Série COVID-19: tous les articles
Les nouvelles sur la situation à l’Université entourant la COVID-19 et les analyses des experts sur la crise sont réunies dans cette série.
Depuis le début de la crise sanitaire, les systèmes de santé de tous les pays ont été mis à rude épreuve. Pourquoi certains systèmes ont-ils connu plus de succès que d’autres face à la pandémie? Quel rôle ont joué les instances de santé publique? Comment évaluer l’action de l’Organisation mondiale de la santé (OMS)? Pourquoi les personnes les plus défavorisées sont-elles davantage touchées par la maladie? Le cours de premier cycle «Politique de la santé», offert par la Faculté de science politique et de droit à compter de l’automne 2020, étudiera les enjeux politiques de santé au Canada, au Québec et ailleurs dans le monde à l’heure de la COVID-19.
«Ce nouveau cours ne prétend pas apporter des réponses à toutes les questions concernant les impacts de la pandémie sur l’organisation des systèmes de santé et la façon dont ces derniers ont réagi, mais il permettra d’explorer diverses hypothèses dans le but de mieux comprendre les politiques de santé existantes dans différents pays», explique sa responsable, la professeure du Département de science politique Carole Clavier.
Faisant partie des cours de politique et d’administration publiques, le cours POL 5862 existe depuis trois ans. «Il devait être donné en 2022, mais nous avons décidé de l’offrir dès septembre prochain et de remodeler entièrement son contenu afin qu’il soit adapté à la conjoncture de la crise sanitaire», précise la professeure. Destiné aux étudiants inscrits dans les différents programmes de la Faculté, il sera aussi offert à ceux en sciences humaines et sociales susceptibles d’être intéressés par sa thématique.
Carole Clavier envisage un enseignement de type hybride. «Certaines séances se tiendront à distance, alors que d’autres pourraient se dérouler en mode présentiel. Cela dépendra des consignes de l’UQAM et aussi du nombre d’étudiants inscrits.»
Des approches différentes
Dans la lutte contre la pandémie, la professeure estime qu’il est difficile d’évaluer les succès remportés par certains pays par rapport à d’autres, comme l’illustre le débat sur les chiffres fournis quotidiennement sur le nombre de personnes contaminées, le nombre de décès et le nombre d’individus rétablis. «Tous les États n’ont pas la même approche, rappelle-t-elle. On sait que le nombre de tests de dépistage varie selon les pays. Là où les tests sont moins nombreux, les chiffres sont plus bas, ce qui peut être trompeur.»
La réaction à la pandémie prend aussi des formes différentes selon que les systèmes de santé sont centralisés ou décentralisés, comme c’est le cas dans les pays scandinaves où les régions, et parfois les municipalités, sont responsables de l’organisation de l’offre de soins, poursuit Carole Clavier.
«Par ailleurs, l’impact de la pandémie sur la santé des citoyens varie d’un pays à l’autre en fonction de l’existence ou non d’un régime d’assurance-maladie public et universel favorisant l’accessibilité aux soins, indépendamment de la capacité de payer de chacun, observe la professeure. Aux États-Unis, beaucoup de citoyens ne peuvent pas se faire soigner ou ne cherchent pas à subir un test de dépistage, risquant ainsi de contaminer d’autres personnes.»
Dans son cours, Carole Clavier examinera les réformes subies par les systèmes de santé au Québec et au Canada depuis le début des années 1990 ainsi que leurs impacts sur la manière dont ces systèmes ont réagi à la crise sanitaire, notamment en ce qui concerne le recrutement de personnel ou les soins aux personnes âgées. «Des politiques d’austérité ont été adoptées ces dernières années, notamment sous le gouvernement conservateur de Stephen Harper à Ottawa et le gouvernement libéral de Philippe Couillard à Québec, qui ont mis à mal les budgets de la santé publique.»
Équilibre fragile
Plusieurs pays cherchent actuellement à établir un équilibre particulièrement difficile entre le maintien de la protection de la santé publique, la relance progressive de l’économie et le respect des droits individuels. «Cela renvoie à des conflits de valeur, lesquels risquent de se trouver au cœur des décisions politiques qui devront être prises au cours des prochaines semaines ou des prochains mois dans la perspective du déconfinement social, indique la professeure. Quand on étudie les politiques publiques de santé, on s’aperçoit que ces conflits, présentement exacerbés par le contexte de crise, se retrouvent constamment au centre des enjeux décisionnels.»
Politique et science
Carole Clavier entend susciter la réflexion des étudiants relativement à l’influence exercée par la science sur la façon dont s’échafaudent les politiques de santé. «Aujourd’hui plus que jamais, les décideurs dans ce domaine doivent s’appuyer sur des avis scientifiques, observe la professeure. Mais la difficulté est que les connaissances sur la COVID-19 et les moyens de la combattre se développent en même temps que se propage le virus. Ce que nous savons aujourd’hui ne sera peut-être plus valable dans une semaine ou dans un mois parce que, dans l’intervalle, des travaux de recherche auront apporté un nouvel éclairage.»
Les villes aux premières loges
Le rôle des villes en matière de santé est un autre sujet qui sera traité dans le cours. «Au Canada, elles n’ont pas autant de pouvoirs que les autres paliers de gouvernement, mais elles disposent de leviers d’action importants, notamment en matière de logement social, de transport collectif, de contamination de l’eau potable ou encore d’environnement – accès aux parcs et autres espaces verts –, des domaines ayant tous des impacts sur la santé publique.»
Il sera donc question du rôle que les villes ont joué face à la COVID-19. «Aux États-Unis, des villes comme celle de New York ont pris des initiatives en matière de quarantaine qui se sont avérés salutaires, remarque Carole Clavier. Au début de la crise, la Ville de Montréal a donné de l’information sur les mesures de confinement aux voyageurs qui arrivaient à l’aéroport Trudeau. Et au cours des prochaines semaines, elle devra composer avec le déconfinement graduel et adopter des mesures de protection dans l’espace public.»