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Julie Thériault invitée au Sénat à titre de spécialiste des précipitations hivernales

La professeure a participé à un panel sur les événements météorologiques extrêmes.

Par Pierre-Etienne Caza

10 octobre 2025 à 9 h 17

La professeure du Département des sciences de la Terre et de l’atmosphère Julie Thériault a été invitée au Sénat, le 7 octobre dernier, à Ottawa, afin de participer à un panel portant sur les événements météorologiques extrêmes. Ces échanges s’inscrivaient dans le cadre du projet de loi C-241, Loi prévoyant l’élaboration d’une stratégie nationale sur la prévision des inondations et des sécheresses, déposé à la Chambre des communes le 22 septembre dernier par la députée de Terrebonne, Tatiana Auguste.

Titulaire de la Chaire de recherche du Canada en événements météorologiques hivernaux extrêmes, Julie Thériault devait éclairer les décideurs appelés à se prononcer sur le projet de loi, qui vise à fournir aux intervenants clés les renseignements dont ils ont besoin pour prévoir les inondations et les sécheresses. «J’ai d’abord souligné que nous ne sommes pas au bout de nos surprises, car il y aura d’autres événements météorologiques extrêmes au cours des prochaines années», rapporte la professeure.

Julie Thériault a aussi attiré l’attention des sénateurs sur les décalages dans le calendrier du moment auquel ces événements peuvent se produire. «Par exemple, la fonte de plus en plus précoce du manteau neigeux au printemps peut entraîner des inondations et mener à une saison des feux de forêt commençant plus tôt, comme on a vu cette année, illustre-t-elle. Un autre exemple est la tempête de verglas qui a frappé Montréal en avril 2023, alors qu’on s’attend à ce que ce type d’événements extrêmes surviennent plutôt en plein cœur de l’hiver.»

L’importance du partage de l’information

À l’heure actuelle, «les prévisions d’inondations et de sécheresses au Canada sont établies par les provinces sans coordination entre elles et avec un soutien technique limité du gouvernement fédéral», souligne le projet de loi. «Les provinces ont souvent des stations d’observation de la température, de l’humidité, du vent et des quantités de pluie, mais ces informations ne sont pas toujours disponibles facilement aux scientifiques, confirme Julie Thériault. En revanche, nous utilisons des observations détaillées, récoltées dans le cadre de nos projets de recherche respectifs, et celles-ci pourraient servir aux différents paliers de gouvernement. Une meilleure coordination et une meilleure collaboration permettrait d’augmenter la quantité et la qualité des données disponibles pour mieux se préparer aux changements climatiques.»

Il importe que tous les acteurs et les juridictions impliqués dans le dossier travaillent ensemble, car l’eau ne connaît pas de frontières géographiques, observe Julie Thériault. L’eau qui s’écoule d’un bassin versant situé dans une province peut très bien affecter le territoire d’une autre province. «Nous l’avons vu dans le cadre du projet SAJESS sur les inondations au Nouveau-Brunswick, ou avec le projet SPADE sur les précipitations au-dessus de la ligne du partage des eaux en Colombie-Britannique», illustre-t-elle.

Plus de stations météo sur le terrain

Pour améliorer la prévision des événements météorologiques extrêmes, les scientifiques ont besoin de modèles atmosphériques et hydrologiques de très haute résolution, générés par des superordinateurs, à partir de données récoltées sur le terrain, a expliqué Julie Thériault lors du panel.

Développer et maintenir une telle infrastructure de recherche est un véritable défi pour un pays vaste comme le Canada, remarque la professeure, qui estime que le bât blesse au niveau de la collecte des données météorologiques. «Nous avons besoin de plus de stations météorologiques standardisées avec des données récoltées sur une base horaire, et de plus de données d’observations détaillées sur le terrain. Ces données, par exemple sur les phases des précipitations, nous permettent de mieux comprendre les impacts sur le manteau neigeux et les inondations. Il nous faut aussi plus d’experts en analyse et en interprétations de ces données.»

L’une des forces du Canada, selon elle, tient aux projets multidisciplinaires impliquant plusieurs équipes de recherche, comme Global Water Future, qui s’est terminé en 2024. «Ce projet a mené à des avancées scientifiques sur les inondations et les sécheresses et il a permis de soulever d’autres questions de recherche sur les événements météorologiques extrêmes, notamment dans les Rocheuses et dans la vallée du Saint-Laurent», illustre-t-elle.

Le financement de la recherche universitaire est nécessaire, insiste-t-elle, non seulement pour générer des données, des analyses et de nouveaux modèles de prévision, mais aussi pour former la relève. «Les avancées en matière de sciences du climat au Canada seront le fruit du travail de la prochaine génération de chercheuses et chercheurs», note-t-elle.

L’autonomie canadienne

Lors de son passage au Sénat, Julie Thériault a perçu que les députés et sénateurs étaient conscients de l’importance des modèles prévisionnels relatifs à l’eau conçus par les universités canadiennes, à plus forte raison dans le contexte actuel délétère pour les sciences aux États-Unis. «Cela semble acquis que nous devons développer, maintenir et améliorer nos systèmes de manière autonome», conclut-elle.