Le 9 avril 2024, l’UQAM fête ses 55 ans. Quel portrait se dégage d’une institution à travers l’histoire de ses publicités? La dernière campagne promotionnelle lancée en janvier dernier illustre la contribution de l’UQAM à la société à travers des exemples tirés des cinq dernières décennies. De la création d’un baccalauréat en sciences juridiques axé sur le droit social, il y a 50 ans, au déploiement de l’art numérique dans l’espace public, en passant par l’avènement de la sexologie, la recherche en environnement et en prévention du cancer, la série d’affiches se termine par un message résolument tourné vers l’avenir: «Vous n’avez encore rien vu»!
Jeune université, l’UQAM s’est rapidement démarquée par ses campagnes promotionnelles visant à faire valoir sa spécificité. D’une décennie à l’autre, depuis sa création en 1969, ses campagnes renvoient l’image d’une université au service de la collectivité, urbaine, moderne, accessible. Sa localisation au centre-ville, au croisement principal des lignes de métro, ses domaines de recherche collés à l’évolution de la société sont constamment mis de l’avant. Témoignant du mandat qu’a l’UQAM, depuis sa fondation, d’ouvrir plus grandes les portes des études supérieures, les étudiantes et étudiants apparaissent nombreux dans ses publicités. Tout comme ses diplômés, hommes et femmes, qui, chacun à leur façon, contribuent au développement du Québec et du monde.
Il existe peu de traces des premières campagnes de promotion de l’UQAM. La plus ancienne publicité connue apparaît dans une photo de 1974 prise sur un quai de la station Berri (à l’époque Berri-de-Montigny). La photo montre une jeune femme regardant un panneau publicitaire affichant en lettres capitales le slogan «Urbaine, présente, démocratique» au-dessus du logo de l’UQ et du nom «Université du Québec à Montréal». De part et d’autre, le sigle UQAM (bien avant d’être redessiné par le regretté professeur de l’École de design Frédéric Metz) chapeaute une illustration de style pop: on y voit un personnage aux cheveux frisés et aux lunettes d’aviateur typiques des années 1970, avec des tours illustrant le centre-ville, des panneaux de circulation et le logo du métro de Montréal.
À l’époque, le campus central n’existe pas. L’UQAM est dispersée à travers le centre-ville, entre le pavillon Read, dans le Vieux-Montréal, le pavillon Sainte-Marie, sur Bleury, et une douzaine d’autres édifices répartis sur cinq kilomètres. Mais le projet de construire un campus dans le Quartier latin existe depuis la naissance de l’Université. Dès 1971, l’UQAM a commencé à faire l’acquisition de terrains dans le secteur Berri-de Maisonneuve. «Il était très important que l’UQAM soit reliée au réseau du métro», rappelle l’historienne de l’architecture France Vanlaethem, professeure émérite de l’École de design, dans un article publié à l’occasion du 40e anniversaire du campus central, en 2009. «Cela faisait partie du projet initial de construire une université ouverte sur la ville et ses habitants.»
La construction du campus central a été un des projets phares de la première décennie de l’Université et énormément de matériel promotionnel a été produit en lien avec ce projet: brochures, dépliants, cartes, encarts publicitaires sont conservés au Service des archives. On y trouve même un document dont l’intérieur se déplie comme une carte pop up pour montrer la silhouette du nouveau campus au cœur de la ville!
Intégré au campus, le clocher de l’église Saint-Jacques deviendra l’emblème du Quartier latin et de l’UQAM, une sorte d’icône dans la documentation promotionnelle de l’Université. À partir des années 1980, on le voit apparaître dans plusieurs documents, dont cette publicité et ces épinglettes soulignant le 15e anniversaire de l’UQAM, en 1984.
Si l’image du campus central reste populaire dans l’iconographie des dépliants, brochures et rapports annuels produits par l’Université, les campagnes déployées à partir de la fin des années 1980 misent de plus en plus sur le prestige de ceux et celles qui y ont reçu leur diplôme. Selon un article du Devoir paru en 1995, c’est même l’UQAM qui aurait lancé la mode, copiée ensuite par les autres universités, des «anciens étudiants-vedettes-porte-parole».
En 1988, la campagne «Le savoir universitaire, une valeur sûre!» met de l’avant des professeurs (Pierre Dansereau, le fondateur de l’écologie au Québec, ainsi que Colette Boky et Joseph Rouleau, vedettes du Département de musique), mais aussi des diplômés qui ont réussi, dont Jean Laurin (B.Sp. administration, 1974), à l’époque p.-d.g. de la société immobilière Devencore. Toujours resté un ardent défenseur de l’UQAM, Jean Laurin siège aujourd’hui au conseil d’administration de la Fondation à titre de vice-président.
Une autre publicité souligne que la formation de qualité reçue à l’UQAM prépare ses diplômés «à faire face au monde du travail et à s’y faire remarquer», avec une énumération des bourses prestigieuses et autres distinctions qu’ils ont reçues. Parmi ces derniers, on retrouve Patrick Pichette (B.A.A., 1987), premier finissant de l’UQAM à recevoir la bourse Rhodes. Vingt ans plus tard, le diplômé deviendra premier vice-président de la multinationale Google, un poste qu’il a occupé jusqu’en 2015.
En 1990, la campagne se poursuit sur un ton plus humoristique, avec des publicités qui s’amusent de la réputation de pelleteurs de nuages qui colle parfois aux membres de la communauté uqamienne. Sous des titres tels qu’«Un autre “marginal” de l’UQAM», «Un autre “rêveur” de l’UQAM» ou une «Une autre “illuminée” de l’UQAM», elles prennent le contrepied de cette réputation en mettant en scène des diplômés qui ont fait leur marque dans des domaines aussi sérieux que la vente de produits pharmaceutiques, la recherche biomédicale et le droit environnemental.
Tout en conservant le slogan «Le savoir universitaire, une valeur sûre!», on revient l’année suivante à des messages moins ambigus, qui mettent l’accent sur les familles, nom donné par l’UQAM, lors de sa création, aux regroupements de programmes (les facultés ne seront créées qu’en 1999). Ce sera «Une autre diplômée en lettres et communication de l’UQAM» – Sylvie Lalande (B.Sp. information culturelle, 1975), à l’époque vice-présidente, recherche et développement, chez Vidéotron et aujourd’hui présidente du conseil d’administration du Groupe TVA ainsi que vice-présidente du conseil de Quebecor –, «Un autre diplômé en sciences de l’éducation de l’UQAM» – Mario Demers (B.Sc. enseignement en activité physique, 1984), inventeur du kinball – et autres exemples inspirants.
En 1992-1993, exit les photos. L’agence de publicité Tam-Tam propose une série de publicités misant sur la typographie et des messages forts qui occupent toute la page. Cette fameuse campagne, qui pointe sans les nommer des personnalités reconnues dans leur domaine, inclut des messages tels que «Le doyen de la Faculté de droit de McGill est un ancien de l’UQAM» – Yves-Marie Morissette (B.Sp. science politique, 1972), aujourd’hui juge à la Cour d’appel du Québec – ou «Un des leaders mondiaux en infographie 3D est un ancien de l’UQAM» – le regretté Daniel Langlois (B.A. design graphique, 1980), fondateur de Softimage. Elle fera beaucoup de bruit.
Déployée dans les quotidiens et les magazines, la campagne met en valeur la qualité du diplôme obtenu à l’UQAM par des exemples démontrant la diversité et l’importance du rôle que jouent ses diplômés dans la société québécoise. «Pour parvenir à s’imposer dans le domaine extrêmement spécialisé des logiciels d’infographie en trois dimensions de haute définition, mentionne la pub inspirée par Daniel Langlois, il fallait, en plus de posséder talent et détermination, pouvoir appuyer son travail sur une formation de très haut calibre. Et c’est cette qualité d’enseignement qui explique pourquoi, parmi les leaders dans leur domaine, on retrouve si souvent des anciens et des anciennes de l’UQAM».
La campagne connaîtra plusieurs déclinaisons avec, notamment, le message «Chaque soir à 22 h 25, un ancien de l’UQAM fait le Point», une référence à l’émission Le Point, diffusée après le téléjournal sur les ondes de Radio-Canada et animée de 1992 à 1998 par le journaliste Jean-François Lépine (M.A. science politique, 1981) et une autre, «Celle qui fait la pluie et le beau temps à Radio-Canada est une ancienne de l’UQAM», qui évoque la popularité de la météorologue Jocelyne Blouin (B.Sp. sciences physiques, 1974).
En 1994-1995, on revient avec des images: des jeunes, cette fois, qui n’ont pas un statut de vedette, mais qui, grâce à leurs études à l’UQAM, entament «une carrière intéressante et valorisante», selon l’argumentaire de la directrice du Service de l’information externe de l’époque, Françoise Talbot. Parmi les têtes d’affiche de cette campagne, le comptable Jean Gagnon (B.A.A. sciences comptables, 1987), qui vient alors d’obtenir un poste et qui est aujourd’hui associé chez Raymond, Chabot, Grant, Thornton, Nathalie Tardif (B.Ed. éducation préscolaire et enseignement primaire, 1990), toujours enseignante à l’école Sans-Frontières de Rosemont 20 ans plus tard, et un certain Denis Villeneuve (B.A. communication, 1992), frais émoulu de la Course autour du monde, une compétition qui amène de jeunes cinéastes à tourner des films en quelques jours dans plusieurs pays du globe.
Le slogan «L’UQAM, une force novatrice», qui accompagne les images, est adopté en 1995. Ce slogan, qui est aussi celui de la campagne de financement que mène alors la Fondation de l’UQAM, est utilisé jusqu’en 1997. Il sera repris dans plusieurs documents promotionnels, incluant une photo réalisée par le photographe Michel Brunelle (B.A. design graphique, 1995) à l’occasion du 25e anniversaire de l’Université, en 1994. Cette image qui montre des étudiantes et étudiants sur le campus, en jeans, l’air naturel, remporte un prix au concours 1995 du Conseil canadien pour l’avancement de l’éducation (CCAE).
Le slogan apparaît aussi sur de nombreuses publicités qui mettent en valeur l’environnement d’études et de recherche avant-gardiste de l’UQAM. Dans les années 1990, les nouvelles technologies, comme on le voit dans la photo de l’étudiant (ou du chercheur) au clavier de l’ordinateur, prennent de plus en plus de place dans la vie universitaire. Témoin de cette époque, la campagne promotionnelle lancée en 1997, «L’UQAM, tout pour réussir», adopte clairement l’iconographie du monde informatique.
L’influence de l’imagerie numérique continue de se faire sentir dans la campagne «L’avenir est ici», avec ses images pixellisées aux accents pop art. La communauté étudiante est en vedette dans cette nouvelle campagne créée en 1998 en collaboration avec l’agence LG2. À remarquer: on a choisi une étudiante pour représenter les sciences. L’idée qu’il faut encourager la place des femmes en sciences est déjà présente.
Un autre détail est à souligner dans cette campagne de 1998: l’apparition du nouveau logo de l’UQAM signé par Frédéric Metz, avec son accent grave sur le «À». Ce logo devenu emblématique a fait couler beaucoup d’encre. Selon le professeur (cela est rapporté dans un document publié à l’époque par le Service de l’information et des relations publiques), avec cet ajout sur le A, le logo, comme ensemble visuel, est «esthétiquement mieux équilibré et plus distinctif». Il permet aussi d’attirer l’attention sur le caractère francophone de l’Université, notamment à l’étranger, et, de plus, la forme de l’accent évoque un mortier, «symbole bien connu du diplôme universitaire».
Son adoption ne se fera pas sans de nombreux débats sur la pertinence d’ajouter un accent sur un sigle, qui normalement n’en prend pas. Au cours des consultations qui l’ont précédée, un expert de l’Office québécois de la langue française a même proposé que l’accent soit placé sur le «U» afin de marquer plus clairement qu’il ne s’agissait pas d’un accent, mais d’un signe graphique. Proposition, on s’en doute, rejetée par le designer. Quoi qu’il en soit, le logo finira par remporter l’adhésion générale. Le linguiste de Radio-Canada Guy Bertrand prendra sa défense, affirmant que l’acronyme UQAM, utilisé comme signature, doit être considéré comme un logo, donc une image, et qu’à ce titre, il échappe aux règles d’écriture des sigles.
Si le nouveau logo, avec sa typo sans empattements, cherche à traduire la jeunesse et le dynamisme de l’UQAM, c’est aussi la marque de la campagne «L’avenir est ici». Déployée à grande échelle, notamment dans le métro, cette campagne colorée fait jaser. «La publicité que je préfère est celle qui est affichée au métro Université de Montréal, montrant un étudiant qui pointe en direction de l’UQAM pour dire “L’avenir est par là”. C’est effronté et j’aime ça !», dit un étudiant en histoire interrogé par le Montréal Campus.
La même publicité, affichée à la station Crémazie, aurait toutefois provoqué une «collision publicitaire». À cette époque de l’année où les universités rivalisent pour séduire la clientèle des cégeps, principalement dans les transports en commun, une publicité de l’UQAM «L’avenir est par là» pointe vers une autre pub… celle de l’Université de Montréal!
Au début des années 2000, c’est le slogan «Prenez position» qui s’impose dans la publicité uqamienne. Cette signature incarne la volonté de l’Université de former non seulement des citoyens compétents dans des domaines diversifiés, mais aussi des personnes engagées dans leur milieu. La campagne, orchestrée avec l’aide de l’agence Sid Lee, remet des diplômés à l’avant-plan, dont Réal Raymond (M.B.A., 1986), à l’époque président et chef de la direction de la Banque Nationale, qui prendra la tête de la campagne majeure de développement «Prenez position pour l’UQAM» menée par la Fondation. Amorcée en 2002, la campagne se termine en 2007 avec des résultats dépassant de plus de 10 millions de dollars son objectif initial de 50 millions.
Comme on peut le voir dans des images tirées de brochures aux couleurs de la campagne «Prenez position», le souci de représenter la diversité étudiante de l’UQAM commence à se faire sentir de façon plus marquée.
Le corps professoral sera clairement mis en vedette dans la première mouture de la campagne «L’effet UQAM». Lancée en 2009, cette campagne met une quinzaine de professeures et professeurs sur le devant de la scène tout en présentant les retombées de leurs recherches pour la société. Pierre Fortin (sciences économiques), Lucie Sauvé (didactique) et René Laprise (sciences de la Terre et de l’atmosphère), aujourd’hui professeurs émérites, ainsi que Magda Fusaro (communication sociale et publique), Charles-Philippe David (science politique) et Lucie K. Morisset (études urbaines et touristiques), entre autres, font partie de la première série de publicités. Des professeurs plus jeunes, tels que Ying Gao (design) et Bernard Duhaime (sciences juridiques) s’ajouteront par la suite.
Remarquable par son élégance en noir et blanc, la campagne «L’effet UQAM», conçue en collaboration avec l’ancien étudiant de l’École de design Alexandre Renzo et sa complice Esther Thomassin, connaîtra différentes vagues. À l’automne 2010, une troisième phase mise sur des étudiantes et étudiants qui s’expriment dans des capsules vidéos diffusées sur le web. «C’est la première fois que nous déployons une telle campagne sur l’ensemble de nos plateformes: sites web, publicités, matériel promotionnel et quelques bannières», explique Nathalie Benoit, directrice de la promotion institutionnelle, dans un article du journal L’UQAM publié en novembre 2010. L’une de ces bannières est accrochée dans l’agora du pavillon Judith-Jasmin.
Couronnée de succès, la campagne «L’effet UQAM» a remporté la médaille d’or en tant que Meilleur programme d’affaires publiques, marketing et communications ainsi que la médaille de bronze dans la catégorie Meilleure campagne publicitaire imprimée au concours 2010 du Conseil canadien pour l’avancement de l’éducation (CCAE).
Se démarquant de «L’effet UQAM», la campagne «Inspiré par», conçue en 2014, est haute en couleur. Elle propose sept œuvres visuelles créées par des artistes diplômés représentant un portrait de chacune des facultés et de l’École des sciences de la gestion. Le pari de la campagne – miser sur la création artistique – s’éloigne des codes publicitaires habituels. «La démarche adoptée était audacieuse et créative, et, en ce sens, très représentative de l’UQAM», témoigne la directrice du Service des communications, Caroline Tessier, dans un article d’Actualités UQAM publié en janvier 2014.
Avec «Inspiré par», un projet mené en collaboration avec l’agence Cartier, on fait preuve de créativité non seulement dans la conception des publicités, mais aussi dans leur déploiement. L’affichage inclut une expérience immersive à la station de métro Berri-UQAM, où un corridor est transformé en véritable galerie d’art, alors que sur le web, un microsite regroupe sept vidéos présentant l’histoire derrière la création de chacune des affiches.
En 2018, le lancement de «100 millions d’idées», la plus importante campagne de financement de l’histoire de l’UQAM, donne lieu à une nouvelle imagerie publicitaire. Le titre fait référence à l’objectif de 100 millions de dollars de la campagne, et les publicités créées avec le soutien de l’agence Cartier mettent de l’avant des solutions déployées grâce au savoir et à la recherche universitaires. Le slogan : «Une idée brillante».
Au cours des années suivantes, les campagnes promotionnelles continuent de s’appuyer sur la thématique 100 millions d’idées. En 2019, huit déclinaisons d’une campagne visant à faire valoir les principaux secteurs d’études dans lesquels l’UQAM est présente, en lien avec des enjeux de société qui préoccupent les jeunes, sont déployées en affichage ainsi que sur les médias sociaux et le web.
La campagne de financement prend fin en 2022. En quatre ans, elle a permis de recueillir près de 119 millions de dollars, soit quelque 19 millions de plus que l’objectif fixé au départ.
Entre-temps, une nouvelle campagne de promotion est conçue en 2021 autour du positionnement «Au centre de tout». Avec ses pastilles de couleurs facilement identifiables, la campagne imaginée avec l’agence Publicis a connu, jusqu’à aujourd’hui, plusieurs déclinaisons en lien avec les programmes d’études. «À l’UQAM, on ne fait pas que rêver un monde meilleur, on le crée», affirment les vidéos diffusées sur le web. La campagne positionne l’Université au cœur de la ville, au centre de l’évolution de Montréal et du Québec, au croisement des enjeux en environnement, en justice sociale, en santé et dans plusieurs autres secteurs névralgiques pour la société. Toujours d’actualité, cette campagne est un rappel de ce qu’est l’UQAM, fondamentalement, depuis sa création.
*La rédaction de cet article, préparé à l’occasion du 55e anniversaire de l’UQAM, a bénéficié de la collaboration de Justine Boivin et Linda Kai Lyn Kan, techniciennes en archives, et de Gabriel Pilon, technicien en archives, au Service des archives et de gestion des documents.