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Survivre aux changements climatiques

Le Centre ESCER participe à deux projets de recherche visant à prévoir l’impact des changements climatiques en Afrique.

Par Claude Gauvreau

6 février 2012 à 0 h 02

Mis à jour le 17 septembre 2014 à 19 h 09

La sécurité alimentaire représente le plus grand défi pour les populations d’Afrique de l’Ouest, comme pour celles du Sahel qui, lors des dernières décennies, ont connu des périodes de sécheresse et de famine. «Il est essentiel que les Africains identifient les facteurs qui les rendent vulnérables aux aléas météorologiques, hydro-climatiques notamment, souligne René Laprise, professeur au Département des sciences de la Terre et de l’atmosphère. La variabilité des précipitations, on le sait, a un impact considérable sur la production agricole.»

Le Centre pour l’étude et la simulation du climat à l’échelle régionale (ESCER), dirigé par René Laprise, participe à deux grands projets de recherche sur les changements climatiques. Le premier, le projet FACE, est un programme canadien de recherche multidisciplinaire sur l’adaptation des populations du Canada et de l’Afrique de l’Ouest aux changements climatiques. Du côté du Canada, l’équipe s’intéressera notamment aux régions du Nord du Québec, où de nombreuses infrastructures et habitations ont été construites sur le pergélisol. Cette épaisse couche de glace sous le sol est en train de fondre, remettant en cause les méthodes de construction et le mode de vie des populations. Le second projet, CORDEX (Coordinated Regional Climate Downscaling Experiment), rassemble des équipes de chercheurs de divers pays et vise à améliorer la modélisation régionale du climat. Dans ce projet, l’Afrique a aussi été ciblée comme une région prioritaire.

Ce n’est pas un hasard si le Centre ESCER participe à ces projets. Responsables du Modèle régional canadien du climat, René Laprise et ses collaborateurs s’intéressent depuis 20 ans à la modélisation des changements climatiques et à leurs répercussions, permettant à divers organismes de développer des stratégies de prévention et d’adaptation. «Nos cherchons à comprendre, au moyen de la simulation numérique, les processus physiques responsables des variations passées et appréhendées du système climatique, qu’elles soient naturelles ou causées par les activités humaines», explique le professeur.

Étudier les fluctuation naturelles

D’une durée de cinq ans (2011-2016), le projet FACE réunit, outre le Centre ESCER, le Département de géographie et la Chaire de relations publiques et de communication marketing de l’UQAM. Financé par l’Initiative de recherche internationale sur l’adaptation aux changements climatiques (IRIACC), le projet sera mené en partenariat avec l’Institut de recherche scientifique (INRS) et plusieurs universités canadiennes et africaines. «Notre rôle consistera à fournir des données concernant les prévisions hydro-climatiques, précise René Laprise. Ces dernières pourront être utilisées pour développer des approches qui tiennent compte des changements climatiques dans la conception et la gestion des ouvrages hydrauliques, dans l’aménagement des bassins versants en milieu rural et urbain, ainsi que dans la planification agricole.»

Pour établir des projections en matière de changements climatiques, les chercheurs d’ESCER analysent d’abord les fluctuations naturelles des précipitations au cours des dernières décennies, alors que les effets des changements climatiques récents n’étaient pas encore perceptibles.

Des ordinateurs toujours plus puissants

Le projet CORDEX est une initiative du Programme mondial de recherche sur le climat. Créé il y a deux ans, il vise l’amélioration des connaissances sur la modélisation climatique en comparant notamment les résultats des différents modèles existants. «La modélisation est la science des approximations, dit le chercheur. Nous ne faisons pas de prédictions mais des simulations de scénarios plausibles et cherchons à réduire les incertitudes. Pour ce faire, nous avons besoin d’ordinateurs toujours plus puissants.» Les chercheurs d’ESCER ont d’ailleurs mis au point la cinquième génération du Modèle régional canadien du climat, qui permettra d’améliorer le traitement des informations à la surface de la Terre (hydrologie, végétation) et de s’attaquer aux conditions océaniques dans certaines régions.

Un modèle climatique est un énorme programme informatique conçu pour représenter les lois de la physique qui régissent le système climatique. La planète est découpée à l’aide d’un filet imaginaire fait de mailles verticales et horizontales. À chaque noeud du filet, des valeurs sont indiquées pour un certain nombre de variables (température, vent, pression humidité). Sur la base de ces valeurs et d’équations mathématiques, l’ordinateur calcule comment évoluent les variables. Les modèles peuvent ainsi prendre en compte une multitude de perturbations au cours du temps. Dans le cas d’un modèle régional du climat, le domaine de calcul est restreint à une région déterminée du globe, un continent par exemple. Cette économie de surface permet d’augmenter la précision des calculs.

«Notre modèle sera appliqué entre autres à l’Afrique, dit René Laprise. Nous visons à compléter les simulations d’ici juillet prochain, de sorte que les résultats pourront être intégrés au prochain rapport du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC), prévu pour 2013.»