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Quarante-cinq ans de partenariats avec les communautés

Depuis 1979, le Service aux collectivités a permis de conjuguer savoir universitaire et savoir citoyen.

Par Claude Gauvreau

20 novembre 2024 à 16 h 05

Mis à jour le 26 novembre 2024 à 12 h 03

Le Service aux collectivités (SAC) a célébré son 45e anniversaire lors d’un événement festif tenu au Cœur des sciences, le 19 novembre, sous le thème «45 ans de collaborations et de savoirs pluriels pour la justice sociale». L’événement, qui a rassemblé 150 personnes, s’est déroulé en présence du vice-recteur à la Recherche, à la création et à la diffusion, Christian Agbobli, de membres du corps professoral, d’étudiantes et étudiants, de personnes représentant les trois centrales syndicales du Québec et de membres d’organismes partenaires.

Le SAC a été créé dans la foulée de l’adoption par l’UQAM, en 1979, d’une politique institutionnelle de services aux collectivités visant à démocratiser le savoir universitaire auprès de communautés qui n’y avaient pas traditionnellement accès: organismes communautaires, groupes de femmes, syndicats et autres acteurs non gouvernementaux, sociaux, économiques et culturels. À cette époque, l’UQAM était la première université au Québec à se doter d’une telle politique.

«La création du SAC a permis de mettre en œuvre cette politique, souligne sa directrice, Geneviève Lamy (M.A. administration des affaires, 2021). Pour l’UQAM, il s’agissait de se donner les moyens de ses ambitions. Comment? En mettant en place une équipe de personnes professionnelles capables de répondre aux besoins d’organisations de la société civile, qui souhaitaient collaborer avec des membres du corps professoral afin de relever des défis dans une perspective de changement social.»

«Les projets de partenariat ne s’élaborent pas à partir d’une équipe de chercheurs et chercheuses qui décident d’investiguer dans une communauté donnée, mais à partir des demandes et des besoins des collectivités.»

Geneviève Lamy,

Directrice du Service aux collectivités

Depuis ses débuts, le SAC joue un rôle d’interface en favorisant l’arrimage des expertises professorales et du savoir expérienciel des groupes sociaux. «C’est ce qui constitue l’originalité du Service, ce qui en fait toujours un modèle unique dans le monde universitaire au Québec, observe sa directrice. Les projets de collaboration ne s’élaborent pas à partir d’une équipe de chercheurs et chercheuses qui décident d’investiguer dans une communauté donnée, mais à partir des demandes et des besoins des collectivités.»

La directrice du SAC, Geneviève Lamy. Photo: Jean-François Hamelin

L’équipe du SAC est composée d’une secrétaire de direction et de quatre agentes de développement qui travaillent à temps complet, auxquelles s’ajoutent quatre agentes contractuelles. «Nos agentes analysent les besoins des groupes sociaux et établissent le maillage avec les chercheuses et chercheurs, précise Geneviève Lamy. Elles accompagnent les projets dans un souci d’équité et de partage des valeurs, contribuant à créer une relation de confiance entre les partenaires.»

Des projets par milliers

Au fil des ans, par l’entremise du SAC, l’UQAM a pu construire des ponts avec une multitude d’organismes à travers non pas des centaines, mais des milliers de projets communs en matière de recherche et de formation, en vue de produire de nouvelles connaissances porteuses d’innovations sociales. «Chaque année, on compte une centaine de projets s’étalant sur un, deux ou trois ans et portant sur des thématiques extrêmement diversifiées, note la directrice. Nous accompagnons ces projets tout au long de leur développement et aidons à trouver du financement auprès des organismes subventionnaires.»

«Chaque année, on compte une centaine de projets s’étalant sur un, deux ou trois ans et portant sur des thématiques extrêmement diversifiées.»

Le SAC a été impliqué, notamment, dans la mise en place de deux protocoles d’entente. Le protocole UQAM/CSN/CSQ/FTQ, qui vient d’être renouvelé, a permis d’élaborer des projets de collaboration portant sur des thématiques liées au monde du travail. Le second protocole, mis en place en 1982 et renouvelé en 2022, a été établi avec Relais-femmes, un organisme chapeautant plus d’une centaine de groupes de femmes.

«Ces protocoles permettent de constituer des espaces où des chercheuses et chercheurs de l’UQAM ainsi que des membres des groupes partenaires se donnent le temps de réfléchir à des enjeux qui concernent le mouvement syndical et le mouvement des femmes», explique Geneviève Lamy.

Ces dernières années, le SAC a créé un volet étudiant dont l’objectif est de répondre aux besoins des groupes partenaires, communautaires en particulier, qui connaissent des problèmes de roulement de personnel. «Nous offrons la possibilité à des étudiantes et étudiants, que nous accompagnons, de fournir des heures de travail au sein de ces organismes. Jusqu’à maintenant, environ 80 % des mandats qui leur ont été confiés ont généré des demandes d’embauche de la part des organismes. C’est une façon de favoriser l’engagement citoyen dans la communauté étudiante, tout en soutenant le mouvement communautaire.»

Des changements au quotidien

Nombreux sont les projets coordonnés par le SAC dont les retombées ont généré des transformations politiques, juridiques sociales, économiques et culturelles ayant contribué à faire du Québec une société plus juste et égalitaire. «Le SAC soutient aussi plusieurs projets à plus petite échelle, qui ne contribuent pas moins à changer la vie au quotidien, sur le terrain», souligne Geneviève Lamy.

Parmi les projets réalisés récemment, le Centre pour les victimes d’agression sexuelle de Montréal (CVASM) a collaboré avec une équipe de recherche de l’UQAM dans l’implantation de son nouveau service de clavardage, disponible sur l’ensemble du territoire du Québec. L’équipe uqamienne était composée des professeurs du Département de communication sociale et publique Olivier Turbide et Caterine Bourassa-Dansereau, de la doctorante et co-chercheuse Elise Huot et de l’auxiliaire de recherche Océane Corbin.

Un autre projet de recherche-formation a été mené par le Mouvement d’éducation populaire et d’action communautaire du Québec (MÉPACQ) en partenariat avec la professeure du Département d’éducation et formation spécialisées Audrey Dahl. Le projet a permis de produire un recueil de pratiques en éducation populaire autonome.

Au cours de la dernière année seulement, le SAC a collaboré avec 95 organismes de la société civile, dont le Conseil québécois du loisir, Femmes autochtones du Québec, le Front Commun pour la transition énergétique, le Groupe de recherche et de formation sur la pauvreté au Québec, le Regroupement des comités logement et associations de locataires du Québec, le Réseau communautaire en santé mentale et le Réseau d’aide aux personnes seules et itinérantes de Montréal.

L’événement célébrant les 45 ans du SAC a mis en lumière, au moyen de 10 portraits individuels et de groupe, les parcours professionnels et personnels de personnes qui, au fil des ans, ont joué un rôle important dans les démarches partenariales du Service. Photo: Jean-François Hamelin
Reconnaissance et financement

La recherche partenariale avec les collectivités a souvent été confrontée à un manque de reconnaissance, ce qui s’est traduit par un financement parfois inadéquat des projets. «Les organismes subventionnaires ont fait des efforts pour être davantage à l’écoute et ont bonifié certains programmes afin de valoriser l’idée de recherche en partenariat», observe Geneviève Lamy. Cela dit, parce qu’elle est confrontée à la hiérarchie des savoirs, parce qu’elle ne produit pas toujours des résultats à court terme et parce qu’elle porte souvent sur des enjeux émergents, dont l’importance pour la société n’est pas reconnue immédiatement, il reste plus difficile de trouver des sources de financement pour la recherche partenariale avec les collectivités.

Le SAC, quant à lui, fait face aussi à des défis, dit sa directrice. «Certains groupes sociaux, comme les organismes communautaires, doivent composer avec moins de ressources et de financement. Cela nous affecte indirectement, car ces problèmes limitent leur engagement dans des projets de collaboration.»

Directrice du SAC depuis janvier 2024, Geneviève Lamy a accompagné durant sa carrière diverses équipes de chercheurs, de cliniciens, de professionnels et de gestionnaires dans le réseau de la santé et des services sociaux. Ces dernières années, elle a occupé la fonction d’adjointe à la direction des affaires académiques et de l’éthique de la recherche au Centre intégré universitaire de santé et services sociaux du Centre-Ouest-de-l’Île-de-Montréal, avant d’en être promue directrice.

«Quand j’ai vu l’affichage du poste à la direction du SAC, j’ai aussitôt soumis ma candidature. Répondre aux besoins des groupes sociaux, rendre accessibles les connaissances et construire des savoirs avec la communauté, tout cela correspondait à mes valeurs.»

Hommage à des partenaires

L’événement célébrant les 45 ans du SAC a mis en lumière, au moyen de 10 portraits individuels et de groupe, les parcours professionnels et personnels de personnes qui, au fil des ans, ont joué un rôle important dans les démarches partenariales du Service en participant à des projets ayant eu des impacts notables.

Ces personnes sont Maude Chartier-Desjardins, doctorante en éducation et responsable de la recherche à l’Association québécoise pour l’équité et l’inclusion au post-secondaire; Lise Chovino, co-coordonnatrice de Co-savoir et membre du Comité des services aux collectivités de l’UQAM; Rachel Cox, professeure (sciences juridiques) et membre du Comité conjoint du Protocole UQAM/CSN/CSQ/FTQ; Sophie Gilbert, professeure (psychologie) et membre du Comité conjoint du Protocole UQAM/Relais-femmes; Anne Joncas, d’Action conservation du bassin versant du Lac Bromont; Dolors Planas, professeure émérite (sciences biologiques); Claire Vanier, ancienne agente de développement au SAC; Serge Paquet, technicien de laboratoire; Céline Métivier, du Réseau québécois de l’action communautaire autonome; Viviane Michel, directrice des relations Premières Nations et Inuit au Centre d’innovation des Premiers Peuples; Karen Messing, professeure émérite (sciences biologiques); Josée-Anne Riverin, agente de développement au SAC; Fernanda Sigüenza-Vidal, étudiante au 3e cycle et coordonnatrice de projets au Comité pour les droits humains en Amérique latine.

Les portraits ont été réalisés par Malvina Barra, étudiante au baccalauréat en sociologie et artiste multidisciplinaire originaire du Gabon.