Série Dans les coulisses de l’UQAM
Des employés de l’UQAM, ceux qui, dans les coulisses, assurent le bon fonctionnement de l’Université, parlent de leur rôle au sein de notre institution.
Toutes les personnes qui ont fréquenté un jour ou l’autre le Centre sportif de l’UQAM connaissent Jacques Mainguy. On pouvait l’apercevoir derrière le comptoir de prêt en train de se dévouer corps et âme pour que les usagers aient l’équipement nécessaire à la pratique de leur sport favori, ou encore dans les gymnases, en train de préparer les terrains de basketball, de hockey cosom ou de badminton.
Le 30 avril prochain, l’homme de 75 ans prendra sa retraite après plus de 40 ans au service de l’Université: 41 ans et 256 jours pour être exact, comme le précise la plaque commémorative qu’il a reçue lors de «sa» soirée de reconnaissance, le 3 mars dernier, à la mi-temps d’un match de basketball des Citadins. «Cette soirée fut la plus belle de ma carrière, admet-il avec émotion. Un ancien joueur de l’équipe de basket m’a pris dans ses bras, un collègue m’a acheté de la bière à 67 calories – sa bière favorite – et la sœur d’Olga Hrycak m’a cuisiné une tarte aux pommes! Tous ces témoignages d’amour et ces petites attentions m’ont beaucoup touché.»
Juste, rigoureux et protecteur
Ses collègues, les joueuses de l’équipe féminine de basketball – qu’il appelait ouvertement ses «préférées» –, et même l’entraîneuse-chef Albena Branzova le surnommaient affectueusement Papa Jacques. Ce sobriquet illustrait à merveille ses traits de caractère: juste, rigoureux, protecteur et dévoué à ceux qu’il considérait comme sa deuxième famille.
Le surnom Papa Jacques lui a été donné il y a une quinzaine d’années par une étudiante employée à temps partiel avec qui il travaillait au comptoir de prêt. «Elle se faisait draguer sans arrêt par un joueur de hockey cosom, raconte-t-il. Pour qu’il arrête de l’achaler, elle m’a demandé de me faire passer pour son père. J’ai dit au gars: “Ma fille t’a dit de la laisser tranquille, alors laisse-la tranquille”. Ça a fonctionné, puisqu’il ne l’a plus jamais importunée!»
Homme au cœur d’or, Jacques Mainguy était reconnu pour sa grande générosité. «Quand mes préférées remportaient une victoire, il m’arrivait de leur apporter des pounchkis – beignets polonais – ou des chocolatines, parce que je savais qu’elles en raffolaient», dit-il. Sa générosité lui était bien rendue. «Lorsqu’une joueuse terminait un entraînement et voyait que j’étais débordé, elle se précipitait derrière le comptoir de prêt pour me donner un coup de main, même si elle n’était pas payée.»
Du Centre Paul-Sauvé au Centre sportif
Le sport a toujours occupé une place importante dans la vie de Jacques Mainguy. Dans sa jeunesse, il passait des journées entières à jouer au hockey dans la rue. Il a occupé un de ses premiers emplois, au début des années 1960, comme concierge au Centre Paul-Sauvé, un amphithéâtre qui accueillait des événements culturels, politiques, mais surtout sportifs. C’est là qu’il a rencontré les plus grands noms de la lutte: Maurice Mad Dog Vachon, Johnny Rougeau, Édouard Carpentier. Il en profitait aussi pour discuter avec Claude Mouton, qui commentait les compétitions cyclistes avant de devenir la voix officielle des Expos et du Canadien de Montréal. «Je ne gagnais pas une fortune, je travaillais très fort, mais j’étais heureux de me trouver dans un milieu sportif.»
Son association avec l’UQAM commence en 1974. Il était surintendant d’entretien à la Palestre nationale – un lieu-culte pour le sport amateur depuis 1919 – lorsque l’Université a acheté l’édifice de la rue Cherrier pour y installer son Service des sports. Le nouveau directeur du pavillon Latourelle – la Palestre nationale avait été renommée ainsi par l’UQAM lors de son acquisition – offre au surintendant le poste de préposé au prêt d’équipement. «J’ai sauté sur l’occasion parce que ça me permettait de me rapprocher encore plus du sport», dit celui qui jouait régulièrement au racquetball et au badminton après les heures de travail.
En 1986, le pavillon Latourelle devient le pavillon de Danse. Le Service des sports déménage à l’École de technologie supérieure, où Jacques Mainguy travaillera de 1986 à 1997, année où le Service s’installe dans l’édifice actuel de la rue Sanguinet. «J’ai toujours fait mon travail avec amour et passion, à 35 ans comme à 75 ans, dit-il. L’esprit de famille qui régnait entre les employés, les usagers et les cadres m’a fait sentir que j’étais apprécié.»
Père, grand-père et arrière-grand-père
Si Papa Jacques représente une figure paternelle pour ses collègues, il est également le père de neuf enfants issus de deux unions, aujourd’hui âgés de 23 à 51 ans. Ses enfants lui ont donné 15 petits-enfants et quatre arrière-petits-enfants.
«Chaque été, je reçois toute ma gang à souper, du plus jeune au plus vieux, même mon fils qui demeure dans l’Ouest canadien», dit celui qui a nommé deux de ses enfants comme marraine et parrain de ses deux plus jeunes.
Une retraite difficile à accepter
Jacques Mainguy avoue qu’il sera très émotif le 30 avril. «Quand j’ai signé mes papiers de retraite, ça m’a pris beaucoup de temps à accepter que je devais passer à autre chose, dit-il la gorge nouée par l’émotion. Je vais m’ennuyer du contact humain, des câlins, des claques amicales. Une partie de moi s’en va.»
A-t-il des projets pour sa retraite? «Ma femme et moi aimons beaucoup visiter les musées et les marchés aux puces, et nous aurons enfin du temps pour le faire. Mais je vais revenir de temps à autre faire mon tour au Centre sportif pour achaler mes collègues du comptoir de prêt ou voir des matchs de basketball. Tu ne peux pas fermer le livre des 41 dernières années de ta vie d’un seul coup.»