Jules Savaria a représenté le Canada au Cameroun, au Tchad et en République centrafricaine, jusqu’à l’an dernier. Plus tôt dans sa carrière, il a été ambassadeur du Canada au Burkina Faso. Son parcours l’a aussi conduit aux ambassades de la Guinée et de République Démocratique du Congo; et bien sûr à Ottawa, où il a notamment dirigé la division Afrique et Moyen-Orient de l’Agence Canadienne de Développement International (ACDI). Au cours de la prochaine année toutefois, c’est à l’UQAM, auprès de la Chaire UNESCO-Bell en communication et développement international, qu’il fera valoir son expertise.
«J’ai passé une bonne partie de ma carrière sur le terrain et j’ai été témoin des difficultés qui se posent lors du déploiement de projets de coopération, raconte Jules Savaria. Au vu de ces embûches, j’ai voulu m’arrêter, pour réfléchir aux conditions qui peuvent faire la différence entre le succès et l’échec d’un programme d’aide internationale.» L’ambassadeur a fait appel au programme Échanges Canada qui permet à des hauts fonctionnaires de passer un an au sein d’une institution d’enseignement supérieur. Il a choisi l’UQAM comme université d’accueil.
Les questions de communication pour le développement, un champ de recherche privilégié par la Chaire UNESCO-Bell, l’intéressent tout particulièrement. «Sur le terrain, j’ai constaté que les programmes d’aide étaient souvent mal expliqués et mal compris par les populations visées, note le diplomate. Cette carence peut expliquer, du moins en partie, l’échec de plusieurs interventions.»
Déclaration de Paris et communication
Avec la collaboration de Claude-Yves Charron – vice-recteur aux Services académiques et au développement technologique et secrétaire d’Orbicom, le réseau international des chaires UNESCO en communication – et de Madga Fusaro – professeure au Département de management et technologie et titulaire de la Chaire UNESCO-Bell en communication et développement international – Jules Savaria travaille à monter son propre projet de recherche. L’objectif : mieux arrimer les principes de la Déclaration de Paris, signée en 2005, aux connaissances acquises dans le domaine de la communication pour le développement.
«À mon sens, la Déclaration de Paris dresse le portrait le plus achevé des conditions qui doivent être réunies pour déployer des projets d’aide efficaces, dit Jules Savaria. Malheureusement, la question de la communication a été évacuée.»
Pays par pays
Au cours de la prochaine année, l’ambassadeur compte étudier les Documents stratégiques de réduction de la pauvreté de nombreux pays – l’adoption d’un tel document est exigée pour les pays qui veulent bénéficier de l’aide internationale – pour voir s’ils intègrent des critères propres à la communication.
«Ces documents devraient prévoir des stratégies pour rejoindre non seulement les habitants des villes, mais de toutes les régions. Ils doivent tenir compte des obstacles comme l’analphabétisme. Ils doivent aussi prévoir des structures qui permettent aux habitants d’identifier eux-mêmes les problèmes qu’ils jugent prioritaires.»
Grâce aux efforts de chercheurs comme Claude-Yves Charron, beaucoup de résultats de recherche existent déjà sur les pratiques de communication qui s’appliquent ou non dans les pays en développement. Reste à les colliger, à les diffuser et à les appliquer. Le vice-recteur ne minimise pas pour autant les obstacles qui se dressent sur le chemin de la communication pour le développement. «Bon nombre de pays en développement opèrent sous des régimes autoritaires qui ne veulent pas céder de pouvoir décisionnel aux sociétés civiles», fait-il remarquer.
Jules Savaria souligne quand même que certains pays comme le Ghana, qui célèbre ces jours-ci le 50e anniversaire de son indépendance, connaissent une liberté démocratique porteuse d’espoir. «Ces pays profiteraient assurément d’un agenda international pour l’efficacité de l’aide qui serait bonifié d’une stratégie de communication efficace.»