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Alain Gaudreault, chercheur indépendant en communication

À 68 ans, le nouveau diplômé du doctorat et ancien fonctionnaire envisage une carrière de chercheur.

Par Claude Gauvreau

8 janvier 2024 à 12 h 16

Mis à jour le 9 janvier 2024 à 16 h 04

À 68 ans et des poussières, Alain Gaudreault (Ph.D. communication, 2023)  a soutenu dernièrement à l’UQAM une thèse de doctorat de 500 pages – avec mention d’excellence – après avoir œuvré dans les communications gouvernementales au niveau fédéral pendant une trentaine d’années. «Aujourd’hui, j’entends mener une deuxième carrière, cette fois à titre de chercheur indépendant et d’enseignant», lance-t-il sur un ton déterminé.

L’intérêt du diplômé pour les communications et l’information ne date pas d’hier. En 1977, il obtient un baccalauréat en communication à l’UQAM, puis une maîtrise en sciences de la communication à l’Université de Montréal, en 1983. «Je suis né avec la télévision et j’ai été témoin de l’essor des médias de masse et des nouvelles technologies de communication, raconte-t-il. Dans mon esprit, les communications étaient synonymes d’ouverture au monde.»

Après ses études de maîtrise, Alain Gaudreault entame une carrière au sein de l’appareil gouvernemental fédéral, où il occupe des postes de direction associés à diverses facettes des communications: publicité, marketing, commandites, relations de presse, communication organisationnelle et stratégique. De 1982 à 1995, il travaille à Emploi et immigration Canada, puis à Environnement Canada (1995-2001) et à Anciens combattants Canada (2001-2013), avant d’agir comme consultant et conseiller en communication pour le gouvernement fédéral, de 2014 à 2019.

«Ces expériences m’ont permis d’observer la proximité grandissante entre les domaines de la communication et du politique, note le diplômé. Elles ont aussi nourri mes questionnements, notamment théoriques, en ce qui concerne les rapports entre démocratie et communication dans une société libérale comme la nôtre. C’est ce qui m’a incité à retourner à l’université quelques années après avoir pris officiellement ma retraite.»

Les débuts de la scolarité de doctorat ne furent pas toujours faciles, confie Alain Gaudreault. «Un retraité dans la soixantaine qui effectue un retour aux études en s’inscrivant à un programme de troisième cycle est perçu comme une drôle de bibitte, dit-il. J’ai dû faire une propédeutique, puis j’ai eu la chance de rencontrer des professeurs qui m’ont ont aidé à préciser mon projet de recherche. J’ai apprécié l’ouverture d’esprit qui régnait à l’UQAM. J’avais le sentiment d’avoir toute la liberté requise pour développer et exprimer mes idées.»


Une recherche doctorale exploratoire

Dans le cadre de sa thèse codirigée par le professeur associé de l’École des médias Gilles Coutlée et son collègue Louis-Claude Paquin, le diplômé adopte une approche systémique en s’appuyant sur une lecture actualisée de la théorie des systèmes sociaux du sociologue et cybernéticien allemand Niklas Luhmann (1927-1998). Alain Gaudreault y explore l’évolution des liens unissant les médias traditionnels d’information, les institutions politiques et différents types de publics.

«Mes expériences professionnelles m’ont permis de constater un déficit de confiance au sein de la population à l’égard des médias et des institutions démocratiques, déficit qui n’a cessé de croître au fil des ans et que je cherche à analyser dans ma thèse», indique le chercheur. Selon lui, «ce déficit de confiance repose sur une perception négative des performances, des compétences et de l’attitude éthique des institutions politiques et médiatiques, ce qui se traduit, notamment, par un faible taux de participation aux scrutins et une baisse importante des auditoires».

Il n’y a pas si longtemps, rappelle Alain Gaudreault, les gens croyaient en la parole des hommes et des femmes politiques parce qu’ils avaient été élus démocratiquement, et à celle des médias parce que, comme le disait l’adage, c’était écrit dans le journal. «Cette confiance spontanée s’est estompée, avec pour conséquence un désaveu de plus en plus prononcé envers les systèmes politique et médiatique, qui favorise l’essor des discours populistes et des réseaux sociaux.»

Cette tendance lourde est indissociable de la crise que traversent les médias depuis une dizaine d’années, affirme le diplômé. «À titre d’exemple, le Groupe TVA a annoncé en novembre dernier la suppression de plus de 500 postes, essentiellement en production, en raison de la concurrence des géants du web et de la chute des revenus publicitaires. Un mois plus tard, c’était au tour de Radio-Canada d’annoncer l’abolition de 800 postes. Ces mesures illustrent la situation de crise dans laquelle sont plongés les médias traditionnels, considérés comme l’un des piliers de notre démocratie.»


Partager son expérience

Parallèlement à ses études doctorales à l’UQAM, Alain Gaudreault a été chargé de cours à la Faculté de communication, de 2018 à 2021. «Comme j’avais envie de partager mon expérience professionnelle avec les étudiants, j’ai donné un cours sur les approches stratégiques de la communication.» Actuellement, il continue d’enseigner en communication, toujours à titre de chargé de cours, à l’Université de Montréal. «J’ai beaucoup de plaisir à préparer mes cours. Cela me permet de mettre mes connaissances à jour, de maintenir le contact avec les jeunes générations d’étudiantes et d’étudiants en confrontant mes idées aux leurs.»

Le diplômé a l’intention, par ailleurs, de publier sa thèse. «C’est une thèse atypique, en raison de son caractère volumineux, reconnaît-il. Elle contient quelque 300 notes de bas de page et une cinquantaine de figures et de tableaux. Je suis conscient que sa publication exigera un important travail de réorganisation afin que le texte soit accessible à un public non spécialisé.»

Dans la foulée de sa thèse, Alain Gaudreault entend poursuivre son travail de recherche et d’écriture. «Je suis en bonne santé et j’estime avoir encore beaucoup de temps devant moi. Je me sens capable, davantage qu’à 20 ans, d’emmagasiner beaucoup d’informations. Il est important que les universités ouvrent leurs portes à des personnes, même âgées, qui possèdent un bon bagage d’expériences, professionnelles ou autres, et qui demeurent assoiffées de connaissances.»