Des ouvriers de 50 ans qui retournent sur les bancs d’école après avoir perdu leur emploi, il n’y en a pas qu’au Québec. Pour permettre à la province de s’inspirer des initiatives mises en branle aux quatre coins de la planète pour aider ces travailleurs, l’UQAM a inauguré l’Observatoire compétences-emplois sur la formation continue et le développement des compétences (OCE), le 4 mars dernier.
L’OCE ne s’intéressera pas uniquement aux personnes en fin de carrière. «Le marché du travail a beaucoup évolué ces dernières années et la formation continue est maintenant une réalité pour les travailleurs de tous les âges et de tous les domaines», affirme le directeur de l’observatoire et professeur au Département d’éducation et formation spécialisées, Paul Bélanger.
Plus qu’une veille
Avec un budget de 300 000 $ réparti sur trois ans, «l’OCE sera beaucoup plus qu’une simple veille informative, souligne le directeur. Nous allons analyser les différentes initiatives concernant la formation continue réalisées en dehors du Québec pour voir en quoi elles sont intéressantes pour nous.»
L’équipe de l’Observatoire, formée de chercheurs de l’UQAM, de la TÉLUQ, des HEC, de l’Université McGill, de l’Université de Montréal et de l’Université Sherbrooke – les meilleurs du domaine, selon Paul Bélanger -, dirigera ses recherches de manière autonome en fonction des priorités identifiées par le comité d’orientation. Ce dernier sera composé d’acteurs des milieux patronaux, syndicaux et de la formation.
Si l’OCE a réussi à regrouper ces partenaires aux intérêts parfois divergents, c’est que tous comprennent l’importance du développement des compétences. «Il y a un lien indéniable entre la formation continue, la qualité des emplois et la productivité des entreprises», explique le directeur. L’amélioration constante des connaissances des travailleurs s’avère encore plus importante «en période de crise et à une époque où les compagnies se livrent une compétition à l’échelle mondiale.»
Pour fournir des informations précieuses à tous les acteurs du projet, Paul Bélanger souhaite que l’OCE organise des missions d’observation. «Par exemple, un groupe composé d’un chercheur et d’acteurs du milieu du travail pourrait partir visiter des entreprises suédoises qui expérimentent des idées novatrices. Avant de partir, le chercheur aurait préparé des dossiers, des analyses et des questions à poser. La mission serait ainsi très efficace.»
Le défi des PME
Au Québec, la formation continue représente un montant annuel de 2 milliards $. Cette somme est le fruit de la Loi favorisant le développement et la reconnaissance des compétences de la main-d’œuvre, adoptée par le gouvernement provincial au milieu des années 1990. Aussi connue sous le nom de «loi du 1 %», elle contraint les entreprises à investir 1 % de leur masse salariale en formation pour leurs employés.
Avec le temps, la portée de cette loi a cependant été diluée. «Auparavant, toutes les compagnies ayant une masse salariale supérieure à 250 000 $ devaient s’y conformer, précise Paul Bélanger. Maintenant, seules celles dont la masse salariale atteint un million $ sont concernées.» Sont donc exclues les petites et moyennes entreprises (PME), «alors que c’est là que se trouve le travail au Québec».
L’un des objectifs de l’OCE sera donc de chercher de par le monde des solutions aux difficultés qu’ont les PME à offrir de la formation continue à leurs employées. Le défi est de taille. Non seulement les PME ont des moyens financiers moindres que les grandes entreprises, «mais elles ont aussi plus de difficulté à trouver du temps pour libérer leurs salariés», explique le professeur.
La polyvalence des compétences des travailleurs des PME pose également un problème. Ces employés doivent souvent accomplir des tâches dans plusieurs domaines spécifiques. Selon le directeur de l’Observatoire, rester à jour dans chacun de ces secteurs devient alors très difficile. «Les PME ont besoin de modèles de formation qui correspondent à leurs besoins particuliers.»
L’une des solutions possibles serait de créer des mutuelles de formation où des PME se rassemblent pour subventionner le développement des employés, pense Paul Bélanger. «C’est une des nombreuses avenues que l’OCE va explorer.»