Souvent invisibilisé par diverses stratégies urbaines, le phénomène de l’itinérance est au cœur de l’exposition (IN)VISIBLE: le design au prisme de l’itinérance, présentée par le Centre de design en collaboration avec Architecture Sans Frontières Québec (ASFQ), la professeure de l’École de travail social de l’Université de Montréal Carolyne Grimard et la professeure de l’École de design Anne-Marie Broudehoux.
Fruit d’un travail de recherche échelonné sur plus de deux ans, l’exposition a aussi été réalisée en partenariat avec des organismes communautaires et des personnes ayant vécu l’itinérance. Proposant une réflexion sur la manière de rendre visibles les revendications spatiales des personnes en situation d’itinérance, sans leur porter préjudice, l’exposition emprunte plusieurs outils aux domaines du design, tels que la cartographie et le photovoix (une méthode utilisant la photo comme prise de parole).
(IN)VISIBLE propose des œuvres créées par des artistes et par des chercheuses et chercheurs ayant vécu ou non l’itinérance et portant un regard humain et politique sur ce phénomène social. Parmi les créations, on trouve, entre autres, les Archisuits de l’artiste américaine Sarah Ross, dont les mousses épousent les formes du mobilier urbain, permettant aux personnes d’être confortables sur des structures hostiles. L’artiste manie la photographie et l’installation pour réclamer des droits et pour conscientiser le public.
On verra aussi des photos documentaires de la série Assez d’espace à l’intérieur de l’artiste québécoise Kassandra Reynolds qui, en 2020, a vécu plusieurs semaines dans un campement pour itinérants à Montréal, des récits urbains de partenaires de recherche ayant connu des conditions précaires liées au logement, des maquettes réalisées par les membres du collectif Dehors de dehors représentant des projets d’aménagement ainsi qu’une cartographie critique produite grâce à une collaboration entre le collectif Architecture + itinérance (a+i), l’organisme l’Anonyme et des personnes participantes à la Nuit des sans-abri 2024.
À l’occasion du projet d’exposition, la professeure Anne-Marie Broudehoux a organisé un atelier de design international avec l’artiste Sarah Ross, du 11 au 18 mai derniers. Une vingtaine de finissantes et finissants du baccalauréat en design de l’environnement ont parcouru la ville pour réaliser des travaux qui seront intégrés à l’exposition.
Autres artistes participants
Plusieurs autres artistes participent à l’exposition, dont la professeure en travail social de l’Université du Cap-Breton Alison Grittner. Elle a collaboré à une recherche pancanadienne sur les éléments qui favorisent ou entravent la capacité de personnes aînées en situation d’itinérance ou précaires à «vieillir au bon endroit». Plusieurs des photos tirées de cette recherche sont exposées.
Doctorante en santé communautaire à la Faculté de médecine et des sciences de la santé à l’Université de Sherbrooke, Caroline Leblanc est membre du comité de direction de Scholars with Lived Experience (LivEx) – Making the Shift (MtS), un réseau dédié aux personnes ayant vécu des formes d’exclusion liées au logement. Elle joue un rôle de conseillère en recherche chez Architecture Sans Frontières Québec (ASFQ).
Le collectif OnNeLaissePersonneDerrière (ONLPD), composé de personnes du milieu communautaire, présente sa démarche de photovoix.
Chercheuse au Centre Georg Simmel d’études métropolitaines de l’Université Humboldt, à Berlin, Natalia Martini s’intéresse de près à la vie quotidienne urbaine et aux approches créatives permettant d’étudier ses dimensions spatiales et temporelles. Son œuvre ethnographique Kraków bezdomny fait partie de l’exposition.
Intervenante sociale et étudiante à la maîtrise en travail social à l’Université de Montréal, Marie-Hélène Mathieu a créé, avec Véronic Lapalme du collectif a+i, l’artefact Porter des regards féminins sur la ville de nos rêves, en collaboration avec des participantes de l’Auberge Madeleine.
Le collectif d’artistes et d’activistes Mossy Society & Comm-Un, qui recherche la participation des communautés autochtones et des minorités culturelles dans ses projets, propose une réinterprétation d’une bannière installée à Milton-Parc en 2022 pour contester l’aménagement de clôtures avec le message «Too many walls. Not enough homes».
Passionnée d’ethnographie, la professeure en communication à l’Université du Québec en Outaouais Karoline Truchon a participé à la réalisation de l’œuvre interactive Conversation de rue avec Sonia Blank et Olivia Daigneault Deschênes.
Commissariat
Le commissariat de l’exposition est assuré par le collectif Architecture + itinérance, né en 2021 d’une collaboration entre le programme de solidarité urbaine d’Architecture Sans Frontières Québec et la professeure de l’Université de Montréal Carolyne Grimard. Les activités du collectif sont axées sur les liens entre l’aménagement et le bien-être des personnes en situation d’itinérance dans la ville. Le groupe a publié le catalogue Architecture + Itinérance: pratiques inclusives pour une ville solidaire (2023) et réalisé plusieurs projets d’aménagement en collaboration avec des organismes communautaires.
L’exposition (IN)VISIBLE se déroule jusqu’au 16 juin prochain.
Exposition dans le hall du pavillon de Design
Le professeur de l’École de design Thomas-Bernard Kenniff, cofondateur du Bureau d’étude de pratiques indisciplinées (BéPI), ainsi que des étudiantes et étudiants en design de l’environnement proposent l’exposition Aménager la proximité. Présentée jusqu’au 21 juin dans le hall du pavillon de Design, l’exposition est issue d’un projet de recherche sur l’aménagement des hôtels de ville et des cours municipales en milieu régional. Elle met de l’avant une réflexion sur la proximité à travers l’analyse de 40 villes, par l’entremise de dessins et de photographies à l’échelle du bâtiment, du noyau urbain et de la municipalité.