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Le droit au logement fragilisé chez les personnes aînées

Les personnes aînées locataires vivent différentes formes d’exclusion sociale et territoriale liées à la précarité résidentielle.

Série

Acfas 2024

Par Claude Gauvreau

13 mai 2024 à 10 h 40

Le Québec s’est doté de politiques pour permettre aux personnes aînées de vieillir chez elles en sécurité et en bonne santé. Or, les personnes locataires âgées de 65 ans et plus, notamment celles à faible revenu, vivent diverses formes d’exclusion et de discrimination dans un marché de l’habitation de plus en plus soumis à la spéculation immobilière et à la gentrification. Ces questions seront abordées au colloque «L’exclusion socio-territoriale des locataires aînée.e.s» (16 mai), co-organisé par la professeure du Département d’études urbaines et touristiques de l’ESG UQAM Hélène Bélanger.

Les personnes aînées locataires occupent souvent leur domicile depuis une longue période de temps, payant en général moins cher pour se loger. «Mais cela les met plus à risque face aux tentatives de reprise de logement par les propriétaires, note la professeure. Pour ces derniers, avoir des locataires qui paient un loyer inférieur aux prix du marché affecte la rentabilité de leurs investissements.» Au colloque, une communication décrira les formes de pression exercées par les propriétaires pour inciter les locataires aînés à quitter leur logement, alors que celui-ci représente un lieu d’ancrage dans un quartier ou une localité, favorisant le sentiment de sécurité.

Il sera d’ailleurs question de l’augmentation constante des évictions et reprises de logement. Entre 2014 et 2021, le nombre de décisions à ce sujet a triplé et dans la majorité des cas les reprises sont autorisées par le Tribunal administratif du logement. En 2016, Québec a adopté une loi interdisant aux propriétaires d’évincer une personne âgée de plus de 70 ans qui vit dans son logement depuis plus de 10 ans et qui a un revenu modeste lui permettant d’être admissible à un logement à loyer modique. Plus récemment, Québec solidaire a soumis le projet de loi 98 afin que la loi s’applique désormais aux aînés de 65 ans et plus qui occupent un logement depuis cinq ans. «Revoir les critères pour protéger davantage les personnes aînées locataires est une bonne chose, mais encore faut-il que ces personnes connaissent l’existence de la loi et y recourent pour défendre leurs droits», indique la professeure.

Selon la ministre de l’Habitation France-Élaine Duranceau, la loi aurait un effet pervers en rendant les propriétaires hésitants à accepter des locataires aînés. «Ce n’est pas une raison pour refuser d’élargir la portée de la loi, soutient Hélène Bélanger. Le gouvernement actuel s’inscrit dans une perspective de libre marché, comme si celui-ci pouvait s’autoréguler, ce qui n’est pas le cas. On doit protéger les personnes aînées face à des propriétaires qui font preuve de discrimination en refusant de louer à une personne en raison de son âge.»

Le logement constitue aussi un déterminant majeur de la santé, notamment pour les personnes aînées en perte d’autonomie. «Des logements insalubres ou qui limitent la mobilité ont un impact nocif, observe Hélène Bélanger. Ne pas se sentir chez soi, devoir payer un loyer trop élevé ou être forcé de déménager ont des effets sur la santé psychologique.»

Le colloque traitera, par ailleurs, des moyens mis en œuvre à différentes échelles pour s’attaquer au problème de la précarité résidentielle des personnes âgées et pour mieux les soutenir.