Les doctorantes Laetitia Mélissande Amédée, Ariane Godbout, Mylène Legault et Violette Loget figurent parmi les lauréats 2019 de la bourse Vanier. Les candidats à ce programme de bourses, dont la valeur est de 50 000 dollars par année pendant trois ans, sont sélectionnés selon trois grands critères: l’excellence du dossier académique, le potentiel de recherche et les compétences en leadership.
Les quatre Uqamiennes ont obtenu une bourse du Conseil de recherches en sciences humaines du Canada (CRSH) – les deux autres organismes subventionnaires de la bourse Vanier étant les Instituts de recherche en santé du Canada (IRSC) et le Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie (CRSNG).
Laetitia Mélissande Amédée (psychologie)
Laetitia Mélissande Amédée (B.Sc. psychologie, 2017) s’intéresse aux facteurs de risque et de protection des enfants victimes d’agression sexuelle et de maltraitance. «L’agression sexuelle pendant l’enfance est associée à des difficultés sur le plan émotionnel, cognitif et comportemental, explique-t-elle. Les études suggèrent que les traumas durant l’enfance ont des conséquences sur le développement du cerveau et entraînent une difficulté à interagir de manière flexible et à contrôler ses comportements inadaptés.» Ces habiletés, appelées fonctions exécutives, sont essentielles à l’adaptation sociale.
«Mon étude évaluera l’effet de l’agression sexuelle sur le fonctionnement exécutif des enfants d’âge scolaire (6-12 ans). J’examinerai le rôle protecteur de la qualité de la relation parent-enfant (représentations d’attachement) sur le développement de déficits cognitifs (fonctions exécutives) et des problèmes de comportement chez les enfants victimes d’agression sexuelle. Au total, 200 enfants d’âge scolaire (victimes et non-victimes) seront recrutés dans des écoles et des centres d’intervention spécialisés au Québec.»
Sa thèse, précise-t-elle, permettra de mieux comprendre les mécanismes impliqués dans le développement des difficultés psychologiques associés à l’agression sexuelle. «Les résultats pourront orienter les interventions visant à renforcer la qualité des interactions parent-enfant et le fonctionnement exécutif de ces enfants afin de prévenir l’émergence de problèmes de comportements.»
Coordonnatrice de recherche de la Chaire de recherche du Canada sur les traumas interpersonnels et la résilience, Laetitia Mélissande Amédée mène ses recherches sous la direction des professeures Martine Hébert (sexologie) et Chantal Cyr (psychologie).
Ariane Godbout (histoire)
«Le but de ma thèse est d’examiner comment l’idée de citoyenneté s’est modifiée dans la ville de La Rochelle entre 1614 et 1650, notamment en raison de la suppression des institutions urbaines par le pouvoir royal après la rébellion de la ville en 1627-1628», affirme Ariane Godbout.
Dans la France de l’Ancien Régime, le concept de citoyenneté n’avait pas encore pris la connotation «nationale» qu’on lui connaît aujourd’hui, mais s’envisageait à l’échelle locale, poursuit-elle. «Étaient citoyens les bourgeois qui bénéficiaient d’un statut particulier dans une ville, qui leur conférait notamment le droit de participer au gouvernement municipal. Si une définition stricte de la citoyenneté conduit à penser qu’il n’existe plus à proprement parler de citoyens rochelais après 1628, de récents travaux permettent d’envisager une définition plus large de la citoyenneté, englobant la participation politique et l’engagement public.»
Partant de l’hypothèse qu’il existe encore un type de citoyenneté rochelaise après 1628, le but de sa thèse est de déterminer les formes qu’elle prend, et les nouveaux lieux qu’elle investit. «Les conflits entre les agents d’un État et les gouvernés étant propices à la participation politique, une analyse des registres des deux cours municipales de La Rochelle et des témoignages de contemporains permettra de mieux concevoir la citoyenneté de cette période vécue en tant que lien, en tant que rôle et en tant qu’identité», explique la doctorante, qui rédigera sa thèse sous la direction du professeur Pascal Bastien, du Département d’histoire.
Mylène Legault (philosophie)
Le projet de thèse de Mylène Legault (M.A. philosophie, 2018), inscrite à une double concentration en sciences cognitives et en études féministes, consiste à développer une approche neuroféministe de l’autisme et vise l’inclusion de la neurodiversité dans les modèles «standards» de la cognition humaine. «Tout comme le concept de sexe/genre s’est détaché de l’essentialisme biologique, je propose le rejet de l’essentialisme en sciences cognitives, en concevant l’architecture cognitive comme émergeant d’un réseau de relations réciproques entre le cerveau, le corps et la culture, ce qui ouvre la possibilité d’une mosaïque de portraits cognitifs, explique la doctorante. Le profil autistique serait ainsi un portrait cognitif pour lequel notre culture n’offre pas d’emblée les outils adéquats d’intégration et d’adaptation au milieu social, contrairement à ce qu’elle fait pour d’autres portraits, créant ainsi différentes injustices épistémiques.»
Mylène Legault mène ses recherches sous la direction des professeurs Pierre Poirier et Amandine Catala, du Département de philosophie.
Violette Loget (muséologie, médiation, patrimoine)
«Les musées font face à la croissance exponentielle de leurs collections, observe Violette Loget. Acquisition après acquisition, les objets s’accumulent dans les collections dont l’ampleur croît. Si les réserves apparaissent régulièrement comme saturées, les musées continuent d’enrichir leurs collections en évitant bien souvent d’aborder la question de la sortie d’inventaire – la suppression de la mention d’un objet de musée à l’inventaire de la collection – et de l’aliénation – le transfert des droits de propriété de l’objet à une tierce personne.»
Il existe une pléiade de pratiques qui, parce qu’elles visent des objets de collections protégées, engendre des problèmes muséologiques, juridiques et déontologiques, et ce, à la fois en France, où l’on considère les collections nationales inaliénables, et au Canada, où les procédures d’aliénation sont légales, mais strictement régulées par les professionnels. «Qu’elles soient légales ou déontologiques, des règles affirment la permanence de la conservation des collections pour protéger l’intégrité des collections et limiter la monétarisation du patrimoine», précise la doctorante.
Face à l’inflation des collections, sa thèse entend souligner les failles du modèle de collection «illimité», «perpétuel» et «inaliénable» instauré au XIXe siècle, tout en rendant compte de modèles alternatifs et soutenables de gestion des collections. «Pour y parvenir, j’analyserai et comparerai l’évolution des usages et des règles d’aliénabilité au Canada et en France en fonction de différents types d’aliénations, de musées, d’acteurs et d’objets, et ce depuis la rédaction du premier code de déontologie du Conseil international des musées en 1986.»
La thèse de Violette Loget est réalisée sous la cotutelle d’Yves Bergeron, du Département d’histoire de l’art, et de François Mairesse, de l’Université Sorbonne Nouvelle-Paris 3.