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Rédiger en paix

Des étudiants de maîtrise et de doctorat se réunissent pour des retraites de rédaction.

Par Pierre-Etienne Caza

9 novembre 2015 à 15 h 11

Mis à jour le 9 novembre 2015 à 15 h 11

Photo: iStock

Rédiger un mémoire ou une thèse n’est pas chose facile. Certains, dont plusieurs parents-étudiants, peinent à trouver des moments calmes pour se mettre au travail. Les doctorantes en éducation Émilie Tremblay-Wragg  (UQAM) et Sara Mathieu-Chartier (Université de Montréal) proposent une activité qui plaira à bon nombre de leurs collègues: une retraite de rédaction. Populaire aux États-Unis, le concept est encore méconnu au Québec. L’idée: louer un endroit calme et paisible afin de permettre à des étudiants de rédiger en paix, sans distraction, pendant deux ou trois jours.

La première édition de «Thèsez-vous?» a réuni 40 étudiants au printemps dernier au Camp De-La-Salle, à Saint-Alphonse-Rodriguez, dans la région de Lanaudière. «Ce fut un succès et les étudiants ont manifesté leur désir de répéter l’expérience», souligne fièrement Émilie Tremblay-Wragg. Ce début prometteur a incité les deux doctorantes, qui se sont rencontrées lors de leur maîtrise à l’UQAM, à formaliser leur démarche en créant un organisme à but non lucratif nommé  Blitz Paradisio. David Gobeille-Kaufman, conseiller en marketing, et Marie-Ève Ferland, avocate et conseillère juridique, se sont joints à elles dans l’aventure.

Retraite de rédaction 101

Ce type de retraite permet aux étudiants de cycles supérieurs de briser l’isolement, affirme Christian Bégin, professeur au Département de didactique. «Le processus de rédaction est ardu et pouvoir discuter des difficultés que l’on rencontre avec des pairs qui partagent notre réalité est précieux», souligne celui-ci.

L’équipe de Blitz Paradisio. De gauche à droite: David Gobeille-Kaufman, Sara Mathieu-Chartier, Marie-Ève Ferland et Émilie Tremblay-Wragg.

Lors de la première édition de «Thèsez-vous?», Christian Bégin a animé un atelier portant sur les étapes préalables à une retraite de rédaction productive. «Il faut se fixer des objectifs réalistes, explique-t-il. Il faut planifier ce que l’on veut écrire, autant en termes de contenu que de longueur. Et on devrait idéalement se fixer une plage de temps pour chaque objectif.»

Les participants doivent donc avoir lu et annoté les documents pertinents à leur recherche. «Il n’est pas question de brasser de la paperasse lors de la retraite, note en riant Émilie Tremblay-Wragg. On doit consacrer son temps à la rédaction.»

Le professeur Bégin souligne l’importance d’établir un horaire précis qui délimite les périodes de rédaction et les périodes de repos. «Un encadrement serré favorise la production», note-t-il. Voilà un conseil que les organisatrices n’oublieront pas. «Lors de la retraite, nous avons eu le malheur de déplacer un atelier dans le temps. Erreur! Certains participants avaient prévu se récompenser en marchant dans la nature après avoir bien travaillé et on venait bousiller leur plan. Nous ne toucherons plus aux horaires!», rigole Émilie Tremblay-Wragg.

Les pauses que l’on s’accorde dans le processus de rédaction font effectivement partie intégrante de la routine. «Si on atteint un objectif, il ne faut pas débuter une autre tâche immédiatement. Il faut plutôt prendre le temps de savourer ce succès», souligne Christian Bégin, qui a été impressionné par la discipline dont ont fait preuve les participants.

Direction: Val-Morin

La seconde édition de «Thèsez-vous?» aura lieu du 8 au 10 décembre prochains au Couvent Val-Morin, dans les Laurentides. «Tous les étudiants de maîtrise et de doctorat sont les bienvenus, peu importe leur discipline et leur université d’attache», indique Émilie Tremblay-Wragg.

Quarante places sont disponibles et le coût du séjour est de 200 dollars, incluant le logement, la nourriture et les ateliers. Les participants ont accès à des salles avec Wi-Fi et à d’autres sans. «Ces dernières ont été très populaires lors de la première édition, raconte Émilie Tremblay-Wragg. Les participants étaient concentrés et ne voulaient pas avoir de distractions.»

Au programme: 17 heures de rédaction,  un atelier de préparation et un autre atelier donné par Geneviève Belleville, auteure de Assieds-toi et écris ta thèse!, paru l’an dernier aux Presses de l’Université Laval. L’ouvrage, rédigé dans un style coloré et humoristique, propose des stratégies pour écrire de façon régulière et se garder motivé pendant la rédaction d’une thèse. «Il y aura également une professeure spécialisée en counseling qui sera disponible pour des rencontres individuelles lors de la deuxième journée», ajoute la jeune chercheuse.

«Pour les gens qui ont une tendance à la procrastination et qui manquent de discipline, ce type de retraite est une façon efficace de déclencher la rédaction et de se créer un momentum», affirme Christian Bégin. D’autres en profitent pour conclure leur aventure. «Une maman a mis le point final à son mémoire lors de la première édition. Elle nous a avoué, reconnaissante, qu’elle n’aurait jamais pu s’offrir trois jours de rédaction à la maison», souligne fièrement Émilie Tremblay-Wragg.

Comme elles souhaitent que les retraites soient accessibles au plus grand nombre, les organisatrices sont à la recherche de partenariats. «Que ce soit en rapport avec l’organisation – hébergement, repas, livres de référence et matériel de rédaction –, le financement (des offres de bourse, par exemple) ou la visibilité, nous cherchons à conclure des ententes avec différentes organisations et entreprises», indique Émilie Tremblay-Wragg.