Sylvie Paré et son équipe ont terminé ce printemps un mandat pour la municipalité de Bois-des-Filion, qui souhaite aménager une aire TOD (transit oriented development) sur son territoire. «C’est la première fois qu’une université obtient un tel contrat avec une municipalité et la Communauté métropolitaine de Montréal (CMM), qui soutient financièrement ce type de projet», souligne la professeure du Département d’études urbaines et touristiques de l’ESG UQAM.
Une aire TOD consiste en un quartier développé autour de services de proximité en ayant le souci d’améliorer la mobilité de ses citoyens, rappelle Sylvie Paré. «Les transports actifs comme le vélo et la marche, la densification du cadre bâti, le verdissement des espaces publics et l’accessibilité aux commerces de première nécessité à pied sont incontournables dans un tel projet.»
L’équipe de Sylvie Paré était constituée des étudiantes et étudiant au baccalauréat en urbanisme, Chloé Saint-Antoine Riel, Madeleine Warmbold et Cédric Cloarec, du professeur Juste Rajaonson et du chargé de cours Calvin Veltman. «Notre collaboration a été ponctuée de présentations sur ZOOM et de plusieurs rencontres d’équipe, souvent avec Julie Chabanel, responsable du service de l’aménagement du territoire de Bois-des-Filion», précise la professeure. Le Service des partenariats et du soutien à l’innovation de l’UQAM (SePSI) a été impliqué en amont du projet.
Un bon diagnostic
La première étape consistait à analyser le territoire et sa composition. Bois-des-Filion est un territoire divisé en quadrants. Les quatre zones sont délimitées par deux axes routiers majeurs: la route 335 (le prolongement de l’autoroute 19 est déjà prévu sur ce tracé) et l’autoroute 640. «Ce sont quatre secteurs qui ne sont pas connectés entre eux, note Sylvie Paré. Il faut donc un projet améliorant la connectivité tout en apaisant la circulation automobile.»
Malgré son slogan Vert l’avenir, Bois-des-Filion ne possède pas beaucoup d’espaces verts, ont constaté les membres de l’équipe. «Des efforts de verdissement s’imposent pour réduire les îlots de chaleur et pour rendre la vie de quartier agréable», précise la professeure.
«Les transports actifs comme le vélo et la marche, la densification du cadre bâti, le verdissement des espaces publics et l’accessibilité aux commerces de première nécessité à pied sont incontournables dans un tel projet.»
Sylvie Paré
Professeure au Département d’études urbaines et touristiques
Au diagnostic géographique s’ajoutait également un diagnostic populationnel et économique. «Pour déterminer le type d’habitations à construire, il faut s’appuyer sur des prévisions démographiques, explique Sylvie Paré. Nous avons constaté qu’actuellement, on retrouve surtout des petits logements pour les personnes âgées. Il y a peu de logements abordables pour les familles. Cela explique sans doute pourquoi plusieurs ménages quittent la municipalité pour s’installer dans d’autres villes de la couronne nord.»
Comme plusieurs analystes, l’équipe de Sylvie Paré estime que l’expérience de télétravail vécue au cours de la dernière année laissera des traces durables. «Les gens voudront travailler de la maison au moins quelques journées par semaine, et nous devons en tenir compte dans l’offre de logement, avec une pièce bureau», dit-elle.
Cinq secteurs d’intervention
L’équipe a soumis trois scénarios à la municipalité de Bois-des-Filion et à la CMM, lesquelles en ont retenu un, qui a fait l’objet d’une présentation officielle en mars dernier. Intitulé «La percée verte», le scénario sélectionné compte cinq secteurs d’intervention.
Le premier consiste en l’aménagement d’un tout nouveau quartier résidentiel (au nord du boulevard Adolphe-Chapleau et à l’ouest de la route 335) avec des bâtiments de 4 à 6 étages, des sentiers piétons et cyclables, des parcs, un jardin communautaire, des équipements collectifs et sportifs, de même qu’une place publique. «Les stationnements de tous les immeubles résidentiels seront souterrains», précise la professeure.
Le second secteur est le réaménagement du boulevard Adolphe-Chapleau, le long duquel on construira des unités immobilières de 3 à 4 étages. La circulation automobile sur cette artère névralgique sera apaisée avec la réalisation de plusieurs ronds-points. Un réseau actif pour les cyclistes et les piétons sera déployé tout au long du boulevard, dont les abords seront verdis.
Le troisième secteur d’intervention est un pôle commercial (au sud de la montée Gagnon) qui comptera entre autres une épicerie, une pharmacie, une SAQ et une caisse Desjardins, auxquels pourront s’ajouter d’autres commerces de proximité. Tous les stationnements seront relégués à l’arrière des bâtiments commerciaux afin d’en dégager la façade, qui sera ainsi plus accueillante pour les piétons. Une aire d’embarquement pour le bus rapide menant au métro de Laval y sera aménagée. «Il y a moins de 15 % des travailleurs de Bois-des-Filion qui se dirigent vers le centre-ville de Montréal chaque matin», note Sylvie Paré. Voilà pourquoi, contrairement à d’autres projets TOD avec une desserte de train de banlieue, celui-ci ne se déploie pas autour d’un pôle de transport en commun. On mise plutôt sur l’aménagement de voies cyclables et piétonnières pour permettre aux citoyens de rejoindre les commerces et services de proximité.
La montée Gagnon, qui constitue le quatrième secteur, accueillera à cet effet des complexes résidentiels de 4 étages ainsi qu’un parcours piéton et cyclable sécuritaire.
Le dernier secteur d’intervention accueillera un corridor écologique liant la partie est et ouest de Bois-des-Filion par une passerelle verte au-dessus de la future autoroute 19. «Ce corridor tout en verdure mène à l’école secondaire et au terrain de soccer, qui aura été déplacé à cet endroit», explique Sylvie Paré.
Des réactions positives
La présentation du scénario d’aménagement a eu lieu devant le directeur général de Bois-des-Filion, Sylvain Rolland, son conseiller et adjoint, Jean Goulet, ainsi que Julie Chabanel et Laurence Clair, conseillère en recherche à la CMM. «Les réactions, tant du côté de la municipalité que de la CMM, ont été positives, se réjouit Sylvie Paré. La balle est maintenant dans leur camp.»