On les reconnaît à leur audace, à leur esprit d’innovation, à leur sens de l’engagement. Ils ont «l’esprit UQAM». À l’occasion du 50e, des diplômés qui ont fait leur marque dans toutes les sphères de la société évoquent leur parcours uqamien. Cette série a été créée pour le site web UQAM: 50 ans d’audace.
Comme Obélix, il est tombé dedans quand il était petit. Sa potion à lui, c’est la politique. «Mon père, un fervent nationaliste, était professeur d’histoire du Québec au Cégep de Rosemont. Il me faisait écouter les discours du général De Gaulle alors que j’étais encore au berceau», confiait Mathieu Bock-Côté (Ph.D. sociologie, 2013) à Actualités UQAM en 2007.
Chroniqueur au Journal de Montréal, le jeune sociologue (il n’a pas 40 ans) commente régulièrement l’actualité sociale et politique dans divers médias: L’Action nationale, Argument, Commentaire et Le Débat, mais aussi Radio-Canada et le journal français Le Figaro.
Sa famille politique a toujours été celle des souverainistes. Pourfendeur du multiculturalisme, Mathieu Bock-Côté se qualifie lui-même de conservateur. Une société, écrit-il, n’est pas une page blanche, «mais le fruit d’une civilisation dont on doit conserver les fondements, et dont la nation est l’expression politique la plus achevée».
En 2007, alors étudiant au doctorat sous la direction du professeur Jacques Beauchemin (Ph.D. sociologie, 1992), le chroniqueur publie un premier essai choc, La Dénationalisation tranquille (Boréal), qui critique les élites souverainistes pour avoir dissocié le projet de souveraineté de la défense de l’identité nationale. Il signe ensuite Fin de cycle, aux origines du malaise politique québécois (Boréal, 2012), Exercices politiques (VLB, 2013), Le nouveau régime. Essais sur les enjeux démocratiques actuels (Boréal, 2017) et L’empire du politiquement correct (Cerf, 2019).
Surtout connu pour la flamboyance de son style, Mathieu Bock-Côté n’en demeure pas moins l’un des plus brillants essayistes du Québec. Même ses adversaires politiques reconnaissent la force de sa pensée et l’étendue de sa culture.
Quel type d’étudiant étiez-vous?
Aux yeux de certaines personnes, j’étais du genre intello étrange. Habité par les débats d’idées dans l’espace public, je lisais sans cesse et j’étais déjà très impliqué dans la vie intellectuelle québécoise. C’est aussi à cette époque que, parallèlement à mes études de maîtrise et de doctorat, j’ai commencé à enseigner à titre de chargé de cours en sociologie.
Que vouliez-vous devenir?
Je me suis toujours vu comme un intello, d’où l’enseignement, les chroniques dans les médias et l’écriture d’essais. J’avais en tête un modèle, qui est toujours le mien, celui de Raymond Aron, philosophe, sociologue et politologue français, qui avait un pied dans l’université et l’autre dans les médias.
Quelle idée, quel concept, quel buzzword était à la mode dans votre domaine à l’époque de vos études?
La référence aux identités multiples était au centre des discussions dans les séminaires de maîtrise et de doctorat et commandait toute réflexion sur les rapports entre identités, culture et nation. J’étais de ceux qui croyaient qu’il fallait penser contre elle et non à partir d’elle.
Quel était l’endroit préféré des étudiants pour se réunir?
Le Sainte-Élisabeth, un bar situé sur la rue éponyme, tout près de Sainte-Catherine. C’était un lieu fréquenté non seulement par les étudiants, mais aussi par les jeunes souverainistes.
Pouvez-vous nommer un professeur, une phrase ou un cours qui vous a marqué?
Sans aucun doute mon directeur de recherche, le professeur du Département de sociologie Jacques Beauchemin. C’est un homme d’une grande ouverture intellectuelle et d’une grande générosité. Il consacrait beaucoup de temps à ses étudiants. Je ne sais plus combien d’heures j’ai passées à discuter avec lui dans son bureau. C’est pour Jacques Beauchemin que je suis venu étudier à l’UQAM après avoir commencé une maîtrise en philosophie à l’Université de Montréal. La lecture de son ouvrage Une histoire en trop: la mauvais conscience des souverainistes québécois a été déterminante pour moi.
Que souhaitez-vous à l’UQAM pour ses 50 ans?
Qu’elle demeure un pôle universitaire francophone d’excellence et qu’elle défende le pluralisme intellectuel, sans céder aux modes idéologiques.