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Mobiles et Parkinson

On peut détecter les tremblements pathologiques de la maladie de Parkinson au moyen d’un téléphone portable.

Par Valérie Martin

5 septembre 2013 à 16 h 09

Mis à jour le 11 février 2015 à 9 h 02

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Photo: Nathalie St-Pierre

Utiliser son téléphone intelligent comme écran de jeu vidéo, tablette de lecture ou outil de géolocalisation est un geste courant pour les utilisateurs. Dans un avenir rapproché, ces derniers pourront avoir recours à leur appareil mobile pour recueillir, stocker et transmettre des données relatives à leur état de santé : mesures de la pression artérielle, du niveau de glucose dans le sang ou des tremblements pathologiques, par exemple. Le plus étonnant, c’est que les données obtenues afficheront le même degré de précision que les appareils médicaux traditionnels. «Les technologies portables, dont les téléphones intelligents, sont devenues des plateformes d’acquisition et de transmission de données grâce à des capteurs – ou senseurs – intégrés comme l’accéléromètre, qui permet de détecter la position horizontale ou verticale du portable», explique le professeur Christian Duval, du Département de kinanthropologie.

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Le professeur Christian Duval, du Département de kinanthropologie. Photo: Nathalie St-Pierre

Ce spécialiste des maladies neurodégénératives et de la quantification des mouvements anormaux se sert de différents capteurs de mouvements et du GPS comme instruments pour détecter les symptômes moteurs de maladies comme celle de Parkinson. «L’accéléromètre du téléphone et les appareils utilisés en clinique pour détecter les mouvements d’un patient et en mesurer l’accélération fonctionnent de la même manière, dit-il. Il était donc intéressant pour nous de vérifier la capacité des téléphones intelligents à prendre une mesure des tremblements pathologiques des gens atteints de Parkinson.»

Une démarche comparative

Le chercheur et son équipe, composée du Dr Abbas F. Sadikot, neurochirurgien et chercheur à l’Institut neurologique de Montréal, et des étudiants Jean-François Daneault (B. Sc. kinésiologie, 2007; M. Sc. kinanthropologie, 2009), candidat au doctorat en neurologie à l’Université McGill, et Benoit Carignan (B. Sc. kinésiologie, 2008; M. Sc. kinanthropologie, 2010), candidat au doctorat en biologie à l’UQAM, ont procédé à une étude comparative. Ils ont comparé les mesures des tremblements de patients de la Clinique des troubles du mouvement du Dr Sadikot obtenues à l’aide d’un accéléromètre clinique à celles générées par l’accéléromètre d’un téléphone portable. Ces dernières données ont été décodées par Carl Éric Codère, programmeur informatique et également membre de l’équipe de chercheurs.

L’étude a permis de constater que le téléphone intelligent est tout aussi capable de détecter les tremblements anormaux que l’appareil utilisé en clinique. C’est la première fois que des chercheurs ont pu démontrer que l’accéléromètre du téléphone portable a la capacité de caractériser les tremblements pathologiques et de fournir avec exactitude une évaluation clinique. «Le téléphone portable a pu déterminer avec précision les types de tremblement des patients, selon que ces tremblements apparaissent en position de repos ou durant le mouvement, comme on le fait lors de l’évaluation clinique», précise celui qui est aussi chercheur au Centre de recherche de l’Institut universitaire de gériatrie de l’Université de Montréal. «Il est maintenant possible d’obtenir un portrait complet du tremblement chez un patient à l’aide d’un téléphone portable.» Les résultats de cette recherche ont fait l’objet d’un article dans la revue Frontiers in Human Neuroscience, publié en accès libre sur le Web depuis janvier dernier.

Une application santé

Le professeur espère maintenant obtenir des fonds afin de développer une application santé, en collaboration avec des développeurs et des cliniciens. «Grâce à l’application, le patient pourrait éventuellement tester ses tremblements peu importe l’heure et l’endroit, sans avoir à se rendre dans une clinique médicale, précise Christian Duval. Les données des tests seraient ensuite enregistrées sur son téléphone et envoyées au neurologue, par SMS.»

L’application du téléphone ne remplacera pas le diagnostic posé par un médecin ou un neurologue, avertit le chercheur. «Cette application servirait avant tout d’outil de quantification, de détection, de caractérisation et permettrait de suivre des patients à distance.»