Quelque 150 professeurs, rattachés aux différentes facultés de l’UQAM, ont participé au cours des derniers mois à l’élaboration de trois propositions de projets de recherche multidisciplinaires et interfacultaires. Chaque proposition, pilotée par une faculté, porte sur un thème particulier : le vieillissement de la population (Faculté des sciences humaines); les rapports entre art, culture et mieux-être (Faculté des arts); les territoires et les habitats dans le Nord québécois (Faculté des sciences).
Ces propositions répondent à l’appel du scientifique en chef du Québec, Rémi Quirion, qui, en décembre dernier, invitait les universités québécoises à lui soumette des thèmes de futurs grands projets de recherche dits «intersectoriels», chevauchant les domaines financés par les trois Fonds de recherche du Québec : Santé, Société et culture, Nature et technologies. Un comité composé de membres des conseils d’administration des trois fonds, que préside le scientifique en chef, étudiera les propositions et en retiendra quatre ou cinq. Le scientifique en chef, rappelons-le, a pour mandats de conseiller le ministère québécois du Développement économique, de l’Innovation et de l’Exportation en matière de recherche et de science et d’assurer le développement des recherches intersectorielles.
«Sans faire la promotion de projets de recherche précis, les propositions de l’UQAM identifient, dans les différentes facultés, les expertises et les équipes de chercheurs susceptibles d’œuvrer sur les thématiques choisies, explique le vice-recteur à la Recherche et à la création, Yves Mauffette. Ces initiatives, précise-t-il, émanent des professeurs eux-mêmes. Elles ouvrent la porte à de nouvelles collaborations et permettent de développer une vision commune autour de thématiques de recherche larges.»
Construire les savoirs avec le milieu
Dans la proposition pilotée par la Faculté des sciences humaines, le vieillissement n’est pas abordé d’un point de vue médical et gériatrique, mais comme une étape dans le continuum de la vie. Plusieurs chercheurs appartenant à différentes facultés travaillent déjà à générer des connaissances qui pourront appuyer le développement de services et de politiques publiques favorisant la qualité de vie des aînés et leur participation à la société. La proposition soumise par la Faculté des arts s’intéresse à l’impact des arts et de la culture sur la qualité de vie et met l’accent sur la combinaison de la recherche, de la création, de l’action et de l’intervention, de concert avec divers partenaires : musées, théâtres, milieux hospitalier, scolaire et communautaire. La Faculté des sciences, quant à elle, prône le développement d’habitats nordiques sains dans le respect de la qualité de l’environnement, ainsi que des cultures et des traditions des populations vivant sur ces territoires, dont les autochtones.
«Toutes les propositions reposent sur la coconstruction de savoirs par les chercheurs et leurs partenaires dans différents milieux, souligne le vice-recteur. Pour le moment, on ne sait pas encore comment seront financés les projets, mais on souhaite que des fonds de démarrage soient mis en place pour favoriser leur développement.»
Au service du Plan Nord?
La compétition est forte entre les universités pour que leurs expertises soient mises à profit dans le cadre du Plan Nord. Certains chercheurs craignent, toutefois, que les universités se mettent au service du gouvernement et de son plan de développement – dont les tenants et aboutissants sont mal connus –, perdant ainsi leur indépendance et toute distance critique.
«L’UQAM n’a pas attendu le Plan Nord pour s’intéresser aux régions nordiques, note Yves Mauffette. Notre rôle n’est pas de développer des infrastructures, routières ou autres. Nos chercheurs se démarquent plutôt par leur volonté de comprendre les impacts de ce projet de développement, notamment sur l’environnement et sur les populations autochtones. Est-ce que le Plan s’intéressera au développement du milieu nordique dans toutes ses dimensions? Cela reste à voir.»
Le vice-recteur plaide pour la formation d’équipes de recherche composées d’experts de différentes universités qui tenteront d’analyser et de comprendre les enjeux du Plan Nord. «Il faut éviter que les universités se transforment en boîtes de consultants qui seraient en concurrence les unes avec les autres pour rafler la mise.»
Yves Mauffette croit que l’appel de propositions pour le développement de la recherche intersectorielle peut contribuer à décloisonner la recherche à l’UQAM. «L’exercice, dit-il, aura permis d’initier de nouveaux projets de recherche impliquant des professeurs issus de divers horizons disciplinaires, autour de thématiques d’importance pour la société québécoise.»