Série Cinquante ans d’histoire
L’UQAM, qui célèbre son 50e anniversaire en 2019-2020, a déjà beaucoup d’histoires à raconter. La plupart des textes de cette série ont été originalement publiés de 2006 à 2017 dans le magazine Inter. Des notes de mise à jour ont été ajoutées à l’occasion de leur rediffusion dans le cadre du cinquantième.
Enfin! En 1979, 10 ans après sa création, la jeune Université du Québec à Montréal allait disposer de son propre campus. Fini le temps des cours offerts dans 14 édifices vétustes répartis sur cinq kilomètres! Les secteurs des arts, des lettres, de l’économie et des sciences humaines allaient se retrouver réunis dans des bâtiments flambant neufs, installés en plein cœur de la ville, juste au-dessus de la station de métro Berri-de-Montigny (aujourd’hui Berri-UQAM).
«Il était très important que l’UQAM soit reliée au réseau du métro, rappelle l’historienne de l’architecture France Vanlaethem, professeure à l’École de design [aujourd’hui professeure émérite]. Cela faisait partie du projet initial de construire une université ouverte sur la ville et ses habitants.»
L’architecture du campus central, avec ses passages piétonniers qui rayonnent à partir de la station de métro, ses commerces, sa galerie, son café-terrasse et sa bibliothèque, était conçue pour que les Montréalais circulent à travers l’université et se mêlent à la population étudiante.
On voit dans ce concept des architectes Dimitri Dimakopoulos et Jodoin, Lamarre, Pratte «la volonté de créer une université nouvelle, ouverte sur le milieu et non enfermée jalousement dans une tour d’ivoire comme c’est le cas pour les universités traditionnelles», lit-on en 1975 dans la revue Architecture Concept.
Une intégration réussie
«Le projet a été très bien reçu dans les revues d’architecture de l’époque», souligne France Vanlaethem. En 1980, les architectes du campus central remportent d’ailleurs le prix d’excellence de l’Ordre des architectes pour les pavillons Judith-Jasmin et Hubert-Aquin.
L’intérêt du projet, selon l’historienne, réside entre autres dans son découpage vertical par strates fonctionnelles, avec l’étage du métro consacré à la circulation, aux espaces publics et parauniversitaires, les étages intermédiaires dédiés à l’enseignement et aux services, et les étages supérieurs aux ateliers, laboratoires et départements.
À l’époque, on admire particulièrement le fait d’avoir conservé et intégré à la nouvelle construction le clocher et le transept sud de l’église Saint-Jacques, de même que les boiseries de la sacristie (la Salle des boiseries sert aujourd’hui de lieu de réception pour de nombreux événements uqamiens et même pour la célébration de mariages civils) et la chapelle Notre-Dame-de-Lourdes. On souligne que l’architecture respecte l’échelle du quartier, plus basse du côté de la rue Saint-Denis et un peu plus élevée du côté de la rue Berri. Malgré l’ampleur de la première phase – un million de pieds carrés –, on trouve que le complexe ne choque pas par son monumentalisme et on apprécie même le revêtement de briques brunes! «Solution heureuse non seulement du point de vue coût, mais aussi si l’on considère la prolifération récente des édifices gris de béton à Montréal», note la revue Architecture Concept.
«Ce complexe architectural, parfois malaimé, est un bon témoin de son époque, affirme France Vanlaethem. Il représente la fin d’un certain modernisme et un souci pour le patrimoine.»
Tout un chantier
Le projet de construire un campus pour l’UQAM existe depuis les tout débuts. En 1969, le recteur Léo A. Dorais déplore que son institution soit une «université invisible, éparpillée à travers une série de locaux». Dès la fin de 1971, l’UQAM commence à faire l’acquisition de terrains dans le quartier Berri-de Maisonneuve. En septembre 1972, le conseil d’administration adopte le plan directeur du nouveau campus. Mais le projet est lent à prendre forme, au point qu’en septembre 1974, le journal L’UQAM s’interroge : «Le projet du nouveau campus est-il mort?» Les travaux débutent finalement en janvier 1975. Toute une entreprise. La construction de la première phase du campus central sera un temps le plus gros chantier du Québec après celui de la Baie-James!
L’inauguration officielle des pavillons Judith-Jasmin et Hubert-Aquin, à la rentrée de l’automne 1979, est vécue comme une nouvelle naissance par l’UQAM. Mais ce n’est que la première phase du campus unifié. Une dizaine d’années plus tard, on construira le pavillon Thérèse-Casgrain, ce qui permettra de quitter définitivement l’ancien pavillon Read, puis le pavillon de l’Éducation, celui de la Musique et celui des Sciences de la gestion.
En 1992, la direction et les services administratifs de l’UQAM peuvent s’installer au pavillon Athanase-David, fraîchement rénové, qui donne sur la place Pasteur. En 1996, le prix d’excellence de l’Ordre des architectes récompense de nouveau la réalisation d’un pavillon de l’UQAM, le pavillon de Design dessiné par Dan Hanganu et construit rue Sanguinet, à l’arrière du pavillon Athanase-David.
Les travaux du campus central s’achèvent en 1999 avec l’inauguration du pavillon J.A.-DeSève, relié aux autres par un couloir souterrain qui traverse la rue Sainte-Catherine. Le concept de ce pavillon moderne et baigné de lumière naturelle a été élaboré par la firme Provencher, Roy et associés. Le pavillon a reçu un prix Orange de l’organisme Sauvons Montréal pour l’architecture de sa place publique.
Source:
INTER, magazine de l’Université du Québec à Montréal, Vol. 7, no 2, automne 2009.