La Galerie de l’UQAM et le Musée d’art contemporain de Montréal (MAC) invitent le public à vive une expérience inédite avec This situation, une œuvre dite immatérielle de l’artiste britannique Tino Sehgal. Commissariée par Mark Lanctôt, conservateur responsable de la collection au MAC, This situation fait appel au code du tableau vivant pour remettre en question la perception traditionnelle de ce que doit être une exposition d’art contemporain.
Pour faire vivre l’exposition dans la grande salle de la Galerie durant ses heures d’ouverture, une vingtaine de personnes – appelées «joueuses» ou «joueurs» – provenant de différents milieux professionnels, littéraires et académiques, dont l’UQAM, ont été sélectionnées par Louise Höjer, productrice de This situation. Ces personnes se relaient pour échanger avec le public autour d’un éventail de concepts, s’engageant dans une conversation menant à une réflexion critique sur le monde actuel. Perçu comme partie intégrante de l’exposition, le public peut ainsi en influencer le déroulement.
L’immatérialité de l’œuvre de Tino Sehgal s’inscrit dans une perspective de développement durable, qui se traduit par un désir d’éviter la production de marchandises, de résister à la prolifération excessive d’objets dans le monde et de réduire autant que possible l’empreinte écologique du monde de l’art.
«La Galerie universitaire est cet espace propice à la transmission et à l’apprentissage des savoirs en art et à l’exercice passionnant de la pensée en action, souligne Louis Déry, directrice de la Galerie. En nous confiant This situation, le MAC permet à nos publics, en particulier les étudiantes et étudiants en arts visuels et médiatiques, en histoire de l’art et en muséologie, de vivre une expérience inédite.» Selon Louise Déry, cette réalisation de Tino Sehgal ouvre sur des préoccupations d’actualité pouvant marquer l’imaginaire de ceux et celles qui se sentent concernés par l’avenir de l’humain, par le rôle de l’artiste et par l’état du monde actuel.
Depuis plus de 20 ans, Tino Seghal présente ce qu’il appelle des «situations construites», faites d’instructions orales exécutées par des «joueurs» ou «interprètes», à l’intérieur de divers lieux d’exposition, incluant le Tate Modern à Londres, le Musée Guggenheim à New York, le Tai Kwun Contemporary à Hong Kong et la Bourse de Commerce de Paris. Le caractère conceptuel de sa pratique émane d’une réflexion sur ce qui constitue une œuvre d’art et d’une cristallisation de l’expérience de l’art qui, pour Tino Seghal, débouche sur une interaction entre le public et les interprètes dans des situations soigneusement chorégraphiées.
Acquise par le MAC en 2011, This situation y a été programmée une première fois lors d’une exposition consacrée à l’artiste en 2013. Depuis, l’œuvre poursuit son processus de transmission et de conservation orale.
L’exposition se déroule jusqu’au 29 mars prochain.
Rencontre avec Tino Sehgal
Louise Hojer, productrice de l’exposition et proche collaboratrice de Tino Sehgal, s’entretiendra avec deux des joueuses ou joueurs de This situation, le 25 février prochain, à la Galerie. Cette rencontre portera sur le processus de création de l’artiste.
Les 4 et 5 avril, Tino Sehgal s’entretiendra (à distance) avec Pip Laurenson, chercheuse et professeure en conservation de l’art contemporain, lors du colloque international Max et Iris Stern au Centre canadien d’architecture (CCA). Le colloque est organisé en collaboration avec le Groupe de recherche et de réflexion CIÉCO, cofondé par la professeure du Département d’histoire de l’art Marie Fraser, titulaire de la Chaire de recherche en études et pratiques curatoriales.
Une exposition hacktiviste
Dans une autre salle, la Galerie accueille, jusqu’au 29 mars, En frappant le fond de l’eau avec un bâton, on peut faire du feu sur l’eau, une exposition hacktiviste de Marion Schneider, qui termine sa maîtrise en arts visuels et médiatiques. L’exposition explore le potentiel poétique et politique de l’art numérique interactif dans une perspective queer et écologique.
L’installation de Marion Schneider invite à suspendre le temps, à apprendre à habiter le trouble de notre condition écologique et à imaginer un monde au-delà des binarismes, où tout se mélange, s’hybride et se transforme.
Baignant dans une lumière chaleureuse et enveloppée par une trame sonore mélancolique composée par l’artiste, l’exposition met en relation deux machines sensibles, façonnées à partir d’objets technologiques usagés: des tiges d’acier courbées et des pièces imprimées en 3D. L’une prend la forme d’un robot-poète ChatGPT, qui présente chaque heure des excuses à une roche, en lui dédiant un poème. L’autre, inspirée d’un pied à perfusion hospitalier, invite le public à la rendre triste pour déclencher ses larmes et permettre ainsi d’arroser une plante.
Au sein de cet espace immersif, tristesse et apaisement s’entrelacent, ouvrant la voie à une expérience intime et troublante, à la fois active et contemplative. Marion Schneider y tisse des récits où végétaux, minéraux et êtres humains se rencontrent et dessinent de nouvelles possibilités de cohabitation, dans une tentative de réparation poétique du monde.
Artiste non binaire, Marion Schneider détient un diplôme en design numérique de l’École nationale supérieure Olivier de Serres à Paris. L’artiste a exposé son travail à MUTEK, à ICRA-X, à la Place des Arts, à Art Mûr et à la Galerie de l’UQAM. Marion Schneider a reçu plusieurs distinctions, dont une mention d’honneur de l’UQAM pour son baccalauréat, la bourse d’excellence de la fondation McAbbie et le Prix Jean-Pitre et Claude-Leclerc.
Dans le cadre de la série L’art observe, la Galerie invite le public à une rencontre avec Marion Schneider, le 12 mars prochain, de 17 h 30 à 18 h 30. L’artiste parlera de sa démarche ainsi que des recherches entreprises durant ses études.
À l’occasion de la Nuit blanche à Montréal, le 1er mars prochain, la Galerie prolongera ses heures d’ouverture (19 h à minuit),