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Militant à vélo

Par Pierre-Etienne Caza

20 avril 2009 à 0 h 04

Mis à jour le 28 août 2018 à 11 h 08

Série Tête-à-tête
Rencontre avec des diplômés inspirants, des leaders dans leur domaine, des innovateurs, des passionnés qui veulent rendre le monde meilleur.​

Jean-François Pronovost (B.Sc. biologie, 79) a décidé un jour de troquer l’observation de la faune animale contre celle d’une autre espèce : les cyclistes. «Je suis arrivé à Vélo Québec par la bande, mais la biologie m’a réellement servi», dit en riant le père de la Route verte, cet itinéraire cyclable de plus de 4 000 km traversant le Québec de l’Abitibi aux Cantons de l’Est et de l’Outaouais à la Gaspésie. La technique pour créer une piste cyclable est la même que celle utilisée en aménagement faunique, explique le directeur général de Vélo Québec Association, qui a jadis travaillé dans quelques parcs d’interprétation de la nature. «Nous observons d’abord les parcours spontanément empruntés par les cyclistes et proposons ensuite des tracés.»

À la tête de l’Association des cyclistes du Québec depuis 1989, Jean-François Pronovost a roulé sa bosse dans le milieu, notamment en organisant la première conférence mondiale sur le vélo, tenue à Montréal, en 1992. Pour lui et ses collègues de Vélo Québec, la Route verte, inaugurée en 2007, est un rêve devenu réalité.

Soumise au gouvernement dans le cadre de la Commission nationale sur l’avenir du Québec, en 1994, l’idée d’un réseau de pistes cyclables reliant toutes les régions du Québec a séduit les élus de l’époque, qui ont annoncé leur appui au projet l’année suivante. «Ce n’était pas un chèque en blanc, précise Jean-François Pronovost, mais un appui moral et financier de taille, sans lequel la Route verte n’existerait pas aujourd’hui.»

Piloté par Vélo Québec en collaboration avec le ministère des Transports, le projet a fait appel à l’ingéniosité de plusieurs élus et employés des secteurs public et privé dans chacune des régions. «La Route verte, c’est environ 1 000 partenaires et 160 M $ d’investissements, toutes sources confondues», souligne le militant à vélo.

Selon les endroits, la Route verte prend la forme de pistes cyclables ou d’accotements asphaltés. «Elle propose une variété de paysages à couper le souffle, s’enorgueillit Jean-François Pronovost, qui en a parcouru la majeure partie. Elle traverse de magnifiques villages, offre des portions en forêt et d’autres le long du fleuve Saint-Laurent, où la vue est exceptionnelle.»

Il n’est pas le seul à apprécier. Les cyclotouristes, d’ici ou de l’étranger, sont élogieux. La Société National Geographic a même qualifié la Route verte de plus belle route cyclable du monde, devant des véloroutes des États-Unis, de l’Italie, de la France, du Chili et de l’Australie!

«Ce genre de prix est subjectif et englobe l’ensemble de l’expérience touristique», relativise Jean-François Pronovost, sans toutefois bouder son plaisir. « Le Québec est assurément devenu une destination cyclotouristique de renommée mondiale », souligne-t-il fièrement.

À la Maison des cyclistes, qui abrite rue Rachel les locaux de Vélo Québec, Jean-François Pronovost dirige une vingtaine d’employés, dédiés à la Route verte, bien sûr, mais aussi à la promotion du transport actif. Cette équipe est instigatrice du projet «Mon école à pied, à vélo!», lequel souhaite contribuer à renverser la tendance à l’inactivité chez les jeunes Québécois et à réduire l’utilisation de la «navette parentale automobile».

À Montréal, Québec, Gatineau et Sherbrooke, les spécialistes de Vélo Québec travaillent depuis trois ans avec les municipalités, les directions d’écoles, les parents et les enfants afin d’encourager le vélo et la marche pour aller à l’école. «Ce genre de projet gagne en popularité, souligne Jean-François Pronovost. Les élus municipaux reçoivent de plus en plus de plaintes concernant les automobiles, la pollution de l’air, le bruit et la sécurité des piétons. Ils ont le goût de poser des actions pour favoriser le transport actif.» Le projet sera déployé cette année à travers le Québec, de pair avec un programme de formation pour les spécialistes municipaux et la publication d’un guide sur le sujet.

Jean-François Pronovost prêche par l’exemple. De la mi-mars à la mi-décembre, il enfourche son vélo pour se rendre à son bureau, face au parc Lafontaine. Il adore faire des excursions pour le plaisir, notamment avec ses filles âgées de 11 et 13 ans. «Ce n’est pas une religion, mais il serait inconcevable que j’occupe ce poste sans être moi-même un cycliste, dit-il. Et puis, c’est de loin le meilleur moyen de transport en ville. Il suffit d’y goûter pour l’adopter!»