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Prévenir la violence sexuelle

Le programme Empreinte s’adresse aux jeunes du secondaire, à leurs parents et au personnel scolaire.

Par Claude Gauvreau

18 octobre 2017 à 7 h 10

Mis à jour le 18 octobre 2017 à 7 h 10

L’éducation à la sexualité comprend la prévention de la violence sexuelle et fait partie du mandat de l’école québécoise. Les membres du personnel scolaire occupent une place privilégiée auprès des jeunes pour les informer, les sensibiliser et les aider. Photo: Istock

L’avalanche de messages #MoiAussi qui a déferlé sur les médias sociaux au cours des derniers jours dans la foulée de l’affaire Harvey Weinstein ne fait que rappeler, une fois de plus, l’étendue du phénomène de la violence sexuelle. Au Québec, près d’une femme sur quatre et un homme sur dix rapportent avoir été victimes d’agression sexuelle avant l’âge de 18 ans, révèlent les études les plus récentes. Une fois adultes, les enfants et les adolescents ayant subi de la violence sexuelle sont davantage à risque de subir de nouveaux épisodes de violence physique, psychologique ou sexuelle.

«Il est impératif de diminuer la tolérance sociale à l’égard des différentes formes de violence sexuelle», souligne la sexologue Laurie Fradette (M.A. sexologie, 2012), coordonnatrice du nouveau programme de prévention Empreinte – Agir ensemble contre les agressions à caractère sexuel, dont le lancement a eu lieu à l’UQAM, le 17 octobre.

Destiné aux jeunes des écoles secondaires, à leurs parents et au personnel scolaire, enseignant et non enseignant, ce programme a été conçu par les professeures Manon Bergeron et Martine Hébert, du Département de sexologie, et par le Regroupement québécois des Centres d’aide et de lutte contre les agressions à caractère sexuel (RQCALACS), avec l’appui du Service aux collectivités de l’UQAM.  

Le programme Empreinte été développé dans le cadre du projet de recherche «En route pour une prévention concertée contre les agressions à caractère sexuel auprès des jeunes», financé par l’ancien ministère de l’Éducation et de l’Enseignement supérieur et par Condition féminine Canada. «Cette recherche avait pour objectifs de concevoir un programme commun de prévention pour les milieux scolaires, selon une approche écosystémique et féministe, et de créer des partenariats à long terme avec ces milieux pour consolider les efforts de prévention, explique Laurie Fradette. Elle a permis d’analyser les besoins des jeunes, en tenant compte de leur développement psychosexuel.»

S’inspirer des pratiques exemplaires

Empreinte s’inspire des pratiques exemplaires sur le terrain, des CALACS notamment, lesquels ont une expérience de plus de 25 ans en matière d’intervention et de prévention. «Même s’il vise spécifiquement la prévention de la violence sexuelle, le programme cherche aussi à établir des liens entre la culture de l’hypersexualisation et la banalisation de la violence sexuelle chez les jeunes», note la sexologue.

Le programme comporte trois volets. Le premier, destiné aux jeunes, propose six ateliers portant sur des thématiques arrimées aux apprentissages en éducation à la sexualité définis par le ministère de l’Éducation: les agressions à caractère sexuel; le consentement sexuel; le dévoilement et le soutien; le pouvoir d’agir des jeunes; la culture de l’hypersexualisation et les stéréotypes sexuels; et l’exploitation sexuelle. Les ateliers sont animés durant les heures de classe par une intervenante du CALACS de la région, qui a préalablement reçu une formation dispensée par la professeure Manon Bergeron et par Laurie Fradette.

Un second volet vise à sensibiliser les parents au phénomène des agressions à caractère sexuel et à les outiller pour une meilleure communication avec leurs enfants. Six capsules vidéo, disponibles en ligne et abordant les mêmes thèmes que les ateliers du volet Jeunes, ont été réalisées à leur intention.

Enfin, le troisième volet comprend une formation d’une journée pour le personnel enseignant et non enseignant. Animé également par des intervenantes d’un CALACS, il vise l’acquisition d’une compréhension globale de la violence sexuelle chez les jeunes afin que le personnel puisse intervenir adéquatement auprès de l’ensemble des élèves.

«L’éducation à la sexualité comprend la prévention de la violence sexuelle et fait partie du mandat de l’école québécoise, rappelle la sexologue. Les membres du personnel scolaire occupent une place privilégiée auprès des jeunes pour les informer, les sensibiliser et les aider.»

Implantation et évaluation

Un projet pilote a été lancé l’an dernier afin d’expérimenter le volet Jeunes du programme. Celui-ci a été mis en place dans 6 écoles du Québec, touchant 425 élèves de 3e secondaire. «Bien que son évaluation reste à compléter, le projet pilote a eu des effets positifs auprès des élèves, notamment en ce qui concerne l’acquisition de connaissances relatives au phénomène de la violence sexuelle et le développement d’habiletés préventives», observe Laurie Fradette.  

Durant l’année 2017-2018, le programme sera déployé dans 26 écoles secondaires, situées dans 13 régions du Québec couvertes par des CALACS. Les effets de chacun des trois volets du programme et le partenariat avec les intervenants scolaires seront évalués au cours de la même période.

«Peu de programmes de prévention dans le domaine de la violence sexuelle ont été évalués au Québec et au Canada, remarque la sexologue. Notre évaluation permettra de vérifier l’efficacité du programme et d’apporter des modifications au besoin. Les résultats seront disponibles à la fin du processus, à l’automne 2018.»