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Les nouvelles méthodes du terrorisme

Par Claude Gauvreau

26 novembre 2007 à 0 h 11

Mis à jour le 17 avril 2015 à 16 h 04

Le terrorisme international est un phénomène qui évolue constamment et penser le contraire serait dangereux, affirme Benoît Gagnon, chercheur à la Chaire Raoul-Dandurand en études stratégiques et diplomatiques. Des groupes champignons surgissent à différents endroits dans le monde, dit-il, sans avoir de liens avec Al-Quaïda, même s’ils s’inspirent parfois de son idéologie.

«L’attentat commis dans le métro de Londres en juillet 2005 n’était pas commandité par Al-Quaïda. Ses auteurs, des immigrants de seconde génération, se connaissaient depuis longtemps et étaient bien intégrés dans la société britannique.»

L’époque des terroristes de carrière, rattachés à des organisations paramilitaires, semble révolue, poursuit M. Gagnon. «Le terrorisme contemporain s’amateurise. On a de plus en plus affaire à des gens qui n’ont pas de formation militaire, ni de casier judiciaire, et qui peuvent passer à l’acte du jour au lendemain. Les méthodes changent également, alors que les explosifs sont délaissés au profit des attaques à main armée et des enlèvements.»

Un terrorisme «cyberplanifié»

On sait que les groupes terroristes adoptent des structures organisationnelles décentralisées, basées sur un fonctionnement en réseau, où les liens hiérarchiques entre les différentes cellules sont quasi inexistants.

Ce qui est nouveau, surtout, c’est l’utilisation de plus en plus fréquente des nouvelles technologies de l’information et de la communication : Internet, téléphonie cellulaire, messagerie électronique, etc. « On peut avoir accès chez soi à des sites Internet qui expliquent comment fabriquer une bombe, précise Benoît Gagnon.

Pour établir des contacts, les terroristes ont moins besoin de se déplacer d’un pays à l’autre, ce qui, autrefois, attirait l’attention des services de renseignement. » Ainsi, l’attentat de Madrid, en mars 2004, aurait été planifié à travers des forums de discussion sur le Web, sans que les membres du groupe ne se rencontrent. C’est ce que l’on appelle la «cyberplanification».

Gérer les conséquences

Les méthodes antiterroristes que l’on utilisait pour combattre l’IRA en Irlande ou l’ETA en Espagne ne suffisent plus, dit le chercheur. «On doit avoir recours à des équipes multidisciplinaires formées de personnes polyvalentes, ayant des connaissances dans divers domaines (technologies de communication, science politique, histoire, sciences des religions, etc.) et qui travaillent en réseau… comme les terroristes. À New York, par exemple, des spécialistes du contreterrorisme parlent onze dialectes arabophones et surveillent quotidiennement différents sites Web.»

Un des objectifs du terrorisme est de semer la peur et le chaos au sein des populations. Il est donc aussi important, sinon plus, d’investir dans des mesures de gestion des conséquences que dans la prévention et la dissuasion, soutient M. Gagnon. «On ne peut être libre si on ne se sent pas en sécurité. Mais il faut aussi accepter de vivre avec le risque que représente le terrorisme.»

Contrairement à d’autres pays, le Canada n’est pas une cible de prédilection. Cela dit, ajoute l’expert, «on y observe des activités de recrutement et de financement, et certains groupes, associés à l’extrême-droite notamment, font l’objet de surveillance.» Bien qu’il faille le prendre au sérieux, le terrorisme demeure somme toute un phénomène marginal à l’échelle internationale, conclut Benoît Gagnon. « De 1968 à 2006, le terrorisme a fait au total 50 000 victimes, alors que la rage canine, en 2003 seulement, a causé la mort de 55 000 personnes dans le monde, selon les chiffres de l’Organisation mondiale de la santé.»