C’est l’histoire d’une mine et de ses habitants, les microbes. «Imaginez: vous rentrez chez vous et votre partenaire vous a laissé un mot sur la table. Je pars pour d’autres aventures, je te laisse mes affaires, merci pour tout. Évidemment, vous seriez dévasté. Cet abandon, c’est ce que vivent les microbes dans les mines», illustre avec originalité Élise Lhoste. Le jour où le propriétaire de la mine décide de l’abandonner, après des années d’exploitation, il laisse derrière lui ses affaires, ses déchets et les microbes qui y habitent, explique la candidate au doctorat en biologie, qui a obtenu la faveur des juges et du public lors de la finale uqamienne du concours Ma thèse en 180 secondes.
Après cet abandon, les microbes doivent faire face à une autre épreuve: l’inondation de la mine, car avec le temps, l’eau des profondeurs remonte petit à petit à la surface. «Leur environnement, jusqu’ici terrestre, devient alors aquatique et leurs nouvelles conditions de vie ne font pas rêver, note Élise Lhoste. Car plus on s’enfonce dans la mine, plus il fait froid, moins il y a de lumière, d’oxygène et de nourriture, et on y retrouve des métaux.»
S’ils veulent survivre, les microbes doivent réagir. Comment font-ils? C’est l’une des questions qui occupe Élise Lhoste dans le cadre de sa thèse, réalisée sous la direction de la professeure du Département des sciences biologiques Cassandre Lazar. «Je travaille avec une équipe de plongeurs qui récupère des échantillons dans la mine, poursuit la doctorante. C’est en analysant l’ADN de ces échantillons que j’essaie de comprendre la réaction des microbes à l’abandon et à l’inondation de la mine.»
«Si vous étiez à la place de microbes, comment réagiriez-vous?», demande la jeune chercheuse. «Premièrement, vous pourriez sortir pour vous changer les idées. Pour les microbes, il s’agirait de se déplacer dans l’eau. Cela peut aussi être l’occasion de repartir à zéro en faisant du tri et, pourquoi pas, devenir minimaliste. Certains microbes se débarrassent d’élément superflus dans leur cellule pour ne garder que l’essentiel. Ils réduisent leur taille, économisant de l’énergie, ce qui est utile lorsqu’ils manquent de nourriture.»
Ce pourrait aussi être l’occasion de rendre visite à vos proches pour partager de bons moments, observe Élise Lhoste en filant la métaphore. «Certains microbes, notamment des petits champignons, sont capables de produire de la nourriture et de la partager avec d’autres microbes», note-t-elle.
Enfin, vous pourriez faire une détox, repartir sur des bases saines, propose la doctorante. «Dans les profondeurs de la mine, des microbes appartenant à un groupe inconnu seraient capables de se détoxifier et de se débarrasser de certains métaux et pesticides présents dans leurs cellules. C’est une découverte prometteuse, mais ce sera à suivre dans un prochain chapitre de l’histoire des microbes et des mines», conclut-elle.
Le jury a souligné ses talents de communicatrice, son aisance devant le public, la clarté de son propos et sa capacité à transmettre beaucoup de contenu scientifique sans pour autant alourdir l’exercice.
Le prix du jury, qui s’accompagne d’une bourse de 1 500 dollars, vaut à Élise Lhoste de représenter l’UQAM lors de la finale nationale du concours Ma thèse en 180 secondes, qui se tiendra en marge du congrès de l’Acfas et qui réunira, le 15 mai prochain à l’Université d’Ottawa, des étudiantes et étudiants provenant d’une vingtaine d’universités francophones à travers le Canada.
Le prix du public, une bourse de 500 dollars, a été décerné à la doctorante par le vice-recteur à la Recherche, à la création et à la diffusion Christian Agbobli.
Cinq doctorantes et deux doctorants étaient en lice lors de cette finale uqamienne, dont trois de la Faculté des sciences, deux de la Faculté des arts, une de la Faculté des sciences humaines et un de la Faculté des sciences de l’éducation.
Le jury était constitué de Stephan Chaix, directrice du Cœur des sciences, Pascale Martineu, agente de recherche et de planification au Service de la recherche et création, Patrice Potvin, professeur au Département de didactique, Martine Turenne (B.A. communication, 1987), rédactrice en chef de La Conversation Canada, et David Paquette-Bélanger, gagnant du prix du jury 2023. Joanie Doucet, conseillère au Service des communications, agissait à titre de maîtresse de cérémonie. L’événement faisait partie de la programmation du Printemps de la recherche.
Organisé par l’Acfas depuis 2012, ce concours de vulgarisation, qui permet à des doctorantes et doctorants de présenter leur sujet de recherche en termes simples à un auditoire profane et diversifié, est inspiré du concours Three minute thesis (3MTMD) qui a eu lieu pour la première fois en 2008 à l’Université du Queensland, en Australie. L’évaluation est basée sur trois critères: le talent d’orateur et la passion du participant pour son sujet, sa capacité de vulgarisation et la structure de son exposé. Le concours québécois a été le premier en langue française. Les lauréats de la finale nationale canadienne seront invités à participer à la finale internationale, qui se tiendra à Abidjan, en Côte d’Ivoire, l’automne prochain.
On peut voir ou revoir la prestation d’Élise Lhoste sur UQAM.tv.