Comment décrire Lorraine Archambault? Modeste, discrète, consciencieuse, cette agente de recherche à l’Institut de recherches et d’études féministes (IREF) dégage une sorte de force tranquille. Elle veille depuis 23 ans sur le devenir de la plus importante unité académique francophone en Amérique du Nord dédiée à l’enseignement et à la recherche féministes. «Depuis la création de l’Institut, en 1990, j’ai vu défiler 9 directrices, 8 responsables à la formation, 12 coordonnatrices à la recherche et plusieurs secrétaires», dit-elle avec un sourire espiègle.
Lorraine Archambault a fait ses premiers pas à l’UQAM en 1975, à titre de commis sténodactylo au Département de physique. Elle avait 17 ans. «J’étudiais au cégep à l’époque et je cherchais un emploi pour joindre les deux bouts. Une personne que je connaissais à l’UQAM m’a conseillée de tenter ma chance et on m’a embauchée», raconte-t-elle.
Trois ans plus tard, elle est promue secrétaire de direction au Service d’animation socio-culturelle, rattaché alors aux Services à la vie étudiante. En 1986, elle devient assistante de recherche au Groupe interdisciplinaire d’enseignement et de recherche féministe (GIERF), puis agente de recherche à l’IREF. Parallèlement à son travail, elle bénéficie de bourses de perfectionnement de l’UQAM qui lui permettent d’obtenir un certificat en sciences sociales et un baccalauréat en sociologie. «Par la suite, j’ai débuté une scolarité de maîtrise en sociologie que j’ai interrompue pour aider à la mise sur pied de l’IREF», souligne l’agente de recherche.
C’est par hasard, dit-elle, qu’elle s’est retrouvée à l’IREF. «Mon engagement pour le féminisme a grandi dans la pratique, au contact de femmes formidables qui consacraient beaucoup de temps à développer ce nouveau champ d’études et pour lesquelles j’avais une grande admiration.» Au fil du temps, elle tisse des liens étroits avec les chercheuses Anita Caron, Évelyne Tardy, Louise Vandelac, Francine Descarries, Karen Messing et Donna Mergler. «Je suis très attachée à l’Institut. Pour moi, c’est d’abord un projet collectif, un lieu de solidarité et de convivialité.»
Soutenir la mission de l’IREF
Lorraine Archambault a contribué à définir la mission de l’IREF en collaborant à la rédaction de ses statuts et règlements et a participé à la création du certificat et des concentrations en études féministes dans une quinzaine de disciplines, à tous les cycles d’études. «J’ai appris à connaître les rouages associés au processus de mise en place de programmes et de cours. Faire cheminer les dossiers à travers les différentes instances est une tâche parfois complexe qui exige patience et persévérance. Je suis fière que l’on soit parvenu à boucler la boucle en matière de formation. Le chemin a été long depuis la création de la concentration de premier cycle, en 1989, jusqu’à celle de troisième cycle, en 2009, aujourd’hui intégrée dans les programmes de doctorat en études littéraires, histoire de l’art, psychologie, histoire, science politique, sciences des religions et sociologie.»
Quoi d’autre ? L’agente de recherche veille aussi au développement du site Internet de l’IREF, coordonne la publication de son Bulletin et le concours pour le prix du meilleur mémoire en études féministes et assure la diffusion du bulletin électronique IREF-INFO, destiné aux 300 membres et partenaires de l’Institut. Sur le plan de la recherche, elle a collaboré avec des professeures à la publication de trois ouvrages et actes de colloque: Thérèse Casgrain : une femme tenace et engagée (1993), Les Bâtisseuses de la Cité (1993), qui a remporté le Prix Laura-Jamieson de l’Institut canadien de recherches sur les femmes, et Mots et espaces du féminisme (2001).
Elle a enfin soutenu activement la création de la revue étudiante Féminitudes. «Plusieurs étudiantes découvrent le féminisme à l’UQAM, observe-t-elle. L’autre jour, une chargée de cours m’a confié que le cours d’introduction à la pensée féministe, qu’elle avait suivi lorsqu’elle était étudiante en histoire, avait joué un rôle déterminant dans son parcours personnel et professionnel.»
Un devoir de réserve
Lorraine Archambault a été témoin de plusieurs débats au sein du mouvement féministe, mais s’est toujours imposé un devoir de réserve à son travail. «Mon rôle ne consiste pas à prendre position sur des questions comme la légalisation de la prostitution ou la Charte de la laïcité, ni à porter un jugement sur les idées défendues par les membres de l’IREF. Celui-ci doit être ouvert aux divers courants de pensée féministe. Cela dit, je suis aussi une citoyenne qui a ses propres idées et qui les défend quand cela est nécessaire.»
L’agente de recherche est aussi très attachée à l’UQAM, qu’elle a vu grandir au cours des 35 dernières années. «L’UQAM n’a peur de rien, elle est audacieuse. Mais j’aimerais qu’elle valorise davantage les contributions de ses employés de soutien à la vie universitaire. Il faut œuvrer à moins hiérarchiser les rapports entre les individus. C’est bien de reconnaître les contributions en donnant des prix, mais ce n’est pas suffisant. La valorisation doit se faire au quotidien, en encourageant les efforts et en soulignant les bons coups de chacun.»
Lorraine Archambault dit avoir apprécié les dernières allocutions du recteur Robert Proulx, dans lesquelles elle a perçu une volonté d’ouverture. «Dans son discours de la rentrée, je l’ai entendu citer des noms d’employés de soutien pour souligner l’importance de leur rôle à l’Université. Je crois que c’est une première à l’UQAM et je trouve ça rafraîchissant.»