
Photo: Phoenix Watson
Toute production audiovisuelle nécessite une phase de montage. C’est le montage qui donne un sens aux sons et aux images. Il n’est d’ailleurs pas surprenant qu’on parle du montage comme de la «troisième écriture d’un film». Bien que cette étape soit cruciale, elle est souvent délaissée par les étudiants, qui préfèrent la scénarisation ou la réalisation. Ironiquement, c’est grâce aux étudiants que la monteuse Sophie Leblond, professeure à l’École des médias, a découvert sa passion.
«Je suivais un cours sur l’esthétique du film à l’Université du Québec à Chicoutimi, alors que j’étais encore au CÉGEP. Dans le cadre d’un projet d’équipe, aucun étudiant ne voulait s’occuper du montage. Je l’ai donc fait. Dès le premier instant où j’ai assemblé deux images, j’ai constaté la multitude de sens que je pouvais donner à une séquence», confie la professeure.
Originaire du Saguenay, Sophie Leblond effectue le montage de films, de documentaires et de publicités depuis plus de 20 ans. Elle vient de recevoir le prix Écran, dans la catégorie Meilleur montage dans un long métrage documentaire, pour l’œuvre Alexandre le fou de Pedro Pires. Cette récompense, décernée par l’Académie canadienne du cinéma et de la télévision, s’ajoute à une dizaine de prix et nominations récoltés par la monteuse depuis 1999. Elle est actuellement en nomination aux prix Iris, également pour Alexandre le fou, ainsi qu’à l’association des Monteurs du cinéma canadien, pour le meilleur montage d’un long métrage de fiction, pour Kuessipan de Myriam Verreault. En mars dernier, elle a reçu de cette association le prix du meilleur montage de fiction pour le long métrage Black Conflux de Nicole Dorsey. En 2013, elle a été en nomination au prix Écran pour Inch’Allah d’Anaïs Barbeau-Lavalette.

Photo: Stéphane Lafleur
Professeure à l’École des médias depuis six mois, Sophie Leblond est une étudiante dans l’âme. Après avoir complété son baccalauréat en production cinématographique à l’Université Concordia, en 1992, elle a étudié d’autres disciplines, telles que la psychologie, la philosophie, l’histoire de l’art et l’anthropologie, pour assouvir sa curiosité. «Le métier de monteur est obsessif. On travaille dans le détail. Le fait d’aller suivre des cours à l’université me permet d’adopter d’autres points de vue et de prendre du recul. J’ai besoin de voir large quand je sors d’un projet de montage», explique celle qui poursuit une maîtrise en recherche-création en cinéma à l’Université de Montréal.
Le passage à l’enseignement a été naturel pour Sophie Leblond. C’est en offrant plusieurs heures de consultation à des artisans de l’industrie cinématographique au cours des 10 dernières années que la monteuse a assumé sa position de mentore. «J’aime la rencontre d’une autre génération. C’est une façon pour moi de rester allumée et à l’affût des nouveaux courants esthétiques dans mon domaine. Faire du montage est un métier très solitaire, alors l’idée de sortir de ce cocon pour aller à la rencontre d’un groupe d’étudiants me plait beaucoup», confie Sophie Leblond.
La monteuse se rappelle ses premières années d’université et encourage ses étudiants à avoir de l’initiative dans un métier où leur embauche est déterminée par la singularité de leurs créations. «En tant que pigiste, on sait que les premières années sont plus dures financièrement. Alors plutôt que d’attendre du travail, on peut s’en créer», explique-t-elle. C’est après la réalisation d’un premier long métrage avec des amis que Sophie Leblond a débuté sa carrière et qu’elle a été recrutée par Denis Villeneuve. Dans la jeune vingtaine, elle a ainsi remporté son premier prix Jutra en montage pour le film Un 32 août sur terre.
Elle a depuis monté plus de 50 films auprès des plus grands réalisateurs québécois, dont André Turpin, Philippe Falardeau, Louise Archambault, Stéphane Lafleur, André-Line Beauparlant, Robert Morin et Denis Côté. Elle œuvre essentiellement dans le cinéma d’auteur.
Portant également le chapeau de réalisatrice à temps partiel, Sophie Leblond travaille actuellement sur Lhasa, un portrait documentaire de la chanteuse américano-mexicaine Lhasa de Sela, qui avait adopté le Québec, où elle décédée d’un cancer à l’âge de 37 ans, en 2010.