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Cultiver l’éducation

Un symposium se penchera sur les enjeux de l’éducation au Québec depuis le rapport Parent.

Par Claude Gauvreau

28 avril 2014 à 10 h 04

Mis à jour le 17 septembre 2014 à 19 h 09

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Assurer des bases solides en littératie avant la première année du primaire est essentiel pour contrer l’analphabétisme et le décrochage scolaire, affirme Monique Brodeur, doyenne de la Faculté des sciences de l’éducation.

Boucler la boucle. C’est ce que vise le symposium intitulé Regards sur les enjeux de l’éducation au Québec depuis le rapport Parent, qui se tiendra au pavillon Sherbrooke de l’UQAM, le 30 avril prochain. Se déroulant sous la présidence d’honneur de Paul Gérin-Lajoie, premier titulaire du ministère de l’Éducation du Québec, cet événement vient clôturer la programmation d’activités organisées par la Faculté des sciences de l’éducation, visant à célébrer les 50 ans du rapport Parent. Ce document fondateur a soutenu la modernisation du système d’éducation au Québec pendant la Révolution tranquille.

Depuis septembre dernier, quatre conférences publiques à BAnQ, quatre journées d’études thématiques, un concert-bénéfice de Yannick Nézet-Séguin, une installation, La grande école, une exposition, un cahier spécial du Devoir et un numéro thématique de la revue À rayons ouverts de BAnQ ont permis non seulement de rappeler les grandes étapes ayant marqué le développement de l’éducation au Québec depuis les années 1960, mais aussi de discuter d’enjeux actuels et de se projeter dans l’avenir. «Nous avions choisi le thème général Cultiver l’éducation et nous l’avons développé à la manière uqamienne, c’est-à-dire de façon collégiale avec nos partenaires, dit Monique Brodeur doyenne de la Faculté des sciences de l’éducation. Les activités de célébration ont favorisé la réflexion sur l’héritage légué par le rapport Parent et ont même incité plusieurs personnes à lire ce document pour la première fois.»

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Monique Brodeur. Photo: Nathalie St-Pierre.

Le symposium du 30 avril, organisé par la Faculté des sciences de l’éducation en collaboration avec l’Université du Québec, le Centre de transfert pour la réussite éducative du Québec (CTREQ) et l’Association des étudiantes et étudiants en sciences de l’éducation, sera davantage axé sur les défis actuels. Le sociologue Guy Rocher, membre de la célèbre Commission Parent, prononcera la conférence d’ouverture intitulée «Vœux pour l’éducation». Celle-ci sera suivie de tables rondes regroupant des acteurs des milieux communautaires, scolaires et universitaire, ainsi que d’ex-présidents et présidentes du Conseil supérieur de l’éducation, lesquels parleront des avis de cet organisme qui ont marqué l’histoire de l’éducation au cours des 25 dernières années. Claude Lessard, président actuel du Conseil, présentera la conférence de clôture et le Conseil des diplômés de la Faculté remettra son prix d’engagement en éducation. 

De nouveaux défis

Selon Monique Brodeur, les recherches relatives à l’éducation sont essentielles pour relever les nombreux défis qui se posent dans ce domaine. «Le drame de l’analphabétisme, par exemple, nous oblige à agir, dit-elle. En 2003, le Canada comptait 42 % d’analphabètes et le Québec, 49 %. En 2013, les taux atteignaient 49 % dans l’ensemble du pays et 53 % au Québec.» Quand on a de la difficulté à lire, ce n’est pas parce que l’on a désappris, note la doyenne, mais parce que l’on n’a jamais bien appris. «Les élèves qui éprouvent des difficultés en lecture à l’âge de 7 ans sont à haut risque de décrochage, ajoute-t-elle. On sait aussi que des écarts importants dans ce domaine se manifestent entre les enfants de milieux favorisés et défavorisés dès leur arrivée à la maternelle.»

Assurer des bases solides en littératie avant la première année du primaire est donc essentiel pour contrer l’analphabétisme et le décrochage scolaire, affirme Monique Brodeur. «Le projet d’implanter des maternelles quatre ans à temps plein, en milieu défavorisé, s’inscrit justement dans cette perspective, rappelle-t-elle. Heureusement, les recherches dans les domaines de l’enseignement et de l’apprentissage de la lecture ont beaucoup progressé et des ressources ont été développées permettant de diminuer significativement le nombre d’enfants éprouvant des difficultés en lecture.»

Accéder aux connaissances

Pour Monique Brodeur, assurer la réussite du plus grand nombre, en particulier des enfants venant de milieux moins bien nantis et de ceux qui ont des difficultés d’adaptation, d’apprentissage ou d’autres handicaps, implique de recourir aux connaissances issues de la recherche en favorisant leur transfert. Le hic est qu’il n’est pas facile pour les acteurs du milieu de l’éducation de savoir où et à qui s’adresser pour accéder aux connaissances de pointe pouvant éclairer les pratiques afin qu’elles soient favorables à la réussite scolaire. La recherche en éducation a progressé de façon importante depuis le rapport Parent et le transfert des connaissances est devenu un enjeu incontournable.

«Le réseau de l’éducation gagnerait à se doter d’un organisme national indépendant, une sorte de guichet unique, qui favoriserait la concertation autour de différents enjeux et rendrait accessibles les ressources et les savoirs issus de la recherche. Complémentaire au ministère de l’Éducation, au Conseil supérieur de l’éducation et au Centre de transfert pour la réussite éducative du Québec, il pourrait constituer la référence en matière d’éducation au Québec. À cet égard, nous pourrions nous inspirer d’organismes existant dans les domaines de la santé et des services sociaux», souligne la doyenne. Celle-ci cite l’exemple de l’Institut national d’excellence en santé et en services sociaux (INESS), créé en 2011, et celui de l’Institut national de santé publique du Québec (INSPQ), fondé en 1999. Le premier rassemble des savoirs et procède à des recensions d’écrits scientifiques sur des thématiques spécifiques. Le second regroupe des experts provenant des sciences de la santé et des sciences sociales qui travaillent de concert avec le réseau de la santé et les milieux de l’enseignement pour développer des connaissances et proposer des pratiques susceptibles d’améliorer la santé publique.

«Nous devons cultiver l’éducation, dit Monique Brodeur. Il faut labourer, semer et récolter au fil des saisons et de l’évolution des connaissances. Œuvrer collectivement à ce que chaque personne bénéficie de la meilleure éducation possible, tout au long de sa vie. C’est l’un des enseignements, toujours d’actualité, du rapport Parent.»