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Les effets de l’activité physique chez les jeunes avec un TDAH

La doctorante Chaïma Meneceur mène une étude sur les bienfaits de l’exercice sur la cognition et l’hyperactivité.

Par Jean-François Ducharme

22 novembre 2024 à 12 h 23

Mis à jour le 5 décembre 2024 à 10 h 02

Les diagnostics de trouble du déficit de l’attention avec ou sans hyperactivité (TDAH) ont explosé au Québec au cours des 20 dernières années. Selon un rapport de l’Institut national de santé publique du Québec publié en 2022, 7,7 % des jeunes de 24 ans et moins inscrits au régime public d’assurance médicaments avaient une ordonnance reliée au TDAH en 2020, soit 4 fois plus qu’en 2000. Ce taux s’élevait à 11,3 % pour les 6-11 ans et à 13,4 % pour les 12-17 ans. Pourtant, «plusieurs parents sont réticents à donner à leurs enfants ou adolescents les psychostimulants prescrits pour traiter le TDAH, affirme l’étudiante au doctorat en psychologie Chaïma Meneceur. J’aimerais trouver des méthodes complémentaires qui permettraient de réduire les symptômes.»

Dans le cadre de sa thèse doctorale, réalisée sous la direction des professeures Marie-Claude Guay, du Département de psychologie, et Claudia Verret, du Département des sciences de l’activité physique, Chaïma Meneceur explore les effets de l’activité physique sur l’attention et l’hyperactivité des jeunes souffrant d’un TDAH. «Nous savons que l’activité physique a des effets positifs autant sur les symptômes directs du TDAH, comme l’inattention, l’hyperactivité et l’impulsivité, que sur ses symptômes indirects comme l’anxiété, la dépression et l’obésité», affirme la doctorante, qui détient le titre de psychologue spécialisée en neuropsychologie en France, et qui travaille aussi comme neuropsychologue dans sa Suisse natale.

La doctorante ajoute que les jeunes ayant un TDAH sont plus sédentaires et enregistrent un temps d’écran hebdomadaire plus élevé que ceux qui n’en ont pas. «La dose de psychostimulants augmente généralement avec l’âge, souligne Chaïma Meneceur. Mais chez les jeunes qui font beaucoup d’activité physique, la dose reste relativement stable».

Des effets différents pour différents types d’exercice

La littérature actuelle ne permet pas de déterminer précisément les effets réels de l’activité physique ni ses conditions optimales. «On sait, par exemple, que les psychostimulants ont une durée de vie de 10 à 13 heures, mais on ne sait pas combien de temps après l’exercice les effets sur la concentration commencent à apparaître, ni combien de temps ils durent», note Chaïma Meneceur.

Certaines études proposent des pistes intéressantes. L’une d’elles a démontré que l’activité physique agit sur différentes fonctions complexes dans le cerveau. «Elle aiderait notamment à améliorer les fonctions exécutives, comme la flexibilité mentale, la planification et la résolution de problèmes, mentionne la doctorante. Elle augmenterait aussi l’éveil cortical, ce qui permettrait de rester en état d’alerte lorsque l’enseignant parle devant la classe, en plus d’améliorer la capacité à effectuer différentes tâches simultanément, comme écouter le cours et prendre des notes.»

Les effets sur le cerveau varieraient selon le type d’activité physique. Faire de l’exercice à intensité modérée permettrait d’améliorer la flexibilité cognitive, alors que l’exercice à faible intensité ou à haute intensité améliorerait plutôt la mémoire de travail et réduirait l’impulsivité. Les exercices aérobiques comme la course à pied, le vélo et la natation agiraient davantage sur le niveau d’alerte et la concentration, alors que les activités qui sollicitent la coordination renforceraient le contrôle inhibiteur en diminuant l’impulsivité et en favorisant l’autorégulation du comportement.

«Nous pourrions donc théoriquement adapter l’activité physique aux besoins de l’enfant en créant un programme d’exercices qui correspond à son profil, souligne la chercheuse. Mais ces résultats doivent être considérés avec prudence. Ils ne sont pas identiques d’une étude à l’autre, et les différents paramètres, comme le niveau sportif des participants, ne sont pas non plus exactement les mêmes.»

Participants recherchés

Afin de faire avancer la recherche dans le domaine, Chaïma Meneceur recherche des jeunes âgés de 8 à 15 ans, ayant reçu un diagnostic de TDAH ou chez lesquels la présence de ce trouble est suspectée. «Nous étudions spécifiquement la durée des effets immédiats d’une séance d’activité physique sur les capacités attentionnelles ainsi que sur l’agitation motrice des jeunes, précise la doctorante. Nous visons une centaine de participants.»

Dans le cadre de l’étude, les jeunes seront divisés en quatre groupes. Les trois groupes expérimentaux participeront à une séance d’activité physique d’intensité modérée pendant 30 minutes avant de passer un test visant à évaluer les compétences attentionnelles. Le premier groupe réalisera le test immédiatement après l’exercice, le deuxième le fera 30 minutes après, et le troisième, 60 minutes après l’activité physique. Les jeunes du groupe contrôle seront quant à eux soumis à une activité passive avant le test. «Ils pourront tout de même participer à la séance d’activité physique après le test», souligne Chaïma Meneceur.

Les parents seront aussi invités à compléter un questionnaire d’observation comportementale sur les symptômes d’inattention et d’hyperactivité de leur enfant, ainsi qu’un bref questionnaire sur son historique médical et développemental. En reconnaissance de leur participation, les jeunes recevront un diplôme attestant de leur contribution à une étude scientifique ainsi que des petites récompenses. «Nous espérons dévoiler les premiers résultats de recherche à l’été ou à l’automne 2025», conclut la chercheuse.

Les personnes intéressées à participer à l’étude peuvent s’informer par courriel à l’adresse etude.tdah.ap@gmail.com ou par téléphone au (438) 506-8215.