En février 2010, la descente masculine des Jeux olympiques de Vancouver avait dû être reportée de deux jours en raison de chutes de neige et de pluie qui avaient endommagé la piste. Julie Thériault s’en rappelle, car quelques semaines plus tard, c’est elle qui s’élançait sur les pistes de Whistler, non pas à la poursuite d’une médaille olympique, mais pour son travail de collecte de données!
La jeune professeure, embauchée au Département des sciences de la Terre et de l’atmosphère en juillet dernier, est une spécialiste des précipitations hivernales. Ses recherches doctorales, à McGill, portaient sur l’étude détaillée de la formation de la neige fondante, du grésil et de la pluie verglaçante. «J’ai ensuite eu la chance de pouvoir me joindre au projet Science of Nowcasting Winter Weather for Vancouver 2010, communément appelé SNOW-V10, piloté par Environnement Canada», raconte-t-elle.
Un an avant les Jeux, Julie Thériault s’est donc jointe à un groupe de recherche de SNOW-V10 dont le mandat principal était de déterminer l’emplacement exact de la ligne pluie-neige, c’est-à-dire la démarcation où la neige se change en pluie. «Cette ligne était située à peu près à mi-chemin du parcours de la descente», précise-t-elle.
Les types de flocons
Ce n’est toutefois pas lors de ce séjour à Whistler que Julie Thériault a dévalé les pentes. «Je suis revenue au Québec afin de soutenir ma thèse, se rappelle-t-elle, puis j’ai amorcé un postdoctorat au National Center for Atmospheric Research (NCAR), situé à Boulder, au Colorado.» Là-bas, elle a tenté de comprendre pourquoi il est parfois difficile de mesurer les précipitations de neige à l’aide des jauges traditionnelles. «Le vent fait dévier les flocons, bien sûr, mais j’ai aussi voulu tester si la grosseur ou le type de flocons influençait la collecte, explique-t-elle. J’ai donc passé l’hiver 2009-2010 dehors, sous la neige, à recueillir des flocons à côté des jauges et à les photographier.»
Ses résultats furent probants. «Un gros flocon léger tombera lentement et sera balayé plus facilement par le vent qu’un petit flocon très dense, qui lui tombera très rapidement. Tout est lié à la densité des flocons», souligne la jeune chercheuse, qui poursuit des recherches sur le sujet.
Il faut skier plus vite !
C’est au NCAR qu’elle a rencontré un chercheur qui faisait partie de la phase II du projet SNOW-V10. Elle a pu se joindre de nouveau à l’équipe de recherche qui s’est rendue à Whistler en mars 2010, durant la pause entre les Jeux olympiques et les Jeux paralympiques.
Au début du projet, Environnement Canada avait installé plusieurs stations météorologiques sur les sites de compétition, dont quelques-unes le long de la descente de ski alpin. «Celles-ci fournissent des mesures statiques prises à intervalles le long de la descente, note Julie Thériault. Pour obtenir un portrait plus précis, sur toute la longueur de la piste, nous avons dû descendre en ski! Nous avions fixé à l’un de nos bâtons un thermomètre qui relevait la température et l’humidité en temps réel. La descente nous permettait également de bien observer le type de précipitations qui tombaient le long du parcours.» La jeune chercheuse et ses collègues ont confirmé l’emplacement de la ligne de transition pluie-neige à mi-parcours de la descente et ils ont recueilli une foule d’autres données. «Nous avons travaillé dans les pires conditions, parce que nous ne sortions que lorsqu’il faisait mauvais. Un collègue m’a fait remarquer que plus je descendais rapidement, plus les données de mon thermomètre étaient justes, car ce type d’appareil a besoin d’être ventilé le plus possible. Mais je ne suis pas du tout une bonne skieuse!», raconte-t-elle en riant.
Julie Thériault prépare deux articles sur ses activités de recherche à Whistler, dont l’un pourrait être publié au cours de la prochaine année dans Pure and Applied Geophysics, qui prépare une édition spéciale consacrée au projet SNOW-V10.
Les responsables de Sotchi, la ville russe qui sera l’hôte des Jeux olympiques de 2014, seront peut-être tentés de faire appel aux spécialistes de SNOW-V10, car le climat là-bas ressemble à celui de Vancouver. «Au-delà des Jeux olympiques, ce genre de prévisions est important pour le transport en montagne, pour déterminer la visibilité et les conditions sur les routes. C’est aussi utile à plus long terme en hydrologie, car la quantité de neige tombée se répercute sur l’approvisionnement en eau potable», conclut Julie Thériault.