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Autisme: améliorer l’accès aux diagnostics

Un nouveau guide vise à soutenir l’implantation de cliniques d’évaluation diagnostique.

Par Claude Gauvreau

8 mai 2020 à 10 h 05

Mis à jour le 14 mai 2020 à 11 h 05

«Les délais d’attente s’expliquent, entre autres, par un manque de ressources dans un contexte où le nombre de demandes de diagnostic a proliféré au cours des 20 dernières années.» Mélina Rivard, professeure au Département de psychologiePhoto: Getty images

En 2014, une étude pilotée par la Fondation Miriam (un organisme de bienfaisance soutenant des programmes d’intervention novateurs auprès d’enfants et d’adultes atteints d’un trouble de développement) révélait que plus de 1000 enfants au Québec pouvaient attendre jusqu’à trois ans avant d’obtenir un diagnostic d’autisme, de déficience intellectuelle ou de retard global de développement. Or, ce diagnostic constitue la clé pour accéder à des services publics spécialisés d’intervention précoce.

«Les délais d’attente s’expliquent, entre autres, par un manque de ressources dans un contexte où le nombre de demandes de diagnostic a proliféré au cours des 20 dernières années», rappelle la professeure du Département de psychologie Mélina Rivard, membre du Laboratoire d’étude des problématiques comportementales en autisme et des autres retards de développement(ÉPAULARD). 

Le fait que ces diagnostics exigent une expertise particulière contribue aussi à ralentir le processus d’évaluation dans le système hospitalier. «La situation est d’autant plus préoccupante que les enfants ont droit au traitement d’intervention comportementale intensive jusqu’à l’âge de 5 ans et 11 mois, précise la psychologue. Plus l’attente est longue pour obtenir une évaluation diagnostique, plus nombreux sont les enfants qui ne peuvent pas bénéficier d’une intervention précoce.»

Pour réduire les délais d’attente, le Centre d’évaluation Voyez les choses à ma façon(VCMF), appuyé par la Fondation Miriam, le laboratoire ÉPAULARD et la Chaire de déficience intellectuelle et troubles du développement (DITC), dont la titulaire est la professeure du Département de psychologie Diane Morin, ont conçu et lancé récemment le «Guide d’implantation d’un programme d’évaluation diagnostique du trouble du spectre de l’autisme, de la déficience intellectuelle et du retard global de développement pour des enfants âgés de cinq ans et moins».

Le guide d’implantation, qui s’appuie sur l’expérience positive du Centre d’évaluation VCMF, vise à soutenir les gestionnaires et les professionnels de la santé et des services sociaux qui souhaitent implanter une clinique d’évaluation diagnostique dans leur région.

Projet pilote 

Le Centre VCMF a été créé en 2015, grâce à une entente établie entre la Fondation Miriam, le ministère de la Santé et des Services sociaux (MSSS) et l’Institut national d’excellence en santé et services sociaux (INESSS). Il a développé un projet pilote afin d’améliorer l’accès aux services d’évaluation diagnostique pour les enfants d’âge préscolaire se trouvant sur des listes d’attente dans les hôpitaux montréalais. C’est ce projet qui a servi de base au guide d’implantation. 

Le projet, qui s’est déployé de 2015 à 2020, visait à proposer des services d’évaluation diagnostique plus fluides, permettant de réduire le temps d’attente, ainsi qu’un service de soutien aux familles pendant et après l’évaluation. Un autre objectif consistait à élaborer un modèle de centre d’évaluation diagnostique répondant aux meilleurs standards de pratique, notamment en termes de travail en équipe interdisciplinaire et d’efficacité quant au nombre d’évaluations réalisées. 

«Pour remplir sa mission, le Centre VCMF a créé des partenariats avec des organismes et établissements du réseau public de la région de Montréal afin qu’ils lui réfèrent des familles dont les enfants étaient en attente d’une évaluation diagnostique», note Mélina Rivard. Il s’agit de l’Hôpital Maisonneuve-Rosemont, de l’Institut universitaire Douglas en santé mentale, de l’Hôpital de Montréal pour enfants et du Centre de santé et de services sociaux (CSSS) de la Montagne.

Des résultats positifs

Depuis 2015, les chercheuses du laboratoire ÉPAULARD et de la Chaire DITC collaborent avec le Centre VCMF pour l’évaluation de la qualité de ses services, cliniques notamment. Elles ont participé à l’évaluation du projet pilote et de ses impacts. En mars 2020, le centre VCMF avait complété plus de 1 100 évaluations diagnostiques.

Une étude a révélé un taux de satisfaction élevé des familles ayant reçu des services du Centre. «La grande majorité des parents considéraient que le Centre avait fait preuve d’écoute à leur égard, les avait aidés à mieux comprendre les difficultés et les besoins de leur enfant et leur avait offert un appui psychologique adéquat, observe la professeure. Plusieurs parents ont aussi exprimé le souhait d’obtenir un soutien après le diagnostic et de recevoir davantage d’information sur les traitements et les services disponibles dans le réseau public de santé.»

Mélina Rivard croit que l’expérience du Centre et le guide d’implantation permettront d’alimenter la réflexion des représentants des CIUSS et du ministère de la Santé et des Services sociaux qui siègent à des comités chargés de revoir le processus actuel d’évaluation diagnostique des enfants présentant des difficultés ou des retards sur le plan développemental. 

«Grâce au guide d’implantation, d’autres centres ou services pourraient s’inspirer de l’expérience du centre VCMF, car l’objectif ultime est que le programme puisse être développé dans différentes régions du Québec», souligne Mélina Rivard. Un rapport de recherche portant sur les effets de l’implantation sera rendu public en décembre 2020.   

On peut consulter le guide d’implantation du programme d’évaluation diagnostique sur le site web de la Chaire de déficience intellectuelle et troubles du développement.