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Danse technologique

Martine Époque et Denis Poulin utilisent la capture de mouvement pour créer CODA, une chorégraphie nouveau genre.

Par Benjamin Tanguay

9 décembre 2013 à 15 h 12

Mis à jour le 17 septembre 2014 à 20 h 09

À l’écran, des points lumineux tournoient sur la musique du Sacre du printemps d’Igor Stravinsky. Ensemble, ils suggèrent la forme d’un danseur qui se déplace tantôt sur une banquise, tantôt dans une forêt en flammes. Grâce à ces particules de lumière, les mouvements du personnage prennent tour à tour différents attributs : on devine parfois l’eau, la glace, le feu ou encore le bois.  «CODA est un film de 9 minutes qui montre la danse d’une façon différente, c’est-à-dire que le corps du danseur est délaissé au profit du mouvement traité sous forme de particules», explique Denis Poulin, professeur associé au Département de danse, à la tête de ce projet avec la chorégraphe et professeure émérite Martine Époque.

Basée sur une thématique écologique, cette chorégraphie est unique en son genre. «CODA est une première mondiale dans le sens où il s’agit d’une vidéo de danse faite à partir de la capture du mouvement», lance Martine Époque. Cette vidéo est le fruit d’un travail d’équipe important. L’œuvre musicale est jouée dans sa version pour piano par les sœurs jumelles Mehrshid et Hourshid Afrakhteh, qui font un doctorat en études et pratique des arts sur Stravinsky. En plus des musiciennes et de nombreux danseurs, plusieurs personnes et organismes épaulent Martine Époque et Denis Poulin dans les aspects techniques et monétaires de cette aventure artistique.

Dans un studio de capture du mouvement, plusieurs danseurs sont habillés de noir, avec quelques petits marqueurs blancs. Une vingtaine de caméras captent la position dans le temps et dans l’espace de ces marqueurs et ces informations sont enregistrées sur ordinateur. Un logiciel permet ensuite de reconstruire un squelette animé à partir des informations recueillies. «Nous avons refusé de donner une enveloppe à notre personnage virtuel, prévient Denis Poulin. Nous avons décidé de le garder complètement transparent pour laisser les particules évoluer et réagir en fonction des mouvements du danseur.»

Virage technologique

«Nous prétendons, Denis et moi, que la danse peut prendre le virage technologique et que les outils d’aujourd’hui peuvent l’amener ailleurs», affirme Martine Époque. Le pari de cette chorégraphie: renforcer la perception du mouvement dansé en éliminant le corps du danseur. Autrement dit, changer le point de vue du spectateur par rapport à la danse. «Si je regarde le ciel à l’œil nu, j’en retire une perception, explique Denis Poulin. Si, en revanche, j’utilise un télescope, ma perception change. Avec la capture du mouvement, nous avons l’intention de faire voir la danse autrement.»

La vidéo est en majeure partie terminée, mais il reste à peaufiner quelques détails et à varier les points de vue. À court de fonds, les deux professeurs se tournent vers le sociofinancement pour amasser l’argent nécessaire à l’achèvement du projet. La campagne, qui est presque à mi-chemin de son objectif, prendra fin le 16 décembre prochain.  Denis Poulin et Martine Époque comptent terminer ce projet coûte que coûte. «Comme le téléphone n’est plus ce qu’il était, la danse peut être autre chose que ce qu’elle est encore, conclut Martine Époque. Il faut essayer de voir si elle peut envahir d’autres territoires et se montrer autrement.»