Embauchée en décembre dernier au Département de psychologie, Janie Houle incarne à merveille la relève en matière de recherche et d’enseignement à la Faculté des sciences humaines. Dynamique et enthousiaste, la jeune professeure est passionnée par son domaine de recherche, la psychologie communautaire. «Il s’agit d’une spécialité méconnue que je souhaite faire connaître aux étudiants qui débutent le bac en psycho, car plusieurs croient à tort que le seul débouché du programme est la psychologie clinique», dit-elle.
Janie Houle a fait ses premières armes en recherche sous la direction du professeur Brian L. Mishara, directeur du Centre de recherche et d’intervention sur le suicide et l’euthanasie (CRISE). «Ma thèse de doctorat portait sur le suicide chez les hommes, qui sont quatre fois plus nombreux que les femmes à s’enlever la vie au Québec», note-t-elle. Sa recherche, qui a été reçue avec intérêt au Québec et en Europe, a démontré que les hommes qui adhèrent très fortement au rôle masculin traditionnel (caractérisé par le stoïcisme, l’indépendance, l’invulnérabilité et l’agressivité) sont plus à risque de commettre des gestes suicidaires. Cette adhésion se traduit en effet par une réticence à demander de l’aide et donc par une difficulté à obtenir du soutien de l’entourage. «J’ai aussi démontré que le réseau de soutien social de ces hommes-là était épuisé, qu’il ne pouvait plus jouer son rôle de protection», ajoute la chercheuse.
L’autogestion de la santé
En attendant de déposer l’automne prochain sa première demande de chercheuse-boursière au Fonds de la recherche en santé du Québec, Janie Houle est co-chercheuse dans le cadre de deux projets subventionnés par les Instituts de recherche en santé du Canada (IRSC), lesquels sont orientés vers une meilleure compréhension de l’autogestion de la santé en lien avec la dépression. «Mes recherches ont pris une nouvelle tangente depuis mon stage postdoctoral en médecine familiale au CHUM, explique-t-elle. J’ai constaté que les médecins ont énormément de défis à relever en matière de troubles de santé mentale courants, comme la dépression et les troubles anxieux. Il y a quelques années, ces troubles étaient considérés comme transitoires, donc guérissables. Or, on les considère aujourd’hui comme des maladies chroniques – le taux de probabilité de rechute est de 85 % dans les 15 années suivant le premier épisode dépressif – et les médecins doivent les traiter différemment.»
Janie Houle se penche désormais sur ce que l’on appelle l’autogestion de la santé, «c’est-à-dire comment une personne peut s’approprier le pouvoir d’agir sur sa situation et mettre en place des changements concrets dans sa vie pour améliorer sa santé et éviter les rechutes», explique-t-elle.
Elle souhaite mieux comprendre les déterminants de l’autogestion de la santé, en adoptant une perspective de genre. «Mes recherches doctorales m’ont sensibilisée au fait que les problèmes de santé mentale ne sont pas vécus de la même façon par les hommes et les femmes et que nous devons en tenir compte dans les interventions.»
Les déterminants de la santé ne sont pas qu’individuels, précise cependant la jeune femme. La famille, la communauté et le réseau de la santé font partie du problème autant que de la solution! «Pourquoi soigner les personnes si c’est pour les renvoyer ensuite dans l’environnement qui les a rendues malades?, demande-t-elle. Il est important de créer des environnements favorables à la santé.»
Les sciences humaines en 2010
«L’interdisciplinarité est au cœur de ma démarche de recherche et je travaille pour favoriser l’application des connaissances dans la pratique. Les résultats doivent être pertinents pour les gens sur le terrain, alors mieux vaut les impliquer dès le départ», explique la chercheuse, dont les deux projets impliquent médecins de famille, psychiatres, endocrinologues, infirmières, travailleurs sociaux et nutritionnistes. Ces projets sont également dotés de comités conseils composés des représentants des personnes atteintes, des représentants des organismes communautaires et des décideurs du réseau de la santé.
Pertinentes, les sciences humaines, en 2010? Janie Houle n’en doute pas une seconde! «L’Organisation mondiale de la santé considère la santé comme un état de bien-être psychologique, social et physique, qui va au-delà de l’absence d’une maladie. Les deux recherches dans lesquelles je suis impliquée sont complémentaires avec les sciences de la santé et ont pour but de contribuer au bien-être des individus», conclut-elle fièrement.