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Le vélo d’hiver de plus en plus populaire

Source de plaisir, le vélo d’hiver a aussi des impacts bénéfiques sur la santé et l’environnement.

Par Claude Gauvreau

24 janvier 2022 à 16 h 01

Mis à jour le 9 juin 2022 à 13 h 09

Série En vert et pour tous
Projets de recherche, initiatives, débats: tous les articles qui portent sur l’environnement.

La diplômée Célia Kingsbury, cosignataire de l’article dans Le Climatoscope, en pleine action dans une rue de Montréal.Photo: Nathalie St-Pierre

Le vélo comme mode de déplacement n’est plus réservé à la période estivale. En hiver, de plus en plus de citadins enfourchent leur bicyclette. Au Québec, par exemple, 190 000 adultes ont continué de pédaler entre décembre 2019 et mars 2020, soit 10 000 de plus que cinq ans auparavant, souligne une étude de Vélo Québec. À Montréal, le taux de rétention des cyclistes durant la saison froide a également grimpé, passant de 8,4 % à 13,6 % entre 2016 et 2020.

«Le maintien de pistes cyclables déneigées et déglacées, la mise en place progressive du Réseau express vélo, accessible toute l’année, et la pandémie sont des facteurs ayant contribué à faire augmenter  la proportion de cyclistes en hiver», note Joanie Gervais, étudiante à la maîtrise en sciences de l’activité physique, dont le mémoire porte sur la pratique du vélo d’hiver.

Même si la majeure partie des trajets de vélo en ville se déroulent sur courte distance – environ cinq kilomètres –, surtout l’hiver, des études montrent qu’utiliser ce mode de transport,  plutôt que la voiture, offre divers avantages. «En plus de constituer un exercice bénéfique pour la santé physique, la pratique du vélo, quelle que soit la saison, favorise la réduction des émissions de gaz à effet de serre (GES) et de la pollution atmosphérique», dit Joanie Gervais

L’étudiante est la première autrice de l’article «Faire d’une pierre trois coups avec le vélo d’hiver: plaisir, santé et lutte contre les changements climatiques», paru dernièrement dans Le Climatoscope, une revue de vulgarisation scientifique francophone. L’article a été cosigné par Josyane Lapointe, également étudiante à la maîtrise en sciences de l’activité physique, la doctorante en santé publique Célia Kingsbury (M.A.sciences de l’activité physique, 2021) et le professeur du Département des sciences de l’activité physique Paquito Bernard.

«Le maintien de pistes cyclables déneigées et déglacées, la mise en place progressive du Réseau express vélo, accessible toute l’année, et la pandémie sont des facteurs ayant contribué à faire augmenter  la proportion de cyclistes en hiver.»

Joanie Gervais,

Étudiante à la maïtrise en sciences de l’activité physique

Une culture de l’automobile

Bien que les adeptes du vélo soient plus nombreux, la culture de l’automobile demeure bien ancrée, rappellent les signataires de l’article. Entre 1990 et 2017, la croissance annuelle du nombre de nouvelles voitures au Québec a été 2,5 fois supérieure à celle de la population ainsi qu’au nombre de permis de conduire émis pour les plus de 16 ans, selon des données de 2020 de la Société de l’assurance automobile du Québec et de l’Institut de la statistique du Québec. Ce sont les camions légers – véhicules utilitaires, camionnettes et fourgonnettes – qui affichent la plus forte augmentation avec une croissance de 128 % entre 2000 et 2017.

On le sait, l’utilisation de véhicules à moteur a des impacts majeurs sur l’environnement et la santé: émissions de GES et exposition à des particules fines dans l’atmosphère. «Une utilisation prolongée de la voiture est aussi associée au risque de développer des maladies cardiovasculaires, observe Joanie Gervais. En outre, l’étalement urbain, qui accroît la dépendance à l’automobile, accélère l’accaparement de terres agricoles, l’imperméabilisation des sols, la pollution de cours d’eau et la destruction d’habitats naturels.»

L’impact environnemental de l’automobile est encore plus grand en période hivernale. «Dans les centres urbains, les températures froides et les dérapages causés par la neige et la glace entraînent une consommation d’essence plus élevée», remarque l’étudiante.

De plus en plus de villes au Canada et ailleurs font la promotion du transport actif, lequel est reconnu comme une piste de solution dans la lutte contre les changements climatiques. «Ce mode de transport, dit Joanie Gervais, renvoie aux différentes façons de se déplacer en utilisant l’énergie humaine, qu’il s’agisse du vélo, de la marche, de la planche à roulette ou de la trottinette.»

«La volonté de se maintenir en forme en faisant de l’exercice physique, la sensibilité à l’égard de l’environnement et la présence d’infrastructures adéquates – des pistes cyclables en nombre suffisant et bien entretenues – constituent autant d’incitatifs à pratiquer le vélo durant l’hiver.»

Qui sont les adeptes du vélo d’hiver?

Les signataires de l’article dans Le Climatoscope dressent un profil global des adeptes du vélo d’hiver en s’appuyant sur des études effectuées au Canada, en Norvège et en Suède. On y constate que les usagers ont, en moyenne, entre 20 et 40 ans et que les hommes sont généralement plus enclins que les femmes à recourir à ce mode de transport.

«Il faut posséder certaines habiletés et avoir une bonne confiance en soi pour pratiquer le vélo d’hiver, soutient l’étudiante. Le sentiment de sécurité joue aussi un rôle important. Des personnes peuvent craindre de faire des chutes à cause de la présence de la neige ou de la glace, alors que d’autres se méfient de la proximité des voitures.»

Les températures froides, toutefois, ne semblent pas constituer un frein important. «La volonté de se maintenir en forme en faisant de l’exercice physique, la sensibilité à l’égard de l’environnement et la présence d’infrastructures adéquates – des pistes cyclables en nombre suffisant et bien entretenues – constituent autant d’incitatifs à pratiquer le vélo durant l’hiver», souligne Joanie Gervais.

Campagnes de sensibilisation

À l’hiver 2020, environ 80 % du réseau de voies cyclables a été déneigé à Montréal. Ce sont les arrondissements de la métropole qui en ont la responsabilité. L’étudiante croit qu’il faut poursuivre la promotion du vélo d’hiver.

«On doit intensifier les campagnes de sensibilisation, en s’inspirant de celles menées par Vélo Québec, afin de souligner les effets bénéfiques du vélo et de modifier les comportements, notamment auprès des jeunes, des femmes et des personnes âgées. Enfin, il faut augmenter l’offre de pistes cyclables durant la saison hivernale. On peut aussi songer à des mesures fiscales pour l’achat de pneus d’hiver et à l’aménagement d’abris à vélo et de vestiaires ainsi que de douches sur les lieux de travail.»  

Avec le développement du Réseau express vélo (REV), démarré en 2020, il y a lieu de croire que le nombre de cyclistes continuera d’augmenter l’hiver, estime l’étudiante. Projet de voie cyclable de 184 km réparti sur l’ensemble du territoire de l’île de Montréal, le REV doit compter 17 axes accessibles 12 mois par année. Unidirectionnelles et d’une largeur de 2,3 à 3 mètres, ses pistes se connecteront aux voies cyclables existantes.

Le réseau présente de nombreux avantages pour les cyclistes, mais aussi pour l’ensemble des Montréalais et Montréalaises. En plus de la diminution des émissions de GES, il peut contribuer à l’apaisement de la circulation automobile, à la réduction des nuisances sonores et visuelles, à la sécurisation des déplacements à vélo, à l’amélioration de l’accès au centre-ville et à la dynamisation des artères commerciales et de la vie de quartier.

La Ville de Montréal prévoit que, d’ici 10 ans, le vélo devrait représenter 15% des déplacements dans la métropole.