Voir plus
Voir moins

Prix du Québec à Christian Messier et Marie-France Marin

Ces honneurs soulignent la brillante carrière du spécialiste en écologie forestière et l’excellence des travaux de l’experte des effets du stress sur la mémoire et les émotions.

26 octobre 2023 à 10 h 56

Mis à jour le 31 octobre 2023 à 16 h 12

Le professeur du Département des sciences biologiques Christian Messier est lauréat du prix du Québec Marie-Victorin, tandis que la professeure du Département de psychologie Marie-France Marin obtient le prix du Québec Relève scientifique. Les prix du Québec représentent la plus haute distinction décernée par le gouvernement du Québec en culture et en science.

Le prix Marie-Victorin récompense depuis 1977 une personne qui a mené une carrière remarquable en recherche dans le domaine des sciences naturelles et du génie, mais dont les travaux ne relèvent pas du domaine biomédical.

Le prix Relève scientifique est attribué à une personne de 40 ans ou moins se distinguant par l’excellence de ses travaux de recherche et démontrant des aptitudes à établir et à maintenir des liens constructifs et durables avec les milieux de la recherche.

Christian_Messier
Christian Messier

Professeur à l’UQAM depuis 1992 et à l’UQO depuis 2013, Christian Messier est un chercheur mondialement reconnu en foresterie et en écologie. Développant son expertise depuis près de 30 ans, il est l’un des rares chercheurs de ce domaine à concilier la recherche fondamentale, axée sur l’avancement des théories de la complexité en écologie, avec la recherche appliquée, liée au développement des pratiques de foresterie durable.

Il mène des travaux portant principalement sur deux axes: l’étude du fonctionnement complexe des systèmes forestiers naturels qui vise à développer des approches d’aménagement favorisant la résilience face aux changements globaux, et l’étude des arbres et des forêts urbaines, qui a pour but de concilier les besoins des arbres et les exigences des infrastructures urbaines en minimisant les effets négatifs sur les arbres et en optimisant les avantages apportés par les aménagements. Ses contributions touchent les théories écologiques, la diversité fonctionnelle, la résilience des écosystèmes et les pratiques durables, repoussant sans cesse les frontières de la recherche autant en milieu rural qu’en milieu urbain.

«L’obtention de ce prix est une surprise totale pour moi, surtout en regardant la liste des gens extrêmement talentueux qui l’ont reçu avant moi, témoigne-t-il. Je ressens une grande fierté, mais surtout le sentiment du devoir accompli. Je l’accepte non pas comme une reconnaissance individuelle, mais plutôt comme la reconnaissance d’un travail d’équipe extraordinaire très bien fait.»

Depuis 1995, Christian Messier s’intéresse à la gestion durable des forêts en s’impliquant dans le Réseau de centres d’excellence sur la gestion durable des forêts, qu’il a codirigé de 1996 à 2002.

En 1999, il a introduit avec succès l’approche novatrice du projet Triade, visant à équilibrer les aires protégées et les pratiques forestières durables. Sous sa direction, une collaboration entre une grande entreprise forestière et le gouvernement du Québec a permis de tester cette approche sur un million d’hectares. Après 13 ans d’expérimentation et de publications, elle a été adoptée dans la Loi sur l’aménagement durable du territoire forestier en 2013 et a trouvé écho à l’international.

L’une de ses contributions significatives est la proposition d’un changement de paradigme majeur en foresterie par l’approche des réseaux complexes fonctionnels. Cette approche a été reconnue dans le rapport du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat comme essentielle pour la résilience des forêts relativement aux changements climatiques.

Ses champs d’intérêt s’étendent également à l’écologie urbaine, où il a conçu des outils novateurs tels que SylvCiT pour maximiser la résilience des arbres face aux menaces actuelles et futures. Cet outil a été retenu par le Programme des Nations Unies pour l’environnement comme un exemple probant de solution ancrée dans la nature pour la lutte contre les crises simultanées que constituent les changements climatiques et la perte de biodiversité.

Christian Messier a également formé une génération de nouveaux chercheurs et de nouvelles chercheuses. «Ce qui me rend le plus fier, c’est la réussite des étudiants que j’ai eu la chance de rencontrer et d’influencer. J’ai pu côtoyer des jeunes gens très talentueux et extrêmement dédiés à la cause environnementale et à la forêt. Les voir s’accomplir et réussir constitue une grande source de fierté pour moi», dit-il.

En plus de son implication auprès de la relève, Christian Messier s’engage activement dans la transmission de ses connaissances au grand public par la publication d’ouvrages et sa participation à de nombreuses émissions de vulgarisation scientifique. La création en 2018 de l’entreprise Habitat, dont la mission est de proposer des solutions fondées sur la nature pour le maintien d’écosystèmes urbains et naturels toujours plus résilients avec des organisations publiques et privées, fait écho à sa contribution au partage de connaissances dans le domaine de l’écologie.

Marie-France_Marin (1)
Marie-France Marin

Au cours de ses études, Marie-France Marin a développé une expertise en psychoneuroendocrinologie (étude des liens entre le cerveau, les hormones et le comportement), plus spécialement en ce qui concerne les effets du stress sur la mémoire et les émotions. Lors de stages postdoctoraux effectués au Massachusetts General Hospital de la Harvard Medical School, elle a accru son expertise liée au conditionnement de la peur et à l’extinction, à l’anxiété de même qu’au trouble de stress post-traumatique.

Grâce à l’appui d’organismes subventionnaires, dont la Fondation canadienne pour l’innovation et la Chaire de recherche du Canada sur la modulation hormonale des fonctions cognitives et émotionnelles, elle a obtenu plus de 3 millions de dollars pour ses recherches. Elle est l’auteure de 76 articles et de 9 chapitres de livres, en plus d’avoir donné plus de 320 présentations (orales ou affichées) lors de congrès locaux et internationaux.

L’attribution de ce prix est l’occasion de souligner le chemin qu’elle a parcouru et celui à venir. «En recherche, il y a des périodes très productives et d’autres où les succès se font plus rares. Il y a inévitablement des moments de doute et de remise en question. Je suis extrêmement reconnaissante de recevoir ce prix. C’est clairement une belle tape dans le dos qui nous encourage à poursuivre notre travail. Je suis également fière de constater que le Québec reconnaît les carrières de chercheurs qui contribuent à l’avancement de la science», témoigne-t-elle.

Au-delà de son rôle de chercheuse, Marie-France Marin a contribué à l’élaboration du programme éducatif Déstresse et progresse, à l’intention des enfants et des adolescents, qui porte sur le stress et ses effets sur le cerveau. Coéditrice du magazine de vulgarisation Mammouth Magazine publié par le Centre d’études sur le stress humain, elle s’implique aussi dans les milieux scolaire et juridique en donnant de la formation au personnel pour l’outiller davantage quant aux effets du stress sur la cognition et les émotions.

Militant pour plus de diversité dans le domaine de la recherche scientifique, elle a mis sur pied, avec son équipe de recherche, un projet pilote en partenariat avec le Service de police de la Ville de Montréal et une école secondaire dont la majorité des jeunes sont issus de la diversité culturelle. Ce projet vise à leur faire visiter les laboratoires, puis à engager deux de ces jeunes dans le cadre d’un emploi d’été rémunéré au sein de ceux-ci.

«Je ne sais pas si j’avais un idéal, mais j’avais en tout cas un objectif très clair: je souhaitais mettre sur pied mon propre laboratoire de recherche et pouvoir diriger une équipe de recherche, dit-elle à propos du début de sa carrière. J’adore les rencontres d’équipe où les idées bouillonnent. On se questionne et évolue en apprenant les uns des autres. Je suis choyée de faire le métier que je voulais faire, entourée d’une équipe stimulante et engagée, et de collègues brillants et bienveillants.»

La remise des prix du Québec aura lieu le 22 novembre prochain à Québec.