Plusieurs de 80 personnes ont assisté, le 18 septembre, au lancement officiel de KHEOPS, le Consortium international de recherche sur la gouvernance des grands projets d’infrastructure, dirigé par la professeure Nathalie Drouin, du Département de management et technologie de l’ESG UQAM. L’Événement s’est déroulé en présence, notamment, du recteur Robert Proulx, de Pierre Desrochers, président du Comité exécutif de la Ville de Montréal, et de Rémi Quirion, scientifique en chef du Québec.
KHEOPS a pour mission de développer un savoir de pointe sur la gouvernance des grands projets d’infrastructure au Québec et au Canada, en combinant des expertises multidisciplinaires et multisectorielles. Le consortium adoptera une perspective de développement durable et socialement responsable, complémentaire à l’approche actuelle dans l’étude des grands projets, et soutiendra la prise de décision des acteurs clés – organisations gouvernementales, entreprises – dans le développement des infrastructures au pays.
«Depuis environ 10 ans, le nombre d’investissements majeurs dans de grands projets d’infrastructure s’est accru et de nouvelles façons d’aborder leur gouvernance ont émergé au Québec, au Canada et dans d’autres pays, rappelle Nathalie Drouin. Ici comme ailleurs, le parc d’infrastructures est non seulement déficitaire, mais aussi obsolète, nécessitant des travaux importants pour assurer les services courants à la population et contribuer à sa qualité de vie, tout en participant au développement économique.»
Fondé en juin 2016, KHEOPS rassemble actuellement une quarantaine de chercheurs issus des disciplines des sciences sociales et humaines, des sciences naturelles et de la santé. Ces chercheurs proviennent de huit universités québécoises et canadiennes, dont l’UQAM, l’Université de Sherbrooke et Polytechnique Montréal, ainsi que de sept universités à l’étranger (Australie, Norvège, Angleterre, Pays-Bas, Inde). «Notre attitude à l’égard des centres de recherche à l’UQAM et dans les autres universités en est une d’ouverture et de collaboration, insiste la professeure. La porte est grande ouverte aux chercheurs intéressés par notre approche et par nos projets.»
En 2015, au terme de son mandat de vice-doyenne à la recherche à l’ESG UQAM, Nathalie Drouin a été approchée par des chercheurs australiens qui travaillaient à la mise sur pied d’un réseau international de recherche sur la gouvernance des grands projets d’infrastructure. «Ayant déjà des contacts avec des chercheurs en Norvège, en Angleterre, en Inde et en Chine, ils m’ont proposé de réfléchir à la possibilité d’implanter au Canada une structure de recherche dans le même domaine, pouvant constituer le pôle nord-américain d’excellence du réseau, explique la chercheuse. Tentée par ce défi, j’ai aussitôt rencontré des interlocuteurs clés, dont le recteur Robert Proulx et le scientifique en chef du Québec Rémi Quirion, lesquels ont manifesté leur intérêt à soutenir la création à l’UQAM d’un consortium de recherche sur la gouvernance des grands projets.»
De nombreux partenaires
L’UQAM, les trois Fonds de recherche du Québec et la Ville de Montréal, membres fondateurs de KHEOPS, ont été les premiers à soutenir l’initiative portée par Nathalie Drouin.
Le consortium réunit également un grand partenaire, la Caisse de dépôt et placement du Québec, des partenaires scientifiques – l’Université de Sherbrooke, le Centre interuniversitaire de recherche en analyse des organisations (CIRANO), Réseau Québec maritime, le Centre interuniversitaire de recherche sur les réseaux d’entreprise, la logistique et le transport (CIRRELT) – ainsi qu’un partenaire associé, l’Administration portuaire de Montréal, et des collaborateurs: Montréal international, le Groupe de recherche appliquée en macro-écologie (GRAME) et la Grappe métropolitaine de logistique et transport de Montréal (CargoM).
Une approche sociale
KHEOPS souhaite ajouter une dimension sociale et environnementale plus prononcée à l’étude classique des projets d’infrastructure, à travers le prisme de la gouvernance. «Plusieurs recherches s’intéressent aux matériaux et aux technologies les plus performants pour assurer la résistance des infrastructures, au financement des projets, au respect des échéanciers, au cycle de vie des infrastructures», énumère Nathalie Drouin. Nous voulons considérer aussi d’autres aspects: les principes d’éthique et d’intégrité en gouvernance, l’acceptabilité sociale des projets d’infrastructure et leurs effets sur les milieux de vie urbains, l’impact des changements sociodémographiques sur les projets, les bénéfices non financiers, les infrastructures vertes, etc.»
Selon la professeure, toutes ces dimensions doivent être comprises dans la gouvernance des projets et doivent nourrir la réflexion des décideurs. «Aujourd’hui, on définit beaucoup la gouvernance en termes organisationnels et de gestion de projet. Mais la gouvernance est aussi institutionnelle, notamment pour ce qui est des investissements gouvernementaux dans les infrastructures. Elle prend, par ailleurs, un caractère local, quand les pouvoirs municipaux sont impliqués, et même mondial dans certains cas. Nous avons besoin d’un modèle intégrateur plutôt qu’une approche en silo.»
Un nouvel ouvrage
La professeure Nathalie Drouin est la co-éditrice, avec les chercheurs Shankar Sankaran et Ralf Müller, d’un ouvrage scientifique intitulé Cambridge Handbook of Organizational Project Management (Cambridge University Press). Celui-ci couvre des concepts théoriques et pratiques précieux pour les chercheurs et les professionnels du milieu souhaitant enrichir leurs connaissances et approfondir leur compréhension de la gestion organisationnelle de projet.
Transport, immobilier, énergie
Le consortium a identifié trois domaines spécifiques où se déploieront les projets de recherche: le transport, l’immobilier et l’énergie. «Les barrages hydro-électriques, les éoliennes, les oléoducs comptent parmi les projets d’infrastructure qui suscitent notre intérêt, note Nathalie Drouin. Pensons également aux grands projets immobiliers pour les hôpitaux et les écoles, gérés par les pouvoirs publics, et à ceux associés à la stratégie maritime, au système routier et au transport urbain.»
Jusqu’à présent, 10 projets de recherche ont été mis en branle. Ils portent, notamment, sur l’intégration des bénéfices non financiers tout au long du cycle de vie des projets d’infrastructure, sur le développement des pôles logistiques sous l’angle de l’acceptabilité sociale, sur les enjeux de coordination, de cohabitation et de communication des chantiers, sur la reddition de comptes pour les projets, sur une plateforme numérique de données sur les infrastructures et sur une table de concertation sur les enjeux sociaux reliés à la mise en place d’un transport électrique autonome.
Pour chaque projet de recherche, KHEOPS a d’abord identifié les besoins de ses partenaires, puis a repéré avec le comité scientifique les chercheurs susceptibles de jouer un rôle de leader. «Tous nos partenaires nous ont dit que le développement d’habiletés en gestion sociale était un besoin urgent», souligne Nathalie Drouin.
C’est en partenariat avec le milieu que le consortium bâtit son approche. «Nous n’allons pas réinventer la roue, dit la professeure, mais nous pouvons faciliter les contacts entre les chercheurs d’ici et d’ailleurs et entre ceux-ci et les décideurs pour qu’ils réfléchissent aux meilleures façons d’améliorer la gouvernance des projets.»
On peut visionner une vidéo sur l’approche KHEOPS concernant la gouvernance des grands projets d’infrastructure.