
La température moyenne à la surface du sol en Amérique du Nord a augmenté de 1,8 °C au cours des 200 dernières années, révèle une recherche dont les résultats ont été publiés récemment dans un numéro spécial de la revue Climate Past, de l’Union européenne de géophysique.
Les signataires de l’article sont trois chercheurs du Centre de recherche en géophysique et géodynamique (Geotop) de l’UQAM – Fernando Jaume-Santero, diplômé de la maîtrise en sciences de l’atmosphère, Carolyne Pickler, doctorante en sciences de l’environnement, et Jean-Claude Mareschal, professeur associé au Département des sciences de la Terre et de l’atmosphère – ainsi que le professeur Hugo Beltrami, de l’Université St. Francis Xavier, en Nouvelle-Écosse, associé au Centre pour l’étude et la simulation du climat à l’échelle régionale (ESCER), basé à l’UQAM.
«Il s’agit d’une hausse de température importante, comparable à ce que l’on observe dans d’autres régions de l’hémisphère nord, souligne Carolyne Pickler. C’est la première fois que l’on mesure l’augmentation des températures pour l’ensemble de l’Amérique du Nord.»
En examinant les profils de température selon la profondeur de 510 trous de forage à travers l’Amérique du Nord, les chercheurs ont retracé l’historique (depuis 500 ans) des températures à la surface du sol sur l’ensemble du continent nord-américain. Leur étude s’inscrivait dans le cadre du projet PAGES NAm2k mené par un groupe de recherche nord-américain rattaché au réseau de chercheurs PAGES, qui cherche à reconstituer le climat des 2 000 dernières années sur chacun des continents.
«On sait que les températures dans les premiers kilomètres sous la croûte terrestre sont fortement affectées par les conditions de surface passées», rappelle la chercheuse. Des changements persistants à la surface se propagent dans le sous-sol et sont enregistrés comme des empreintes climatiques. Ces signaux ont été trouvés dans les profils de température établis par des géophysiciens qui étudiaient le régime thermique interne de la Terre. «Ils peuvent être isolés du profil géothermique complet et être utilisés pour reconstituer l’historique des températures à la surface du sol», indique Carolyne Pickler.
Bien que le réchauffement soit généralisé et persistant en Amérique du Nord, la hausse de température varie selon les régions. «Les tendances moyennes de la température à la surface du sol, reconstituées pour sept régions climatiques différentes, suggèrent une plage de réchauffement de 0,5 à 2,0 °C, précise la doctorante. Toutes les régions ont connu une augmentation de la température, mais le réchauffement a été plus marqué dans les régions arctiques, lesquelles sont davantage vulnérables.»
Indicateurs paléoclimatiques
Pour mieux cerner les variations potentielles du système climatique, les chercheurs étudient ses variations antérieures. Ces informations climatiques peuvent ensuite être utilisées pour déterminer la fiabilité des projections des changements climatiques.
Comme ils ne peuvent pas reculer dans le temps et que les enregistrements météorologiques globaux remontent, dans le meilleur des cas, à 150 ans, «les spécialistes du climat doivent s’appuyer sur des mesures de température indirectes, c’est-à-dire sur des indicateurs paléoclimatiques, tels que l’accumulation de pollen, les carottes de glace et les anneaux de croissance des arbres», note Carolyne Pickler.
La variation verticale des températures souterraines, mesurée notamment à partir de forages d’exploration minière dans différentes zones continentales, constitue une autre source d’information sur les changements climatiques passés.
Selon la doctorante, les travaux de son équipe de recherche ont montré, de façon concluante, qu’il est possible de documenter le réchauffement climatique dans le sous-sol continental nord-américain. «Le réchauffement en Amérique du Nord ne montre aucune ambiguïté au cours des deux derniers siècles, affirme Carolyne Pickler. Nos résultats, ainsi que d’autres données paléoclimatiques, seront utiles pour les modèles de simulation climatique actuels, qui cherchent à établir des projections futures et à mieux comprendre les conséquences potentielles du changement climatique.»