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Se réinventer  

Les étudiants du D.E.S.S. en design d’événements ont participé à un atelier autour du processus de création.

Par Valérie Martin

23 juin 2020 à 14 h 06

Mis à jour le 24 juin 2020 à 6 h 06

Les finissants du D.E.S.S. en design d’événements étaient invités à explorer diverses disciplines artistiques, comme le théâtre ou la vidéo.Image: Maylis Persoons (vidéo)

Le décloisonnement des pratiques artistiques permet l’émergence de nouvelles propositions et expériences créatives. «Cela donne aux artistes l’occasion de se renouveler et de se réinventer», croit l’architecte Jean Verville, qui était professeur invité de la dernière édition du cours Design international, un atelier intensif offert chaque printemps aux étudiants de l’École de design, qui leur permet de parfaire leur apprentissage au contact de créateurs, de chercheurs et de praticiens de réputation internationale œuvrant dans différents champs d’activité du design. Professeur à l’École d’architecture de l’Université Laval, l’architecte réputé pour ses projets uniques orientés vers l’expérience de l’utilisateur est aussi doctorant en études et pratiques des arts à l’UQAM.

Lors de cette édition, les finissants du D.E.S.S. en design d’événements étaient invités à explorer diverses disciplines artistiques, comme le théâtre ou la vidéo, dans le but de créer une fiction événementielle. «Les participants devaient développer leur créativité dans un contexte d’urgence inusité: ils disposaient de peu de temps pour réaliser leurs créations et ils étaient confinés, chacun seul à la maison, loin de l’univers propre à un atelier ou à une classe de design», précise Jean Verville.

Intitulé «Autres ailleurs – espaces narratifs et pensée latérale», le laboratoire, qui a eu lieu du 1er au 12 juin derniers dans une formule à distance, visait notamment l’exercice de la pensée créative et de la réflexion conceptuelle. Les échanges entre professeurs et étudiants, les séances de travail, les séminaires ainsi que la présentation des productions finales se sont entièrement déroulés sur la plateforme Zoom. Les étudiants avaient pour mandat spécifique de proposer de nouvelles idées pour orienter et influencer les thèmes ou le contenu des futurs projets de recherche et de création du comédien, dramaturge et metteur en scène québécois d’origine iranienne Mani Soleymanlou, dont les œuvres théâtrales interrogent l’identité communautaire (Un, Deux, Trois) aussi bien que les interactions sociales (Ils étaient quatre, Cinq à sept, 8). «L’objectif de l’atelier était de développer différents matériaux de conception avec lesquels le créateur pourrait ensuite s’amuser à interpréter la suite de sa production», souligne le professeur invité.

Selon Jean Verville, l’atelier avait également pour but de réfléchir à la notion même d’événement. «De quelle manière les événements se dérouleront-ils après la pandémie?, questionne le professeur. Par cet atelier, chaque étudiant était amené à réinventer sa suite des choses.»

Pour stimuler la créativité des étudiants, l’architecte organisait chaque jour, en début d’après-midi, de courtes séances de Speed Creative Thinking sur la plateforme Zoom. «Il pouvait s’agir, par exemple, d’une séance au cours de laquelle un étudiant lisait un extrait d’un texte de Mani Soleymanlou ou en faisait un sketch, le tout suivi d’un commentaire émis par un autre participant, illustre Jean Verville. C’était un moment pour réfléchir ensemble et pour créer une communauté d’idées.»

S’amuser à créer

Chaque jour, les participants devaient également réaliser des travaux à remettre au professeur, lesquels prenaient la forme d’artéfacts de conception (sketch, texte, etc.) ou de maquettes heuristiques, ces dernières conçues à partir de matériaux que les étudiants avaient sous la main, à la maison, comme du papier d’aluminium, de la colle chaude filamentée, du sable, de la glaise, des bijoux, etc. «Les maquettes heuristiques sont des maquettes créées de manière instinctive, par exemple après la lecture d’un texte théâtral, explique Jean Verville. Elles permettent d’explorer la créativité sans viser un résultat ou un but précis. Il n’y a pas d’enjeu de performance.» Ces périodes d’essai sont très fructueuses au niveau des idées et peuvent aider à surmonter les blocages liés au stress de la création, ajoute le professeur.

Le rythme de remise des exercices reproduisait quelque peu celui du travail en agence, où les designers doivent souvent composer avec des délais rapprochés et des moments de stress intense. «Il faut apprendre à passer à l’action et à surpasser de tels blocages», martèle Jean Verville.

Les étudiants, qui ont pu suivre l’évolution des projets de leurs collègues grâce à la plateforme Zoom, avaient aussi pour consigne de s’approprier les idées des autres pour en faire de nouvelles propositions ou pour les transposer dans leurs créations. «Les idées ne nous appartiennent pas et c’est très bien comme cela!», lance le professeur. Un projet en design doit être universel et non personnel, puisqu’il ne s’adresse pas aux designers, mais bien à la population. «Il est toutefois possible et souhaitable de personnaliser son projet», nuance-t-il.

Les présentations vidéo finales ont été vues et commentées en ligne par un jury d’experts composé de Mani Soleymanlou, de la professeure à l’École de design Céline Poisson et des architectes Tania Paula Garza et Gauthier Laurent, respectivement du Mexique et de la France. «Tous les horizons du design événementiel étaient possibles, les travaux étudiants présentés étaient variés et très créatifs. Il y avait de tout: des espaces scéniques, des installations expérientielles, des dispositifs ludiques et des mondes imaginaires», décrit Jean Verville.

Reste à déterminer maintenant comment Mani Soleymanlou intégrera ces créations étudiantes à son univers théâtral…