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La créativité au pouvoir

Par Marie-Claude Bourdon

18 juin 2007 à 0 h 06

Mis à jour le 28 août 2018 à 10 h 08

Série Tête-à-tête
Rencontre avec des diplômés inspirants, des leaders dans leur domaine, des innovateurs, des passionnés qui veulent rendre le monde meilleur.​

Sur sa carte d’employé, son numéro est le 000007. «J’ai dit à Guy : Tu vois, je suis ton agent 007», raconte Jacques Renaud en souriant. Le Guy dont il s’agit, c’est Guy Laliberté, président et cofondateur du Cirque du Soleil. Le numéro, Jacques Renaud ne sait pas d’où il sort, car il n’est employé que depuis 2005, même s’il fait partie de l’aventure du Cirque depuis ses débuts. Agent secret? Il a plutôt pour mission «d’être à l’affût des nouvelles tendances artistiques dans le monde» afin, dit son mandat officiel, «de contribuer à la pérennité de l’excellence créative du Cirque du Soleil.»

Jacques Renaud (B.A. travail social, 77) affirme que c’est ce mot de «pérennité» qui l’a convaincu de troquer son statut de consultant pour celui de vice-président lorsque, sur une plage de Bali, il a reçu un courriel de Guy Laliberté lui faisant part de son projet de créer au sein de l’entreprise une division de la «synergie créative». Son défi : s’assurer que l’audace inventive des fondateurs se transmette à la génération qui s’apprête à prendre la relève. «La réalité du Cirque a complètement changé depuis les débuts, mais ses valeurs et son identité n’ont pas changé, dit le vice-président. Maintenir ces valeurs, c’est travailler à la pérennité d’une entreprise culturelle qui a des retombées extraordinaires pour le Québec. Le Cirque du Soleil, c’est notre Walt Disney québécois.»

C’est en tant que directeur général de la programmation pour les Célébrations du 450e anniversaire de la découverte de la Nouvelle-France, en 1984, que Jacques Renaud a aidé les premiers artisans du Cirque du Soleil à mettre sur pied leur projet d’un «Cirque québécois original et sans animaux», rapidement devenu l’événement marquant des célébrations. Consultant dans des domaines variés, incluant la culture, les affaires sociales et la politique (il a été attaché politique de René Lévesque en 1980-82 et directeur de la campagne à la chefferie du Parti Québécois de Pauline Marois, en 1985), l’organisateur n’a jamais perdu le Cirque de vue. Associé à la planification stratégique qui a transformé la petite coopérative des débuts en multinationale du divertissement, il a aussi travaillé sur le terrain, devenant, dans les années 90, directeur du développement de la première tournée Asie-Pacifique.

Comment faire pour qu’une entreprise de l’envergure du Cirque du Soleil, qui compte 3 500 employés et présente plus de dix spectacles différents dans le monde, ne perde pas le feu sacré? «Au jour le jour, la synergie créative consiste à briser les silos et à assurer un équilibre entre les dimensions créative et économique de l’entreprise», confie-t-il à ses étudiants de la maîtrise en gestion de projets de l’UQAM, où il est chargé de cours. Concrètement, il a dû demander qu’on retire les rideaux et les toiles noires qu’on avait commencé à installer un peu partout pour protéger le secret des spectacles en préparation. «On était en train de tout barricader dans un bâtiment qui avait justement été conçu par l’architecte Dan Hanganu pour multiplier les accès visuels, explique-t-il. On a discuté avec le service juridique, les toiles ont été enlevées et maintenant tous les employés ont le droit de circuler dans les studios de création.»

Créateur de la spécialisation en «gestion de projets événementiels» à l’UQAM, formateur depuis plus de 25 ans, professeur invité au Singapore Institute of Management et auteur d’un ouvrage intitulé Le management d’événements (Transcontinental), Jacques Renaud vient de mettre sur pied, avec des collaborateurs, l’Institut de management événementiel. «Je fais partie d’une génération qui a développé une expertise en création d’événements. Il faut maintenant la transmettre aux plus jeunes afin qu’ils aillent plus loin», dit l’homme de la pérennité créative.