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Un fleuron du patrimoine industriel

Le Laboratoire d’histoire et du patrimoine de Montréal propose une exposition sur les marinades et confitures Raymond.

Par Claude Gauvreau

2 novembre 2015 à 16 h 11

Mis à jour le 3 novembre 2015 à 16 h 11

Les marinades Raymond ont marqué les mémoires de plusieurs générations.
Image: Écomusée du fier monde

Qui se souvient des marinades Raymond? Ces produits ont fait le bonheur de nombreuses familles québécoises pendant près de sept décennies. L’exposition Confitures et marinades Raymond: faites pour plaire!, présentée à l’Écomusée du fier monde depuis le 29 octobre  jusqu’au 14 février prochain, s’appuie sur une recherche dirigée par Joanne Burgess, professeure au Département d’histoire et directrice du Laboratoire d’histoire et de patrimoine de Montréal (Lhpm).

Des photographies, des publicités, des objets, des témoignages et des reconstitutions numériques mettent en valeur l’entreprise montréalaise Alphonse Raymond Ltée, qui a dominé son secteur d’activités pendant une bonne partie du 20e siècle, tout en racontant l’histoire des hommes et des femmes ayant contribué à son essor. «Nous avons intégré des récits de vie de résidents du quartier, lesquels ont été nombreux à travailler dans cette entreprise, certains dès l’âge de 12 ans», rappelle Nathalie Charbonneau, professionnelle de recherche au Laboratoire et conceptrice de l’environnement numérique de l’exposition.

Fondée en 1905, l’entreprise Raymond s’installe sur la rue Panet dans le quartier Centre-Sud de Montréal. Elle devient dans les années 1930 la plus grande fabrique de conserves alimentaires au Québec et l’une des plus importantes au Canada. La réussite de son fondateur, Alphonse Raymond, illustre la contribution d’une génération d’hommes d’affaires canadiens-français à la croissance économique de la métropole. À son apogée, l’entreprise compte environ 200 employés permanents et 800 employés temporaires.

La décennie 1960 est difficile pour les successeurs d’Alphonse Raymond. L’entreprise ne parvient pas à s’imposer face aux grands groupes industriels et doit fermer ses portes au tournant des années 1970.

Un complexe industriel

Le complexe industriel de transformation alimentaire se compose de bâtiments d’une grande valeur patrimoniale, qui se trouvent toujours sur la rue Panet, à quelques pas de la rue Ontario. La vocation industrielle du quartier et la présence d’une main-d’œuvre abondante expliquent le choix de cet emplacement.

Usine Alfred Raymond vers 1936.Photo: Collection Centre canadien d’architecture

Le site a connu différentes phases d’expansion pour répondre à la croissance de l’entreprise. Au terme de son développement, dans les années 1950, le complexe comprend deux ensembles de bâtiments occupant la rue Panet et l’avenue Lalonde.

Bien qu’ayant perdu sa fonction d’origine, le site a conservé ses bâtiments, son immense cheminée, ainsi que sa passerelle reliant les deux parties du complexe. Même si les murs sont toujours intacts, la mémoire des lieux tend à disparaître. «Peu de gens connaissent l’histoire de ce site et l’importance qu’il a eue dans l’économie montréalaise et dans la vie des gens du quartier», souligne Nathalie Charbonneau, une spécialiste de l’informatique appliquée au patrimoine architectural.

Depuis 1995, l’Usine C, un centre de création et de diffusion pluridisciplinaire, occupe l’entrepôt et la chaufferie de l’ancien complexe. «Le travail d’architecture de l’Usine C a été pensé en fonction du respect de la vocation industrielle des bâtiments, observe la chercheuse. Il a permis de préserver une portion d’histoire du quartier et de sauvegarder une pièce importante du patrimoine montréalais.»

Environnement 3D/4D

L’exposition présente une reconstitution virtuelle de l’usine Raymond grâce à un environnement numérique interactif 3D/4D reliant des objets, des textes, des photos et des documents sonores, dont la réalisation a été financée par le Conseil de recherche en sciences humaines du Canada. Le Partenariat Montréal, plaque tournante des échanges a mis à contribution son expertise en matière d’outils numériques appliqués à l’histoire. De plus, une infrastructure de données historiques géospatialisées a favorisé la conception de cartes qui identifient les zones d’approvisionnement de l’usine.

 «Afin d’éclairer la logique du développement du site industriel et ses impacts sur le tissu urbain environnant, une borne interactive 4D permet au visiteur de parcourir le complexe architectural, de suivre son évolution au fil du temps en choisissant le lieu et l’époque qu’il souhaite observer, depuis le début du XXe siècle jusqu’aux années 1990», explique Nathalie Charbonneau.

C’est la première fois que l’Écomusée fait appel à ce type de technologie. «Au Québec, le 4D en est à ses débuts dans le domaine de la documentation et de la mise en valeur du patrimoine bâti, note la chercheuse. Le 4D repose sur le développement de moteurs de jeux vidéo de plus en plus performants, aux fonctions multiples. Ce que nous avons mis en place à l’Écomusée, au moyen des fonctions du moteur de jeu Unity, n’aurait pas été possible il y a cinq ans à peine.»

Activités gratuites

Annonce publicitaire dans le journal La Patrie, en 1915. Photo: Écomusée du fier monde

Dans le cadre de l’exposition, l’Écomusée du fier monde et le Laboratoire d’histoire et de patrimoine de Montréal organisent différentes activités destinées au grand public. Le 4 novembre, à 19 h, Nathalie Charbonneau donnera une conférence à l’Écomusée sur la modélisation 4D du complexe industriel. Un circuit urbain sera aussi organisé sur le site du complexe, le 8 novembre à 14 h, en compagnie d’Éric Giroux, historien et responsable de la recherche et des collections à l’Écomusée. Enfin, Anna Demay, candidate à la maîtrise en histoire à l’UQAM, présentera une conférence, le 29 janvier à 19 h, sur les produits et marques Alphonse Raymond.