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Agir contre la violence sexuelle

Le programme de prévention Empreinte a des effets positifs auprès des jeunes du secondaire.

Par Claude Gauvreau

26 février 2019 à 14 h 02

Mis à jour le 26 février 2019 à 16 h 02

Le programme, destiné aux élèves de 2e, 3e et 4e secondaire, comportait 6 ateliers portant, notamment, sur les agressions à caractère sexuel, le consentement sexuel, le dévoilement et le soutien et le pouvoir d’agir des jeunes. Photo: Getty/Images

L’évaluation du programme de prévention Empreinte – Agir ensemble contre les agressions à caractère sexuel, menée au cours l’année 2017-2018 dans 22 écoles secondaires situées dans 11 régions du Québec, démontre des effets positifs tant en ce qui concerne les élèves et leurs parents, que le personnel scolaire, enseignant et non enseignant. Les résultats de l’évaluation ont été dévoilés à l’UQAM, le 25 février.

Lancé en 2015, ce projet financé par Condition féminine Canada et le ministère de l’Éducation et de l’Enseignement supérieur du Québec (MESS) avait pour objectif de diminuer la tolérance sociale à l’égard des différentes formes de violence sexuelle. Le programme Empreinte a été conçu et développé par les professeures Manon Bergeron (Ph.D. éducation, 2013) et Martine Hébert, du Département de sexologie, et par le Regroupement québécois des Centres d’aide et de lutte contre les agressions à caractère sexuel (RQCALACS), avec l’appui du Service aux collectivités de l’UQAM.

Selon une enquête menée en 2017 auprès de 8 000 jeunes au Québec, 15% des filles et 4% des garçons âgés de 15 ans disaient avoir vécu au moins un événement d’agression sexuelle au cours de leur vie, a rappelé Manon Bergeron, qui est aussi titulaire de la Chaire de recherche interdisciplinaire et intersectorielle sur la violence sexuelle en milieu d’enseignement supérieur. «Ces chiffres demeurent conservateurs, a noté la professeure, puisqu’ils font référence à la définition légale de l’agression sexuelle, laquelle n’inclut pas toutes les formes de violence sexuelle. Une fois adultes, les enfants et les adolescents ayant subi de la violence sexuelle sont davantage à risque de subir de nouveaux épisodes de violence physique, psychologique ou sexuelle.»

Adapté au développement psycho-socio-sexuel des jeunes filles et garçons, Empreinte adopte une approche inclusive des diversités sexuelles et culturelles, et s’arrime aux contenus en éducation à la sexualité offerts par le ministère de l’Éducation dans les écoles primaires et secondaires du Québec. Il bénéficie de l’expertise des CALACS, qui possèdent une expérience de plus de 25 ans en matière d’intervention et de prévention.

Des résultats prometteurs

Le premier volet du programme, destiné aux élèves de 2e, 3e et 4e secondaire, comportait 6 ateliers qui ont été évalués dans 22 écoles de 11 régions. Les thèmes abordés concernaient les agressions à caractère sexuel; le consentement sexuel; le dévoilement et le soutien; le pouvoir d’agir des jeunes; la culture de l’hypersexualisation et les stéréotypes sexuels; et l’exploitation sexuelle.

Selon le rapport d’évaluation, 85 % des jeunes – filles et garçons – ont dit avoir apprécié les ateliers, soulignant que ceux-ci leur avaient permis d’identifier des moyens pour prévenir les agressions sexuelles et d’acquérir des connaissances sur les habiletés de soutien aux personnes victimes ainsi que sur l’autoprotection sur les réseaux sociaux.

Un second volet comprenait une formation d’une journée pour le personnel enseignant et non enseignant – offerte par des intervenantes d’un CALACS – visant l’acquisition d’une compréhension globale de la violence sexuelle chez les jeunes afin que le personnel puisse intervenir adéquatement auprès de l’ensemble des élèves.

L’évaluation réalisée dans 13 écoles de 9 régions du Québec montre que la totalité des membres du personnel recommandent cette formation à d’autres intervenants et enseignants, que 94% d’entre eux ont l’intention d’utiliser la formation dans leur travail auprès des jeunes et que celle-ci permet au personnel de se sentir davantage capable de discuter de violence sexuelle avec les élèves.

Enfin, le troisième volet visait à sensibiliser les parents au phénomène de la violence sexuelle et à les outiller pour une meilleure communication avec leurs enfants. Six capsules vidéo, disponibles sur le site web d’Empreinte et abordant les mêmes thèmes que les ateliers du volet Jeunes, avaient été réalisées à leur intention.

Réalisée dans 11 régions du Québec, l’évaluation souligne que les deux tiers des parents ont discuté de violence sexuelle avec leur enfant après avoir visionné les capsules, que 96% disent les avoir appréciées et les recommandent à d’autres parents.

Fait à noter, les apprentissages dans chacun des volets se sont maintenus un ou deux mois plus tard, après que les membres de l’équipe de recherche aient effectué une relance auprès des élèves, de leurs parents et du personnel scolaire

Recommandations

Le rapport d’évaluation du programme Empreinte contient plusieurs recommandations. La première consiste à favoriser l’implantation du programme à travers tout le Québec au cours des trois prochaines années afin de pouvoir identifier les facteurs de réussite et les obstacles, et ce, de manière parallèle à l’insertion des contenus obligatoires en éducation à la sexualité du MESS.

Le rapport propose également l’ajout de stratégies pédagogiques permettant aux jeunes de mettre en pratique les apprentissages, d’adapter les ateliers en classe pour les jeunes inscrits dans le programme en adaptation scolaire, de rendre disponible la formation à un plus grand nombre d’enseignants et d’intervenants dans les milieux scolaires québécois et de développer des stratégies pour rejoindre les parents d’adolescents et les convaincre de visionner les capsules vidéo.    

Au moment où plusieurs personnes critiquent le manque de ressources octroyées pour dispenser les apprentissages en éducation à la sexualité dans les écoles et le manque de formation pour offrir les contenus en prévention de la violence sexuelle, le programme Empreinte répond à des besoins essentiels, concluent les auteures du rapport.