Awake-awoke-awoken. Begin-began-begun. Eat-ate-eaten. Ah! Ces fameux verbes irréguliers à apprendre par cœur afin de maîtriser les subtilités de la langue anglaise. Les temps changent, mais l’enseignement d’une langue seconde change très peu. Même l’approche communicative, mise de l’avant depuis quelques décennies, n’y peut rien. «Les enseignants enseignent selon une approche communicative, mais consacrent tout de même en moyenne 33 % de leur temps à l’enseignement grammatical, et ils le font souvent de façon décontextualisée à l’aide de leçons de grammaire traditionnelles qu’ils jugent indispensables à l’apprentissage de la langue seconde», note Gladys Jean, professeure au Département de didactique des langues.
Indispensables? Oui. Mais elles ennuient les élèves… autant que leurs enseignants! C’est ce que révèle une étude publiée l’automne dernier dans la revue Foreign Language Annals par Gladys Jean et sa collègue Daphnée Simard, du Département de linguistique. «Un pourcentage élevé de participants disent trouver l’enseignement de la grammaire ennuyant, mais nécessaire. Nécessaire à un point où la majorité des élèves souhaitent même faire corriger leurs erreurs grammaticales plus souvent, précise Daphnée Simard, car ils veulent parler avec le plus de précision possible.» L’étude, financée par le CRSH, a été réalisée auprès de 2 321 élèves de secondaire I à V et de 45 professeurs, dans des classes de français langue seconde et d’anglais langue seconde de la grande région de Montréal.
Certains élèves jettent-ils l’éponge par manque de motivation à cause de l’enseignement de la grammaire? «Sans doute, croit Gladys Jean. Mais peu importe les méthodes employées, il y aura toujours des élèves que nous ne pourrons pas rejoindre. Ce qui ne devrait pas nous décourager de rechercher des façons plus stimulantes d’enseigner la grammaire, de manière à ce que l’on cesse de la percevoir comme un mal nécessaire.»
Modifier l’enseignement?
Le plus ironique, c’est que les enseignants apprennent effectivement d’autres façons d’enseigner la grammaire pendant leurs quatre années de formation. «Lorsqu’ils doivent à leur tour l’enseigner, beaucoup reviennent à ce qu’ils ont eux-mêmes connu dans leur jeunesse», note Gladys Jean. Créer du matériel original qui présenterait la grammaire comme un outil au service du discours, et non seulement comme un savoir à acquérir, prend du temps. Sans compter que les enseignants doivent aussi composer avec les ouvrages didactiques disponibles et avec leurs élèves qui veulent faire de la grammaire de façon traditionnelle…
La suite du projet de recherche avait pour but de tester deux approches distinctes : une méthode traditionnelle où la règle grammaticale est enseignée à l’élève, qui doit ensuite l’appliquer, et une méthode où l’élève doit découvrir la règle à partir d’exemples ou de situations de communication. «Nos résultats laissent penser que les élèves trouvent la seconde méthode plus exigeante et que la majorité d’entre eux préfèrent l’enseignement traditionnel, même s’ils trouvent cela ennuyant», conclut Daphnée Simard. Poursuivons : Choose-chose-chosen. Read-read-read. Teach-taught-taught.