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Confinés mais performants

Les étudiants inscrits au cours virtuel Sociologie de l’art se sont livrés à une expérience de création ludique.

Par Claude Gauvreau

26 mai 2020 à 10 h 05

Mis à jour le 15 avril 2021 à 9 h 04

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Une jeune femme en pyjama assise sur une sécheuse, dans sa salle de bain, presque ensevelie sous des rouleaux de papier hygiénique… Deux jambes nues qui sortent d’une grosse boîte de carton… Un jeune homme recroquevillé dans son lit, la tête enfouie sous les couvertures… Ces mises en scène performées ont été réalisées dans le cadre du cours d’été virtuel «Sociologie de l’art», auquel sont inscrits quelque 60 étudiants provenant de divers programmes en sciences humaines, arts et littérature.

Dans ce cours de premier cycle donné à distance, la professeure du Département de sociologie Magali Uhl a convié ses étudiants à vivre une expérience de création ludique en composant avec les contraintes du confinement. «Lors de la première semaine de la session, j’ai proposé, en guise d’introduction, deux exercices aux étudiants. D’abord, au moyen du selfie, se présenter avec une œuvre d’art qu’ils appréciaient, tout en expliquant leur choix. Pour le deuxième exercice, plus original, ils devaient se faire photographier dans leur lieu de confinement en prenant la pose d’une sculpture-performée, à la manière de l’artiste contemporain Erwin Wurm

Inscrivant sa démarche de travail dans la tradition de l’art de performance, cet artiste d’origine autrichienne s’est fait connaître à la fin des années 1990 avec ses One minute sculptures. Celles-ci mettaient en scène des personnages qui, dans des espaces privés ou publics, adoptaient des postures inusitées, voire absurdes: se tenir debout le plus longtemps possible sur deux melons, rester cinq minutes les pieds dans un seau avec un autre seau sur la tête, se coucher sur des balles de tennis, etc.

«Erwin Wurm pose un regard ironique et critique sur la société de consommation, sur ses divers objets et sur l’utilisation que nous en faisons au quotidien, alimentant ainsi une réflexion sociologique, souligne Magali Uhl. Il utilise souvent des objets banals qui peuplent notre environnement, dont on ne sait parfois que faire, et cherche à détourner leurs usages pour leur donner un autre sens.»

Revisiter l’environnement quotidien

La professeure a envoyé aux étudiants un dossier et une vidéo sur Erwin Wurm et les a invités à s’en inspirer pour réaliser leur propre performance. «En leur demandant d’être eux-mêmes créatifs tout en revisitant leur environnement quotidien, j’ai voulu leur montrer que l’art sert, notamment, à changer notre regard sur les choses qui nous entourent, à produire un écart dans la pensée.»

Les étudiants se sont prêtés au jeu avec enthousiasme. «Cela leur a permis de penser leur situation de confinement et d’en témoigner de manière artistique, de transformer leur espace de tous les jours en jouant avec les objets qui s’y trouvent. Beaucoup m’ont écrit qu’ils avaient vu un potentiel libérateur dans cette expérience.»

Les résultats obtenus ont dépassé les attentes de la professeure. «J’ai été ravie de l’intérêt qu’ils ont manifesté et du temps qu’ils ont investi, produisant au final des choses intéressantes et étonnantes. Je tiens à les remercier pour leur engagement, d’autant plus que certains étudiants étaient sceptiques au départ et que d’autres n’étaient pas nécessairement familiers avec les pratiques artistiques contemporaines.»

S’initier à l’art

Le cours Sociologie de l’art est un cours d’initiation. Il vise à cerner la spécificité du regard sociologique sur l’art, tout en faisant appel à d’autres disciplines comme l’histoire, la philosophie et l’anthropologie. On y aborde, notamment, les questions du beau et de l’évaluation des productions artistiques, les problèmes de l’interprétation et de la réception des œuvres, les nouveaux territoires de l’art et l’éclatement actuel des formes d’expression. «Nous passons en revue les grandes théories de l’art et de l’esthétique, les rapports entre l’art et les cultures, et accordons une place particulière aux courants artistiques contemporains», observe Magali Uhl.

Avec autant d’étudiants inscrits à son cours, la professeure a choisi de le donner de manière asynchrone, plutôt que d’opter pour des cours en direct sur Zoom. «J’ai préparé des capsules à l’aide du logiciel  Panopto, lequel permet d’enregistrer et de diffuser facilement diverses sources d’information, audio et vidéo, des captures d’écran, des présentations Powerpoint, etc. Chaque lundi matin, je fournis aux étudiants une feuille de route pour la semaine et leur donne à faire des exercices quotidiens. Je n’aurais probablement pas eu l’idée de tenter ce type d’expérience en temps normal, comme quoi les contraintes nous forcent parfois à inventer.»