Les blogues ont la cote depuis quelques années et ce phénomène, peu étudié jusqu’ici, a piqué la curiosité du professeur Christian Agbobli, du Département de communication sociale et publique. Ce dernier a obtenu une petite subvention du Programme d’aide financière à la recherche et à la création (PAFARC) afin d’embaucher trois étudiantes pour fouiller un peu le phénomène. Leur question de départ était : «À quels besoins communicationnels répondent les blogues?»
Par leur aspect interactif, les blogues représentent l’essence même du Web 2.0. «Un blogue est un journal de bord où l’auteur publie des billets assez régulièrement à propos d’un aspect de sa vie, d’un intérêt ou de compétences qu’il possède, explique Alice Mihaly, candidate à la maîtrise en communication. Les internautes peuvent lire les billets et les commenter. Plus un blogue est commenté, plus il attire de lecteurs.»
«Les blogues bouleversent le modèle communicationnel enseigné jusqu’à maintenant, composé d’un émetteur, d’un message et d’un récepteur, explique le professeur Agbobli. Le récepteur devient désormais un participant à part entière dans la construction de l’information.»
Se faire entendre
Apparus aux États-Unis dans les années 1990, les blogues se sont multipliés à partir des élections présidentielles de 2004. Plusieurs blogueurs politiques ont en effet saisi l’opportunité qu’offre le Web de se faire entendre et d’entrer en interaction avec des lecteurs. «Même au Québec, c’est en campagne électorale que l’on utilise le plus les blogues, note Christian Agbobli. On observe toutefois un paradoxe à leur sujet : on en parle de plus en plus dans les médias traditionnels, mais leur impact réel en termes de popularité n’est pas encore significatif.»
Une partie de la recherche menée par l’étudiante Marie-Ève Barbeau, candidate à la maîtrise en communication, a permis de cibler quatre types de blogues, lesquels répondent à des besoins communicationnels distincts.
Il y a d’abord les blogues personnels, sur le mode du journal intime. «Ceux-ci dénotent un besoin de témoigner de son quotidien, de partager avec autrui, mais aussi de se faire réconforter, d’interagir avec des gens qui ont vécu ou qui vivent la même chose que soi», explique Alice Mihaly.
Le deuxième type regroupe les blogues d’adolescents, qui poursuivent avec leurs amis les conversations de la journée. «Ce sont ces deux types de blogues qui ont le plus de succès», précise l’étudiante.
On retrouve ensuite les blogues spécialisés, appelés blogues de communautés de pairs. Ils portent sur des sujets très pointus dans des domaines variés : photographie, musique, littérature, mécanique automobile, etc. Les trois chercheuses sont tombées, par exemple, sur un blogue portant sur la vie de transsexuels indiens vivant aux États-Unis.
Enfin, on retrouve le blogue dit d’énonciation citoyenne, qui souhaite rassembler les gens autour de questions sociales, politiques, économiques ou environnementales. Les blogues politiques et les blogues journalistiques se situent dans cette catégorie.
Les communautés culturelles
Cet automne, le professeur Agbobli souhaite déposer une demande de subvention afin de démarrer un projet de recherche portant sur le rôle des blogues en lien avec l’intégration des communautés culturelles au Québec. «On évoque souvent l’importance d’obtenir un emploi pour assurer l’intégration économique d’un immigrant, mais qu’en est-il de l’intégration citoyenne? Comment la mesurer?», demande-t-il.
Le rôle d’Internet dans l’intégration des communautés culturelles au Québec sera l’objet du projet de mémoire d’Alice Mihaly. «Je souhaite me pencher sur les nouveaux arrivants colombiens à Montréal et évaluer leur usage du Web dans une perspective d’intégration professionnelle et sociale. Est-ce qu’Internet leur permet d’interagir avec la population locale ou avec d’autres personnes dans la même situation qu’eux?» À suivre…