«Ce n’était pas prévu, mais les Français nous aiment beaucoup», commente Alessandra Mariani, éditrice de la revue Muséologies et diplômée du programme conjoint de maîtrise en muséologie de l’UQAM et de l’Université de Montréal (UdM). Avec un groupe de finissants qui désiraient diffuser leurs travaux de recherche, la jeune femme a lancé la revue l’automne dernier. Un deuxième numéro est paru, un troisième est en cours et, devant le succès obtenu, on ne songe plus à s’arrêter. D’allure très professionnelle, la revue est disponible à la librairie du Louvre, à la Réunion des musées nationaux de France et sera bientôt vendue au Centre Georges-Pompidou, en plus d’être largement diffusée dans les musées québécois.
Comment expliquer ce succès? «Il y a très peu de revues semblables en français, explique Alessandra Mariani. Pour les gens de la maîtrise et du doctorat qui font des recherches, il est donc difficile de diffuser leurs résultats, et c’est encore plus vrai en France.» La revue Muséologies, dont les articles illustrent et questionnent les pratiques muséologiques actuelles, est d’ailleurs ouverte aux travaux d’étudiants français et à ceux d’étudiants des différentes universités québécoises et canadiennes.
«Les textes de réflexion et de recherche sont accompagnés d’entrevues avec des professionnels qui oeuvrent dans les musées. Notre but est de créer une synergie entre le monde muséal et le milieu universitaire», précise l’éditrice. Et ça marche : les praticiens répondent avec enthousiasme aux demandes de la revue.
Dans le numéro deux, paru en avril dernier, une entrevue avec Louise Déry, directrice de la Galerie de l’UQAM, suit un article sur la relation entre l’art contemporain et l’institution muséale. On y trouve aussi une «Étude des programmes éducatifs offerts au public dans les jardins historiques du Québec» complétée d’un entretien avec André Bélisle, directeur du Musée du Château Ramezay. D’autres articles abordent des thèmes tels que la muséologie du spectaculaire ou la réception d’une exposition permanente présentée au Musée de la civilisation de Québec, Le temps des Québécois.
Ce n’est pas seulement la rareté des revues savantes qui se consacrent en français à la muséologie qui a fait le succès de la revue en France, mais aussi son statut de vitrine. «La muséologie québécoise est très avantgardiste, note Alessandra Mariani. Évidemment, nous ne portons pas le poids d’une tradition plusieurs fois centenaire, comme en France.»
Ce projet porté par une dizaine d’étudiants aux études supérieures, moitié de l’UQAM et moitié de l’UdM, a d’abord été une idée d’Yves Bergeron, professeur au Département d’histoire de l’art, qui n’a ménagé ni son soutien ni ses encouragements. La revue reçoit quelques subventions, entre autres de l’Institut du patrimoine de l’UQAM, et survit grâce aux revenus d’abonnement, aux ventes de numéros à l’unité, à la publicité et «à beaucoup de bénévolat», mentionne Alessandra Mariani, qui, après avoir complété sa maîtrise à l’UdM, songe sérieusement à entreprendre son doctorat à l’UQAM.