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2e école d’été de l’Institut des sciences cognitives

Par Marie-Claude Bourdon

12 juin 2008 à 0 h 06

Mis à jour le 17 avril 2015 à 15 h 04

Comment l’esprit humain est-il conçu pour fonctionner en société et, par effet de retour, comment la vie en société influence-elle la formation du cerveau? Voilà la grande question que se poseront les quelque 50 conférenciers et 200 participants de la deuxième École d’été de l’Institut des sciences cognitives de l’UQAM, qui se tiendra du 28 juin au 6 juillet prochains, en plein Festival de jazz. Portant sur le thème très actuel de la cognition sociale, cet événement intitulé Minds and Societies est organisé par deux professeurs du Département de philosophie, Pierre Poirier et Luc Faucher.

«Parmi les thèmes qui ont émergé en neurosciences au cours des dernières décennies, il y a celui de la moralité, indique Luc Faucher. L’une des choses qui font que nous sommes capables de vivre en grands groupes – car les êtres humains vivent en plus grands groupes que les autres primates -, c’est notre capacité à respecter des normes. On s’interrogera donc sur le rôle de la moralité et sur les facteurs de son apparition. Par exemple, on se demandera si le développement de la coopération est un facteur dans l’évolution de certaines émotions morales, comme la colère ou la culpabilité.»

Psychopathes et altruisme

Le neuroscientifique James Blair et le psychologue Daniel Batson, deux piliers de ce nouveau courant de recherche, seront présents à l’École d’été. Le premier s’intéresse aux psychopathes, antisociaux par excellence, alors que l’autre étudie l’altruisme, ce comportement étrange qui fait que l’on donne à des gens que l’on ne connaît pas. «Ce courant de recherche a été renforcé par le fait que des économistes s’y sont intéressés, ajoute le professeur Faucher. La neuroéconomie se penche sur des choses comme la confiance ou la méfiance, des émotions qui expliquent des comportements qui, logiquement, ne devraient pas apparaître chez des agents très rationnels.»

Des primatologues aborderont pour leur part la question des précurseurs de la culture chez les animaux. «Alors que nous avons toujours cru que la culture était propre à l’humain, on s’aperçoit de plus en plus que les chimpanzés ont une culture, dit le professeur. On le voit à la façon dont ils pêchent les termites, par exemple, ou à la façon dont ils s’épouillent mutuellement, qui varient d’un groupe à l’autre. Chez les dauphins, on observe des phénomènes qui ressemblent à des dialectes locaux.»

Les participants s’interrogeront aussi sur la façon dont la culture transforme l’esprit et vice-versa, dans un processus de coévolution. «Ainsi, on peut imaginer que le développement du langage, qui s’est fait progressivement, a influencé la formation du cerveau, dans la mesure où les individus qui possédaient une petite capacité pour le langage avaient un avantage sur les autres et ont eu plus de descendants», explique Luc Faucher.

Des réseaux intelligents

Alors que la première partie de l’École d’été sera consacrée au cerveau humain conçu pour fonctionner en société, sa deuxième partie traitera des communautés. Un thème important sera celui des nouveaux réseaux sociaux, comme les réseaux en ligne, de plus en plus en plus étendus et fluides. «On se demandera, entre autres, comment ces nouveaux réseaux influencent le comportement des gens, indique Pierre Poirier. Ces réseaux peuvent-ils eux-mêmes devenir des agents cognitifs? Par exemple, est-ce qu’un réseau comme Wikipédia peut faire émerger des capacités cognitives que ne posséderait aucun de ses membres?»

On s’intéressera aussi à la façon dont les nouvelles technologies de partage d’information peuvent contribuer à l’enseignement. «Certains jeux en ligne impliquent un haut niveau de collaboration entre les joueurs, observe le professeur. On essaiera ainsi de voir comment on pourrait adapter ces jeux pour créer de nouvelles pratiques éducationnelles.»

L’École d’été de cette année attire des gens de domaines aussi variés que la philosophie, la psychologie, la sociologie, l’anthropologie et l’informatique. Un tiers des participants proviennent de l’UQAM, un tiers du Canada et des États-Unis et un autre tiers d’aussi loin que la France, l’Allemagne l’Inde et le Japon. «Les sciences cognitives ont toujours été multidisciplinaires, souligne Pierre Poirtier. Mais pendant longtemps, on s’est intéressé principalement à la façon dont le cerveau fonctionnait individuellement. Aujourd’hui, on se penche de plus en plus sur les aspects sociaux de la cognition humaine.»

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