crevasses pendant que des avalanches se déclenchaient à répétition de chaque côté, c’était vraiment très impressionnant!»
Les journées, bien remplies de 6 h 30 à minuit, ont permis à l’équipe de tester le matériel prévu pour l’expédition en Antarctique, dont une combinaison équipée de capteurs permettant de mesurer la fréquences cardiaque, la fréquence respiratoire, la température cutanée et la saturation du sang en oxygène. «Beaucoup de travail reste à faire d’ici le départ, car la transmission de données demeure problématique», précise la doctorante.
Spécialiste de mission
De retour de ce périple hors de l’ordinaire, Andrée-Anne Parent a vu son rôle se préciser dans l’expédition qui se mettra en branle à la fin du mois de janvier. «Je partirai avec eux, mais je resterai sur le voilier, explique-t-elle. La décision a été prise d’un commun accord. Il y a encore beaucoup d’aspects à peaufiner en ce qui concerne la recherche et je n’aurais pas eu le temps de m’entraîner suffisamment. Sur le voilier, je pourrai analyser les données en temps réel et je serai prête pour discuter des principaux résultats dès mon retour.»
La recherche, rappelons-le, porte sur l’adaptation du corps humain au froid. «La moitié de mon doctorat porte sur les maladies pulmonaires chroniques et l’autre sur XPAntarctik, précise la doctorante. Je veux vérifier, d’une part, si le froid intense cause une obstruction respiratoire et, d’autre part, étudier la manière dont le corps humain réagit à ces températures et à ces efforts physiques extrêmes.»
Les six membres de l’expédition qui débarqueront sur ce continent hostile, réputé comme étant le plus froid, le plus sec et le plus venteux de la planète, seront soumis à une série de tests avant, pendant et après leur séjour austral. Température corporelle, échantillons de salive (pour analyser les réactions du système immunitaire), tests de capacité pulmonaire et tests de réaction sont au programme de la jeune chercheuse, qui a profité de l’expédition préparatoire dans les Rocheuses pour ajuster le tir. «J’ai pu constater de visu ce que l’expédition impliquait en termes d’efforts physiques, explique-t-elle. J’ai pu modifier certains exercices du programme d’entraînement en fonction de ce que j’ai observé.»
D’ici le départ, les aventuriers poursuivent leur entraînement sous la supervision de la doctorante. «Ils tirent des pulkas au parc Maisonneuve et sur le mont Royal, ils testent leurs skis dans les Laurentides et s’entraînent à faire des nœuds dans leur dos ou avec des mitaines, car c’est une habileté indispensable, note-t-elle. Ils dorment même dehors pour s’accoutumer au froid.»
Le calendrier
La semaine avant leur départ, les membres de XPAntarctik devront se soumettre à une série de trois jours de tests dans un environnement tempéré et au froid. Alexandre Byette, Marina Lançon, Emmanuelle Dumas, François Mailhot, Samuel Ostiguy, Caroline Côté et Andrée-Anne Parent partiront de Montréal entre le 20 et le 23 janvier en direction d’Ushuaïa, en Argentine, d’où ils embarqueront, le 2 février, à bord du voilier Spirit of Sydney, qui traversera le passage Drake en direction de Collins Bay. Ce passage est reconnu pour être le plus tumultueux de la planète. Traverser les 1000 km qui séparent l’Amérique du Sud de l’Antarctique leur prendra environ une semaine. «Nous nous attendons à être malades sur le bateau, alors ce sera sans doute un défi pour moi de récolter les échantillons de salives et d’effectuer les tests requis», dit en riant la doctorante.
Durant l’expédition sur le continent, qui durera entre 20 et 30 jours, les aventuriers prendront leur température corporelle et effectueront le test de réaction à des moments déterminés à l’avance par Andrée-Anne Parent. Leur vêtement intelligent recueillera aussi une série de données.
Rappelons qu’une fois sur le continent, leurs seuls moyens de transport seront leurs skis de haute randonnée et leur équipement d’alpinisme. Chaque membre de l’expédition tirera deux pulkas (traîneaux) qui totaliseront plus de 70 kg de charge – surtout de la nourriture. L’itinéraire qui les mènera vers l’ascension de sommets jusqu’ici inexplorés comporte quelque 300 km, souvent en terrain accidenté.
«Nous effectuerons un programme de réadaptation quand ils reviendront sur le bateau pour qu’ils puissent être en mesure de marcher convenablement après un mois sur la glace», précise la chercheuse. À leur retour à Montréal, les aventuriers devront se soumettre de nouveau à trois jours de tests. «Performeront-ils mieux dans le froid qu’avant leur départ? J’ai hâte de voir ça!», dit la chercheuse.
Durant son séjour sur le voilier, Andrée-Anne fera parvenir à Actualités UQAM des nouvelles de l’expédition. C’est donc une histoire à suivre…
International Space University
À l’été 2013, Andrée-Anne Parent a participé à l’école d’été de l’Université internationale de l’espace (ISU), qui avait lieu à Strasbourg. Ce séjour lui a permis de côtoyer l’élite aérospatiale mondiale dans le cadre de cours intensifs, d’ateliers, de conférences et de projets d’équipe. «Je veux travailler au sein d’une agence spatiale depuis l’enfance, alors ce fut extraordinaire», confie-t-elle.
La doctorante en biologie a eu la chance de suivre des cours de politique, d’économie, d’astrophysique, d’ingénierie et de biomécanique, entre autres. «Mais le plus formidable est d’avoir côtoyé des étudiants et des spécialistes du monde entier, précise-t-elle. J’ai même appris à parler quelques mots de japonais et de norvégien avec mes coéquipiers.»
L’an prochain, elle sera professeure assistante lors de l’école d’été de l’ISU qui aura lieu à Montréal et elle envisage sérieusement la possibilité d’effectuer son postdoctorat au Japon, puisqu’elle a noué des liens avec des membres de l’Agence spatiale japonaise.